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"Le temps où l’on jetait des bougnoules dans la Seine est révolu"

Publie le lundi 12 avril 2010 par Open-Publishing
4 commentaires

Une marche en la mémoire de Saïd Bourarach, vigile décédé le 30 mars à Bobigny après avoir été agressé par plusieurs personnes, s’est tenue samedi à Paris. REPORTAGE + SONS

Samedi 10 avril, entre 500 et 1000 personnes ont manifesté à Paris, entre la place de la République et Bastille. Après cinq refus de Préfecture de Paris, les proches de Saïd Bourarach ont pu organiser cette manifestation, la deuxième depuis la mort de ce jeune père de famille d’origine marocaine le 30 mars dernier. Ils sont venus demander justice pour Saïd. La mort de ce vigile de 35 ans demeure entourée d’un secret de Polichinelle.

Pour les proches de Saïd Bourarach, pas question de laisser passer cette disparition comme un banal fait divers. Dans la foule, une femme blonde discute avec sa voisine. Elle répète : « On est français seulement quand ça les arrange ! » Du mégaphone tenu par un jeune homme retentissent les images sombres d’une histoire de France occultée, « cette affaire me rappelle bizarrement un certain 17 octobre 1961. Mais le temps où l’on jetait des bougnoules dans la Seine est révolu. Nous n’accepterons plus jamais ça ! », s’insurge-t-il.

Des anonymes et des associations, à l’instar de l’UAM 93 (Union des associations musulmanes de Seine-Saint-Denis) sont venus apporter leur soutien à la famille de la victime. Son président, M’hammed Henniche, s’étonne de l’avancée du dossier. Notamment la remise en liberté de deux suspects.

 SON 1
Dans le cortège, pas de représentants politiques, sinon quelques élus locaux. Kamel Hamza, conseiller municipal à La Courneuve, et accessoirement assistant parlementaire d’Éric Raoult. Ou encore une adjointe de la Mairie de Trappes.

 SON 2

Autre soutien politique, la sénatrice verte Halima Boumediene. Pour elle, l’affaire de Saïd en rappelle étrangement une autre. Elle pointe du doigt l’inégalité du traitement médiatico-politique de cette affaire, qu’elle n’hésite pas à comparer à l’affaire d’Ilan Halimi.

 SON 3

Refus de l’employeur de Saïd de reconnaître sa mort comme accident de travail. Encore sous le choc de la mort de son époux, Nathalie Bourarach se bat aujourd’hui pour faire reconnaître le décès de son mari comme un accident de travail, ce qui lui donnerait droit à une forme de pension. Selon elle, l’entreprise Batkor refuse catégoriquement d’entrevoir cette éventualité, arguant que les faits se sont déroulés à l’extérieur du magasin. La même entreprise, au lendemain de la mort de son mari, lui aurait « proposé de l’argent sous la table » pour qu’elle abandonne sa volonté de faire valoir ce décès comme accident de travail.

Abdelkader Bourarach, le frère du défunt, se dit persuadé que la vérité éclatera. « J’ai confiance en la justice française », confie-t-il. « Le corps de mon frère est encore en France. Il n’a pas encore été enterré au Maroc. L’autopsie a révélé la mort par noyade. Ce n’est pas possible, Saïd savait parfaitement nager. Nous avions l’habitude de nous baigner dans l’Oued au pays », répète-t-il, dépité. Une contre-expertise médicale a été demandée par la famille Bourarach.

À la fin de la manifestation, une minute de silence est observée en la mémoire de Saïd. À Bobigny, où Saïd a trouvé la mort, la maire Catherine Peyge a refusé qu’une minute de silence soit observée au sein de l’administration communale au lendemain du drame.

Hanane Kaddour

source Bondy Blog


retrouvez le texte de l’appel sur le site "La feuille de Chou"

Vérité et justice pour Saïd Bourarach !

Vérité et justice pour Saïd Bourarach !
La feuille de chou relaie ce communiqué de presse et les dossiers qui suivent, dont une vidéo de Sammy Gozlan, qui appellent à une manifestation à Paris suite à la mort de Saïd Bourarach dans des circonstances encore obscures.

Nous n’avons pas la preuve de ce qui est avancé dans ce communiqué, concernant les agresseurs, leur origine et motivations, mais sommes troublés, comme d’autres, par la discrétion des pouvoirs publics qui, lorsqu’un Français juif est victime, nous ont habitués à des réactions tonitruantes.

L’islamophobie galopante dans notre pays, alimentée très largement d’en haut par le pseudo débat sur « l’identité nationale » et les petites phrases racistes répétitives de plusieurs personnalités haut placées est traitée, pour des raisons qui ne sont que trop évidentes, avec moins d’attention que l’antisémitisme réel ou imaginaire.

