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La bio hors-la-loi ! Quelle loi ? Résistance !

Publie le mercredi 9 juin 2010 par Open-Publishing
16 commentaires

- Des agriculteurs bio accusés de préconiser un "pesticide interdit"... (l’huile de neem, ou margousier, utilisée depuis des siècles par les indiens comme antiparasitaire).

- Une association traînée en justice et poursuivie par l’Etat pour la "vente illégale" de simples graines de tomates et autres fruits et légumes... (les semences de variétés anciennes conservées, répertoriées et distribuées par Kokopelli).

- Un horticulteur perquisitionné et le contenu de son ordinateur saisi par la Répression des Fraudes parce qu’il fait la promotion du purin d’ortie pour soigner son jardin... (Eric Pétiot, co-auteur du livre "Purin d’ortie et compagnie", préparation plébiscitée par les jardiniers depuis des générations).

Ca se passe aujourd’hui, en France !

Alors, paysans ou gangsters ?!

Qui fait la loi ?

La loi est l’expression du pouvoir en place. Même s’il est auréolé d’une légitimité plus ou moins démocratique (c’est un autre débat), ce pouvoir a pour vocation essentielle le maintien du système économique actuel, coûte que coûte ! Et les petits ajustements de gauche ou de droite ne changent rien aux vraies règles du jeu : tout doit devenir marchand !

Mais il faut respecter la loi !?

La loi est bonne aux yeux de ceux qui la font. Elle ne l’est jamais dans l’absolu. Il fut un temps, en France, où la loi obligeait certains d’entre nous à porter une étoile jaune. Où elle refusait le droit de vote aux femmes et "accordait" celui de travailler aux enfants...

Aujourd’hui, elle autorise la culture de certains OGM alors que 70 à 80% des français y sont opposés. Elle interdit la diffusion des semences anciennes et plus des trois quarts des variétés de tomates autorisées à la vente sont des "hybrides F1" stériles dont il faut racheter les graines tous les ans, et 98% sont sous brevet ! Vous êtes d’accord ?

Pourtant il y a de la bio dans les hypermarchés !?

Le capitalisme néolibéral possède en effet une étonnante capacité à tout récupérer... Deux approches existent aujourd’hui :

> Une bio "récupérée" qui fondamentalement ne remet pas en cause le système. Elle s’appuye sur l’Union européenne où les lobbys sont puissants, véritable machine de guerre néolibérale contre les peuples. Ainsi, depuis le 1er janvier 2009, la norme bio européenne s’impose aux Etats membres qui ont l’interdiction de définir des normes publiques plus restrictives.

Depuis cette date, le label "AB" français ne signifie plus vraiment la même chose. De plus, il devra progressivement s’effacer au profit du label européen... D’où l’importance des autres labels privés ou coopératifs (Demeter, Nature & Progrès) et l’émergence en France d’un nouveau label (privé) "Bio Cohérence".

> Une bio "militante" qui se nourrit d’une réflexion profonde sur l’agriculture et le métier de paysan, sur la fertilité des sols, l’autosuffisance alimentaire et au-delà sur les conditions économiques et sociales de la production de notre alimentation.

Cette démarche est perçue comme dangereuse par le pouvoir en place car, inévitablement, elle aboutit à une remise en cause des règles du jeu économique, à une approche différente des relations entre les hommes et la nature, et entre les hommes eux-mêmes.

La loi est l’un des outils dont dispose le pouvoir en place pour réagir, en criminalisant cette bio militante pour justifier la répression, et en harcelant les paysans qui s’engagent dans cette voie.

Vive la résistance !

Des paysans, des scientifiques et différentes organisations se mobilisent, en prenant le risque de s’opposer à la loi, qu’elle soit française ou européenne. Ils le payent au prix fort (convocations à la gendarmerie, procès, amendes, suicides...). En première ligne de la lutte contre un système néolibéral devenu fou, leur courage est exemplaire.

Ils font partie des nouveaux résistants.

Comment les soutenir ? Comment agir ?

Le système en place essaye de nous faire croire qu’il n’y a pas d’alternative. Or si, il y en a. Un peu partout en France, dans nos campagnes et sur Internet, la résistance s’organise pour construire un autre monde. Et vous pouvez y prendre part :

> D’abord en vous informant. Lisez les médias alternatifs, les blogs et autres sites qui relaient ces luttes. Parlez-en autour de vous. Allez voir les documentaires qui présentent ces alternatives : "Solutions locales pour un désordre global" de Coline Serreau, mais aussi "Sans terres et sans reproches" de Stéphanie Musard le Moing et Eric Boutarin, qui illustre les problèmes d’accès à la terre, les combats mais aussi l’enthousiasme des paysans du Lot.

