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Parc national des calanques : Marseille au bord de la crise de nerfs

Publie le dimanche 6 mars 2011 par Open-Publishing
13 commentaires

Annoncée pour janvier 2012, la création du parc national des calanques soulève un vent de fronde. De Marseille à La Ciotat en passant par l’arrière pays, la colère monte. Elle a culminé avec le blocage du port de Marseille par les pêcheurs et les bateaux de plaisance, le 11 février dernier. Le lendemain, « la terre » a rencontré la mer sur les quais.

Pourtant, c’est « Marseille qui a poussé à sa création » s’étonne Thierry Lefèbvre, chargé du programme des aires protégées au comité français de l’UICN. Une volonté de quelques élus, peut-être, des associations de protection de la nature, sûrement. Pas de la population. Thierry Lefèbvre ne comprend pas davantage le rejet du parc national des calanques, un projet « emblématique », conçu dans une agglomération de plus d’un million d’habitants. Le 3ème parc urbain dans le monde, après ceux de Sydney (Australie) et de Cape Town (Afrique du Sud). D’ailleurs, l’UICN recommande leur multiplication pour « limiter la consommation des territoires par les villes et offrir des loisirs aux citadins » poursuit-il.

C’est d’autant moins compréhensible que toutes les communes situées dans le coeur du parc sont UMP. Les opposants également. A la veille des cantonales, le projet a réussi à fracturer le parti au pouvoir en deux camps irréductibles. Imposé par décret, le cœur du parc s’étend sur les trois communes littorales de Marseille, Cassis, La Ciotat, et deux communes de l’intérieur, Ceyreste et Roquefort-la-Bédoule. Il s’étend sur 12 000 ha, bien au-delà du site protégé des calanques classé Natura 2000 (5 000 ha). S’y ajoute une aire marine protégée (AMP) de 48 000 ha, portée à 20 kilomètres de la côte.

Toutes les activités y seront interdites, sauf autorisation du directeur du parc : régates, plongées, escalade, pêche côtière, plaisance familiale, les cabanons seront rendus inaccessibles aux personnes âgées par l’interdiction de stationner à proximité… Au point que les maires commencent à vouloir restreindre le cœur du parc aux zones inhabitées. Soulignant l’absurdité des « décisions prises à Paris », les opposants au parc évoquent le retrait, in extremis, de la rade Sud du port. Incluse dans le cœur du parc, elle aurait obligé les ferrys et porte-conteneurs à faire un immense détour, ce qui les auraient dangereusement exposés au vent lorsque souffle le Mistral. De même, l’interdiction de survoler la rade à moins de 1000 m d’altitude aurait empêché les avions d’atterrir à Marignane.

Population ignorée

Sans a priori hostile, les associations se sont d’emblée impliquées dans le groupement d’intérêt public (GIP) des calanques présidé par le député UMP Guy Teissier (Marseille). Leurs propositions n’ont pas été entendues. Elles se sont senties flouées en découvrant l’étendue de l’aire protégée, en comprenant qu’elles n’auront plus voix au chapitre dans un parc dirigé par l’État, en voyant leur territoire, entretenu jusqu’alors bénévolement, gelé par les interdictions.

Des centaines d’associations se sont regroupées en trois collectifs d’opposants, avec, pour têtes de file, Béatrice de Crozet, Claude Leloustre, François Semeriva (1). Ensemble, les collectifs ont commencé par écouter, se renseigner, interpeller les politiques, jusqu’au président de la République dans une lettre ouverte. Le blocage persistant, ils sont passés à l’action et élargissent maintenant le combat.

Le 2 février, les collectifs ont reçu le renfort de Mourad Kahoul, président du comité local des pêches et des élevages marins. « On veut nous imposer toute une réglementation nouvelle et extrêmement restrictive afin de préserver l’environnement marin. Et dans le même temps, une agglomération d’un million d’habitants déverse ses égouts dans la calanque de Cortiou, une multinationale industrielle rejette ses boues rouges dans la fosse de Cassidaigne et dès qu’il y a un gros orage, l’Huveaune rend la baignade impropre sur les plages du Prado » s’est indigné Mourad Kahoul (2), appelant les plaisanciers à rejoindre les pêcheurs pour bloquer le port le 11 février, la veille de la réunion du conseil d’administration du GIP.
Au même moment, la ministre de l’Écologie, Nathalie Kosciusko-Morizet recevait les partisans du parc. Les deux manifestations ont été un succès, les élus commencent à s’inquiéter. Rien n’est encore joué. D’ores et déjà, la bataille des opposants au parc national des calanques s’étend en France, à Fontainebleau et en Franche-Comté, où il est prévu d’instaurer de nouveaux parcs nationaux.