La loi est, théoriquement, la même pour tous et toutes en France. La plus grande vigilance est de mise, de manière à ce que cette affaire ne donne lieu à aucune dérive communautariste, d’aucun côté, qui ferait le jeu du gouvernement. Pour les éviter, il serait souhaitable, et urgent, que les associations attachées aux libertés, s’engagent pour la vérité et la justice.

On ne peut se contenter de condoléances, comme celles du MRAP, par exemple.

http://www.mrap.fr/communiques/document.2010-04-02.1071592374

Tribune libre

« Vérité et justice pour Said !

Said Bourarach a été tué mardi 30 mars 2010. Il a été agressé par 6 individus armés et passé à tabac. Son corps sans vie a été repêché dans le canal de l’Ourcq mercredi 31 mars. Saïd était un jeune père de famille de 33 ans, originaire du Maroc. Travailleur honnête, il était vigile au magasin Batkor de Bobigny.

Nous souhaitons avant tout exprimer notre soutien indéfectible à la famille et aux proches de Saïd Bourarach. Nous partageons leur deuil et leur tristesse. Nous serons jusqu’au bout à leurs côtés pour exiger respect, vérité et justice pour Saïd.

Nous déplorons le manque de réaction des responsables politiques, qui sont trop nombreux à garder un silence gêné sur cette affaire terrible. La plupart des médias ont honteusement relayé les propos des agresseurs, qui se disent de confession juive, et dont un au moins est détenteur d’un passeport israélien, retrouvé sur les lieux du crime. Les agresseurs pensent pouvoir justifier l’injustifiable en affirmant que Saïd aurait proféré des propos antisémites. Relayer ce mensonge est une insulte à la mémoire de la victime.

Ce meurtre vient hélas s’ajouter à la trop longue liste des crimes commis contre des immigrés, des citoyens français d’origine arabe ou africaine, habitants des quartiers populaires. La motivation souvent raciste de ces crimes est systématiquement occultée.

Le procureur a ouvert une information judiciaire contre 4 personnes pour « violence volontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner ». Les témoignages concordent concernant le caractère raciste de ce crime. Nous demandons à ce que toute la lumière soit faite, sur les circonstances exactes de la mort de Said, et que justice soit rendue. L’impunité, dont ont trop souvent bénéficié les sympathisants de groupuscules de l’extrême-droite sioniste, et notamment la Ligue de Défense Juive (LDJ), constituerait une incitation au passage à l’acte.

Nous appelons sur cette base à un rassemblement large de toutes les organisations et personnes solidaires, contre toutes les formes de discrimination et de racisme. Pour que les consciences s’apaisent, et que le deuil puisse se faire, vérité et justice pour Saïd Bourarach !

Manifestation samedi 10 avril 2010 – 15h, métro République, Paris.

Collectif Manifestons Ensemble pour Said – Vérité et Justice. »


on lira aussi le long article, signalé par "La feuille de Chou", paru sur le site Oumma
 Le dernier souffle de Saïd Bourarach

extrait

(...) Quatre hommes, âgés de 19 à 25 ans et déjà connus des services de police pour des faits de violences et usages de stupéfiants, ont été déférés au Parquet, mis en examen et incarcérés en détention provisoire. Une enquête est désormais ouverte pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, avec usage ou menace d’une arme ». Un homicide involontaire, pour lequel le motif « raciste ou religieux » n’a pas été retenu par Sylvie Moisson, Procureur de la République de Bobigny. Un rétropédalage pour la police qui avait laissé entendre au premier jour que la victime avait été « vraisemblablement jeté à l’eau ».

Si l’aspect religieux a d’ores et déjà été évacué par la justice, il est pourtant présent à l’esprit de tous les protagonistes, en premier lieu desquels les suspects. Ce sont eux qui ont communautarisé le drame en se présentant comme des personnes dont la confession juive aurait été stigmatisée par le vigile. Cette grave accusation, qui discrédite au passage la victime et que personne ne corrobore parmi les témoins de l’agression, sera pourtant reprise comme envisageable par SOS Racisme et le Grand rabbin de France, Gilles Bernheim, qui condamnent évidemment l’acte tout en fustigeant le prétexte invoqué par les suspects - des injures antisémites- comme si ceux-ci étaient avérés. Une fois pourtant n’est pas coutume, l’association antiraciste prendra également le soin de soupçonner tout haut la stratégie de la défense d’être une tentative de « manipulation de la thématique du racisme pour couvrir des actes de voyous ». Un chantage à l’antisémitisme en somme, mezzo voce.

RTL et I Télé ont évoqué ouvertement l’appartenance au judaïsme des personnes mises en détention. Mais la plupart des médias ont fait silence sur cet élément mis en avant par les agresseurs eux-mêmes. Un élément tabou dans l’affaire ? Une peur de susciter un regain d’antisémitisme ? Etrange précaution quand on connaît la promptitude des mêmes journalistes à se précipiter sur le moindre fait divers dans lequel des jeunes issus de l’immigration maghrébine et africaine, redoutables « sauvageons/trafiquants/islamistes », font aisément la une, en toute impunité pour les rédacteurs en chef adeptes du sensationnalisme.

