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Transports gratuits : une Grande Cause nationale

Publie le samedi 20 novembre 2004 par Open-Publishing

de Yves Barraud

Jeudi 18 novembre, quelques dizaines de militants d’AC ! Agir ensemble contre le chômage, de l’APÉIS et du RATP (Réseau pour l’Abolition des Transports Payants) ont manifesté à quelques centaines de mètres du Conseil régional d’Île-de-France pour réclamer, une fois de plus, la gratuité des transports pour les chômeurs, précaires et personnes en grande difficulté financière.
Cette gratuité légitimement revendiquée est une des promesses de campagne (la 25e) du candidat Jean-Paul Huchon, élu à la tête de la région IDF.

Ces quelques courageux ont bravé le temps frisquet pour tenter d’obtenir des avancées concrètes sur un sujet qui concerne des centaines de milliers de Franciliens et des millions de Français.

Sur place était distribué un tract émanant du Groupe communiste, alternative citoyenne, républicain (CACR) du Conseil régional d’Île-de-France. On y apprend que la hausse des transports a atteint 20% sur ces quatre dernières années ! Le tract rappelle aussi que, le 22 juin dernier, le Conseil régional a voté un vœu en faveur de la gratuité des transports pour les bénéficiaires de la CMU, du RMI, de l’ASS, de l’AAH (Allocations adultes handicapés), de l’API (Allocation parent isolé), pour les personnes âgées à faibles niveaux de ressources, les jeunes en insertion et les autres personnes en grande difficulté financière.

Mais le Groupe CACR (qui fait partie de la majorité régionale) va plus loin. Il milite en faveur d’une Carte orange à prix unique : 46 euros (23 euros à la charge des salariés, le complément étant financé par les employeurs).

Actuellement, une Carte orange mensuelle zones 1 et 2 (la moins chère) est vendue 50,4 euros par la RATP. La plus onéreuse, zones 1 à 8 : 136,9 euros. Pour un bénéficiaire du RMI ou de l’ASS résidant en grande banlieue parisienne, l’achat d’un coupon zones 1 à 8 correspond à 33% de son allocation mensuelle (ce calcul ne prend pas en compte les aides au déplacement dispensées par le STIF, le Syndicat des Transports d’Île-de-France). Et on peut extrapoler ce dilemme insurmontable à toutes les régions de France, à quelques nuances prêt.

Voilà quelques données qui placent bien le coût des transports au cœur du débat sur la Cohésion sociale si « chère » à nos dirigeants. Il faut même parler ici de Justice sociale.

Car la gratuité et le tarif unique solutionnent bien des problèmes :

• Sortir les « démunis » de leur isolement en leur permettant d’honorer d’éventuels entretiens d’embauche, mais également de resserrer les liens sociaux avec leurs proches (famille, amis...), les administrations, les associations d’entraide...

• Réduire les inégalités.
Les Français les plus riches (mais aussi nombre de cadres supérieurs, moyens...) se déplacent en véhicules de fonction dont ils ne paient ni l’achat, ni l’entretien, ni le carburant. D’autres voient tout ou partie de leurs frais de déplacement (en taxi ou avec leur véhicule personnel) pris en charge par leur employeur. Pour leur part, les personnes démunies n’ont plus les moyens de vivre en centre ville ou en proches banlieues. Elles sont contraintes de s’exiler, d’où un accroissement proportionnel de leur facture transports.

• Rendre obsolètes toutes les mesures prises pour sanctionner la fraude (contrôleurs, agents de sécurité, caméras de surveillance, tourniquets « infranchissables »...) qui engendrent des dizaines de millions d’euros de dépenses pour les entreprises de transport en commun (sans grande efficacité au final, car on ne pourra jamais assigner à résidence une personne démunie qui a absolument besoin de se déplacer).

• Mettre un terme définitif aux condamnations de chômeurs, précaires et démunis à des peines de prison ferme. L’un d’eux, François Thonier, a récemment écopé de 2 mois de prison ferme pour un délit de « fraude habituelle » institué par la Loi de Sécurité Quotidienne (LSQ). Un vrai scandale ! Une procédure d’autant plus injustifiée (pour ne pas dire stupide) que des dizaines de personnes « insolvables » sont poursuivies chaque mois en France, ce qui a pour fâcheux effet d’engorger un peu plus les tribunaux.

• Réduire les altercations entre les usagers des transports et les services de contrôle et de sécurité. Limiter ainsi les violences verbales, voire physiques...

• Soulager la dépendance énergétique de la France et la facture induite...

• Limiter la pollution atmosphérique, l’émission de gaz à « effet de serre », l’accroissement des maladies respiratoires et cardiaques, et tous les problèmes de santé liés à la dégradation de l’air (notamment chez les enfants et les personnes âgées)...

• Réduire les nuisances sonores (un aspect, certes, relativement anecdotique mais...).

.../...

Et cette liste de « bienfaits » sociaux et écolo n’est pas exhaustive.

Oui, la gratuité des transports pour les personnes démunies et la réduction de leur coût pour l’ensemble des Français sont bien une Grande Cause nationale. Elles seront bénéfiques à tout le monde et contribueront à rendre notre société plus humaine, plus juste, plus solidaire...

Yves Barraud

www.actuchomage.org