Françoise DEGERT

NOTES :

1-Le comité écologique de sauvegarde de La Ciotat, présidée par Béatrice de Crozet

« Les amis de la rade et des calanques » co-animé par Claude Leloustre (regroupe les plaisanciers), « Le collectif des calanques marseillaises libres » , présidé par François Semeriva (regroupe les vignerons, des habitants de Roquefort-la-Bédoule et des comités d’intérêt de quartier de Marseille, des cabanoniers, le club des entrepreneurs, des artisans…). Ces trois collectifs agissent ensemble, signent tous les trois les lettres envoyées au préfet, aux membres du gouvernement…

Pour communiquer et lever des fonds, qui ont permis de financer une page de publicité dans la presse régionale (7 500 €), les trois collectifs ont créé « L’association des amis de la rade et des calanques » présidée par Jo Russo.

2- La Provence – ed. Marseille, Jeudi 3 février 2011, P. 5. « Parc des calanques : les pêcheurs à l’abordage ».

Messages

  • TOUCHE PAS A MA CALANQUE ! allez les Marseillaises Marseillais soyez fiers de résister contre l’absurdité ! faites circuler une pétition.

  • Il y a beaucoup de petits intérêts personnels Marseille : malgré les décisions, on ne peut toujours pas se promener librement au Vieux port ou à l’Estaque pour qu’une poignée de nantis puisse continuer à déguster tranquillement leur pastis avec les copains à côté de leur bateau et c’est pareil pour les Calanques : au lieu de les protéger (comme par exemple dans les parcs bretons), on veut permettre à une poignée de plaisanciers et d’heureux possesseurs d’un cabanon (souvent acheté à prix d’or au mépris de la loi sur accessibilité du domaine public) de continuer à profiter tranquillement. Il faut protéger les calanques et rendre le domaine public à tous.

    • Sans compter les promoteurs immobiliers qui espèrent toujours réussir à rendre constructible un terrain ou un autre..

    • PARC NATIONAL = CREATIONS D’EMPLOIS MAIS POUR DES PISTONES PARISIENS. J’AI VU EN CORSE DE MON PETIT BATEAU DES GARDES DU PARC RAMASSER DES LANGOUSTES OURSINS ET VIOLETS SUR DES SITES DITS PROTEGES. JE CONNAIS TRES BIEN PORT CROS DEPUIS 5OANS LES PLAISANCIERS FONT MOINS DE MAL QUE LES MILITAIRES QUI SQUATTENT L’ILE DU LEVANT ; LES CABANONS DES CALANQUES DE MARSEILLE DOIVENT RESTER LIBRES. NON ET NON AU PARC NATIONAL !...... UNE REBELLE DE LA POINTE ROUGE

    • Bien sûr, il faut protéger les calanques. Les associations se mobilisent pour les nettoyer bénévolement chaque année. Elles ont constamment lutté pour mettre fin à la pollution provoquée par les boues rouges de Gardanne, l’Huveaune, le collecteur de Marseille… alors que l’État ne les a toujours pas entendues. Et jusqu’à présent, les associations ont su préserver leur joyau.

      Aujourd’hui, tout le monde a accès aux calanques en dehors des périodes à risques d’incendies. Qu’en sera-t-il demain avec les contraintes du parc ? Et les opposants au parc sont loin d’être des « nantis » : la plaisance - tout à fait familiale -, et la pêche côtière n’utilisent que des très petites embarcations. J’ai rarement vu des yachts à Marseille et dans les calanques. Par contre, la privatisation du territoire va les attirer…

      FD

  • marseillais ! marseillaises ! merci d’avoir conserver ce paradis sur terre ! battez vous on vous soutient !