L’affaire emblématique de Marie-Léonie Leblanc, la mythomane du RER D qui avait accusé en 2004 des Arabes et des Noirs de l’avoir violenté, a durablement terni la crédibilité journalistique et explique, en partie, le rejet massif des médias grand public en banlieue.

Nulle surprise, dès lors, à voir la mobilisation pour éclaircir l’affaire se dérouler hors des champs d’action traditionnels. C’est sur Internet, au travers des réseaux sociaux et des sites de partage vidéo, que des citoyens révoltés par un flagrant deux poids deux mesures, se manifestent. Le silence assourdissant du gouvernement, du Conseil français du culte musulman, de l’ambassade du Maroc et l’édulcoration médiatique ont fait le reste : accentuer la prise de conscience et amplifier la colère de ceux qui considèrent que le crime de Saïd Bourarach vaut peccadille aux yeux de l’intelligentsia.

(...)

un précédent appel, pour le 5 mars

Saïd Bourarach "noyé" dans l’Ourcq : Rassemblement lundi 5 mars, à 14 H, Place de la République à Paris

Messages

  • "J’ai confiance en la justice française" : eh bien pas moi. Cette justice ne qualifie pas le crime de raciste quand la victime est d’origine maghrébine : c’est la règle. Voir entre tant d’autres le crime d’Oullins dans le Rhône il y a deux ans. Le coupable avait pourtant insulté publiquement la victime dans des termes racistes et détenait à son domicile des insignes, médailles et autres babioles du 3éme Reich.

    • l’enquête d’Oulins a été bâclée, malgré la mobilisation

      relire Vérité et Justice pour Chaïb Zehaf

      Si l’assassin a bien été condamné, la dimension raciste de son acte a été abandonnée... par le procureur, malgré l’enquête qui l’avait prouvée

      Un meurtre raciste d’un maghrébin n’est jamais... qu’un fait "divers"

      Il ne s’agit bien évidemment pas de réclamer des peines plus lourdes (elles le sont bien assez ! dans ce cas, mais de "reconnaitre" le racisme pour ce qu’il est : inacceptable)

      A nouveau, toute dimension raciste est niée par le pouvoir judiciaire et policier

      Brice Hortefeux qui s’est déplacé à de nombreuses reprises sur chaque assassinat, n’en dit pas un mot.

      On ne peut pas mener impunément un "débat" sur "l’identité nationale" et condamner ses conséquences : CQFD

  • "confiance dans la justice française" ?

    Vaut mieux pas hein...

    Eté 1973, Marseille : des dizaines de personnes d"origine maghrébine (ou supposée telle par leurs agresseurs), musulmans ou pas, sont blessées voire tuées, et un attentat particulièrement violent frappe le consulat d’Algérie, faisant plusieurs morts."Mort aux arabes" entache de nombreux murs de la cité phocéenne.

    Les habitants de cette ville se souviennent de cet été de ratonnades -et le terme n’est pas trop fort. Il n’est pas exagéré de dire que lors de cet été tragique à Marseille, plusieurs dizaines de personnes d’origine maghrébine trouvèrent la mort dans des conditions insupportables.

    C’est un ami et camarade de Marseille qui m’avait parlé très récemment de cette histoire qu’on n’enseigne pas ( sans doute parce que aux yeux de certains là encore c’est "un détail" ?), je ne la connaissais pas il y a encore quelques jours, et il se trouve que suite à cette discussion, Canal+ a sorti ce qui est à ma connaissance le premier documentaire sur le sujet dans son émission "Lundi investigation" je crois, la semaine dernière. C’est un documentaire édifiant. Et je pèse mes mots.

    Après cela, y eut-il des poursuites judiciaires ?

    Des enquêtes sérieuses, abouties, pour tenter de trouver les responsables de ces actes affreux ?

    Des condamnations ?

    Non. Ou plutôt si. Pour les faits de Marseille, lors d’un des très rares procès, la vie d’un arabe était estimée à 5ans d’emprisonnement avec sursis.

    Sinon, rien. Ni au niveau des individus, ni au niveau de l’État.

    Pas même de manière symbolique.

    http://bellaciao.org/fr/spip.php?article94935

    Mais j’imagine que c’est une phrase de pure forme. Je comprends.

    En tout cas toutes mes condoléances, encore une fois, à la famille de Saïd Bourarach....

  • merci Bellaciao et a Patrice Bardet d’en parler cette affaire est étouffée , il serait préférable que la justice et le traitement médiatique soit pareil pour tous .

    je pense que le politique et le médiatique dominant veulent que ca explose dans les banlieues française pour faire oublier leur politique du désastre ,

    si y a des personnes de quartiers populaire qui lise mon commentaire ,je leur demande de garder leur calme et le calme des jeunes , le politique n’attends que ca pour nous faire porter la chute de leur gestion économique.