> En choisissant leurs produits. Dans la mesure du possible, évitez les circuits de la grande distribution. Adhérez à une AMAP pour les produits frais. Pour les autres produits, participez aux commandes groupées de circuits alternatifs tels que ceux que nous développons avec la Coopérative Atanka. Non seulement vous soutiendrez les paysans qui réinventent l’agriculture de demain, mais en plus vous allez vous régaler !

> En interpellant vos élus. Ce sont eux qui ont voté ces lois qui criminalisent les paysans, et eux seuls qui aujourd’hui peuvent les défaire. Interpellez-les à chaque occasion sur les sujets qui vous tiennent à cœur : OGM, subventions, accès à la terre...

> Participez aux pétitions et actions de soutien. Privilégiez les pétitions et actions concrètes s’articulant avec une lutte précise. Nous avons ainsi lancé une pétition de soutien aux agriculteurs en lutte contre l’obligation de vaccination FCO. Les premiers procès commencent à se tenir, et grâce à la mobilisation des consommateurs engagés aucune condamnation n’a pour l’instant été prononcée ! C’est une victoire !

Ensemble, nous en remporterons d’autres !

Philippe Lelong
Coopérative Atanka

Pour en savoir plus :
http://www.atanka.com
http://www.aspro-pnpp.org
http://www.kokopelli.asso.fr
http://www.petioteric.fr
http://www.atanka.com/actions/fco.aspx

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Messages

  • excellent article , oui
    soutenons les , utilisons leurs produits ainsi que toutes ces "recettes" héritées des anciens et qui fonctionnent à merveille.
    j’utilise et continuerai d’utiliser le purin d’ortie par exemple.

    Makhno

  • Bravo pour cet excellent article qui résume fort bien les pressions et le harcèlement que subissent ceux qui refusent le modèle dominant à l’instar del’association KOKOPELLI .

    Vous avez toute ma sympathie et mon total soutien.

    C’est vous qui avez raison.

    Ce combat là, ensemble, nous allons le gagner.

    Très cordialement.

    ChJ

  • Mais, eux, les agriculteurs ... On ne les entend pas beaucoup défendre ce pour quoi on est censé pétitionner !

    On introduit des OGM en plein air dans les vignes .... pas entendu un vigneron s’offusquer ....

    Je vais acheter du vin algérien, ça ira avec mes graines qui poussent dans les montagnes marocaines !

    • Super article, merci,
      T’inquiète, les paysans sont là pour se défendre même si ils ont beaucoup à faire au niveau local près de chez eux, très impliqués en politique, en associatif... Pas trop le temps de faire le pied de grue devant les télé à la ville mais il existe des assos et syndicats nationaaux de paysans (Confédération Paysanne, FNAB, FNCIVAM, Nature et Progrès) qui se battent...contre tous les cadres et la marchandisation des bonnes idées ! Allez les consommateurs, on fait gaffe à ce qu’on bouffe du bio, local et éthique !

    • On n’entend pas beaucoup les agriculteurs, en effet. Ils sont pris à la gorge par des contrats et des endettements qui les empêchent de regarder au delà de leur subsistance immédiate, ils sont piqués dans le dos par les contrôles sanitaires qui turbinent pour les lobbies des multinationales. Je ne sais même pas quelle proportion d’entre eux est capable de regarder le trou noir vers lequel ils foncent, merci l’Europe.

      Tant qu’on y est, attention aux graines exotiques : elles amènent avec elles leur lot de parasites propres (sans leurs prédateurs le plus souvent) qui peuvent aussi faire beaucoup de dégâts dans la biodiversité. L’importation et surtout la dissémination d’espèces non locales est aussi réglementée, et ce n’est pas pour rien.

      En ce qui concerne l’article lui-même, entièrement d’accord. Qu’il s’agisse du niveau d’action sur la légalité, de la préservation de variétés anciennes de fruits et légumes, de la préservation des anciennes techniques et façons de faire, ou autre, l’important c’est de résister à l’agression des marchants de mort.

  • Nous demandons aux "décideurs" de cesser de penser pour nous et de choisir à notre place la relation à la terre qu’il nous faut avoir !Le procès qui est nécessaire aujourd’hui est celui du bon sens face à l’aliénation mentale qui se croit en devoir de diriger le monde !Seukes les lois naturelles sont à respecter !

    • Et avec 1200 euros par mois on peut bouffer du bio ? A quand des coopératives paysanes à but non lucratif pour concurrencer les Grandes surfaces. La dignité passera par là. Alain 04

    • Sur cette question, nous ferons bientôt un autre article. Le problème n’est pas du côté des bios, mais essentiellement politique : quand on tient compte de tous les éléments, le bio coûte moins cher à produire, mais par contre il est beaucoup moins subventionné (subventions directes type PAC, indirectes via la recherche)...

      Sinon la réponse est oui, mais on argumentera aussi. Cela passe par le choix des produits et du mode d’alimentation, le fait de cuisiner plus et de diversifier ses sources de protéines (pas que dans la viande qui coûte très cher), etc...

      Coopérative Atanka

    • Comme l’a dit Cooperative Atanka, le bio est moins subventionné. Mais en plus, il faut payer pour obtenir un label confirmant la qualité. C’est un autre paradoxe du système de devoir payer pour prouver la qualité, alors qu’il n’y a pas de supplément à payer pour cultiver sans qualité, avec du nécro-pharmaceutique.

      C’est encore un des points du système qu’il faudra changer ...

    • C’est quoi "les lois naturelles" ?

      L’humanité depuis des centaines de milliers d’années ne cesse de se battre contre beaucoup de phénomènes "naturels" et si elle ne l’avait pas fait, on ne serait sûrement pas là pour en parler sur un ordinateur "naturel" avec des liaisons internet "naturelles"......

      Quid de la contraception, des progrès en médecine et en chirurgie, du développement technique et technologique, de l’explosion des moyens de communiquer et de se déplacer.......dans le cadre de ces "lois naturelles".

      Ce n’est pas les "lois naturelles" (celle de dieu ?) qu’il faut défendre , c’est la loi du profit qu’il faut combattre pour que l’humanité maitrise la nature, la transforme et l’utilise dans l’intérêt de tous et pas au service d’une minorité d’exploiteurs qui se foutent autant de l’environnement que de l’avenir de l’humanité .

    • Très bien dit Charles, rien à ajouter !

      Le progrès n’est pas à combattre, la technologie non plus. C’est la loi du profit, la première loi du Capitalisme, qu’il faut combattre.

      (k)G.B.

    • Bien d’accord !

      Contrairement à une idée reçue (et hélas très répandue chez mes camarades), la bio est bien un progrès, et non pas un hypothétique et impossible retour en arrière. Depuis qu’il a commencé l’agriculture l’Homme s’est beaucoup fourvoyé, et il le fait en ce moment avec beaucoup de moyens (donc de dégâts).

      L’agriculture bio ne consiste pas à "revenir en arrière" mais au contraire à aller de l’avant, en s’appuyant sur une connaissance approfondie de la microbiologie des sols et des processus naturels, pour mieux les favoriser et les faire prospérer (au lieu de mener une guerre contre le vivant, ce que fait l’agro-business).

      Il y a trois générations de bio, sur le plan opérationnel on est plutôt entre la première et la deuxième, la troisième est très prometteuse et s’appuie notamment sur les travaux d’un japonais, Masanobu Fukuoka... : pas de labour, semis sous couvert (jamais de terre à nue), etc...

      Philippe Lelong - Coopérative Atanka

  • Bonjour
    Je ne pense pas que se soit le BIO qui soit visé (ou uniquement visé) c’est tout ce qui est ou pourrait être gratuit ; car la gratuité comme son nom l’indique ne donne pas l’occasion aux "requins" "multinationales" de se nourrir à bon compte.
    Il faut pour gouverner avoir la mainmise sur la vie (la nourriture) et bientôt nous n’aurons plus aucun moyen de nous défendre puisqu’elles seront entre leurs mains "multinationales"
    Les semences, les OGM (hybrides), les pesticides (MONSANTO, ...) jusqu’aux terres des paysans des pays sous développés (avec la complicité de gouvernements corrompus) qui aujourd’hui sont achetées en grande quantité par des pays voisins ou non...
    Le BIO n’est pas attaqué, parce c’est BIO, la preuve en est c’est que la grande distribution en fait aujourd’hui son "beurre" mais c’est ce qu’il représente qu’il faut casser "paysans de proximité" "rebelle"..." "re-localisation" "..." tout ce qui peut représenter un danger et dont le principal serait : que les citoyens en prennent conscience !
    Alain

  • très bon article, mais oui certains hommes et femmes de la terre passent leur vie sur une belle ligne aux abîmes latérales bien noires entre le légal et l’illégal et jonglent en plus sur celle-ci tout en ne regardant droit devant l’avenir qu’ils pourront laisser à leurs enfants en leur offrant au jour le jour toute cette vie et se bien être que peu leur offrir la "Terre".Pour qu’il puissent encore rester humain dans cet avenir si improbable ! La liberté et l’autonomie de vie personnelle est un sacrifice de tout les jours, partager, s’aider, se défendre les uns les autres c’est préserver des espaces de vies et nos identités.
    PDG