    • Bonjour,
      Je suis pêcheur assidu, et pour la protection de la nature, mais ce parc pose énormément d’interdits, aussi bien pour la population locale que pour les touristes !
      les locaux ne pourront plus pêcher la moindre girelle, tout comme les touristes !
      C’est clair, la population locale vie pour la mer, et n’a pas attendu Paris ou des politiques écologiquement intégristes pour gérer son joyau !
      A ce jour, il est évident qu’il faut protéger, et si en premier lieu, la loi existante était appliquée, les abus d’une minorité seraient certainement moins nombreux...
      Donc ce n’est pas grâce au parc que ces points seront résolus...
      Exemple : Guy TESSIER dit que grâce au parc, nous aurons moins d’incendies... Bien sûr, donc si je comprends bien, il suffira de mettre des panneaux"interdit de mettre le feux" pour que des criminels suivent les consignes sur une surface de 12000 hectares... Arrêtons de croire à de telles absurdités...
      L’enjeux n’est que politique... et la place est trés chaude.

      pour ce qui concerne la pêche, ma passion, les 11% de la zone qui sont mis en réserve représentent en fait plus de 90% des zones de pêche de la plaisance...
      Conclusion, tout le monde va se retrouver au Frioul, avec les conflits d’usages que ça impliquera dans une ville avec autant d’habitants... et dans 3 ans, le président du GIP s’arrangera pour prouver avec des scientifiques à la noix qu’il n’y a plus de poisson, et en profitera pour mettre le frioul en réserve, et nous aurons tout perdu. Par contre, la marine national a fait péter 70 obus dans 7 m d’eau au frioul il y a quelques jours, et la moitié des poissons de la rade sud de Marseille se sont retouvé morts en surface de notre belle bleue...
      Alors quand on est capable d’accepter de tel actes, qu’on nous parle pas de réserve, et de protection de la nature !!!!!

      Ce parc est une supercherie. Si on voulais sauvegarder la biodiversité, on pourrait créer des récifs artificiels dans les zones sableuses, ou pleins d’autres choses...
      Mais laissons les îles tranquiles. pareil pour les promenades, tout le monde devra suivre un itinéraire... bidon.
      Puis bientôt, il faudra tout payer : accès à une calanque, permis de pêche, ceuillette des asperges et tant d’autres choses...
      Finalement, on nous expliquera que cet argent permettra la gestion du parc. Ce qu’on nous dit pas, c’est que certains se servirons d’abord, sur le compte de ceux qui on préservé ce patrimoine depuis toujours.
      Ce parc dans l’état est une honte, ce n’est pas effectué selon les principes de la démocratie, mais selon une monarchie manipulatrice.
      Toute l’économie nautique va en prendre un coup. Personnelemnt, pour pêcher quelques poissons par ans, je fais vivre toute l’économie, achat de bateau, entretiens, matériel de pêche et tant d’autres choses... Il n’y a plus qu’a tout vendre... Je souhaite bien du courage à toutes ces petites entreprises.

      Quand au parc, on interdit les gens de circuler ou de pêcher, mais on ferme les yeux sur la pollution issue de la station d’épuration.
      Aller voir les fonds marins au niveau du rejet du collecteur.
      A 17m de fond, des bulles sortent du fond en permanence, et il n’y a même pas une algue, et je sais de quoi je parle, je plonge également et j’ai été curieux de voir...
      Alors prenons le problème à la base, et éliminons les vrais problèmes, au lieu de se faire plaisir avec des parcs pour se donner bonne conscience !!!

  • les parcs nationaux seraient crées pour sauvegarder la nature, l’environnement ?
    alors pourquoi Mr BORLOO, lorsqu’il était Ministre de l’Environnement, a donné des autorisations de recherche de gaz de schiste ?
    pourquoi les tracés des projets de parcs nationaux évitent consciencieusement les décharges et les endroits pollués ?
    est ce que la protection de la nature ne devrait pas commencer par la dépollution ?
    les "policiers de l’environnement" de l’île de Porquerolles ont suivi en juin 2010 3 jours de formation au self-défense avec utilisation de bombes lacrymogène, je croyais que mes impôts devaient servir à protéger la nature...
    continuons le combat contre la création des parcs nationaux qui ne sont qu’une excuse pour privatiser l’espace public, sans jamais oublier que la création d’un coeur de parc est IRREVOCABLE !

  • Randonneur assidu, amoureux de la nature et par dessus tout de "ma colline", je suis totalement hostile à une réquisition de "mon", de notre territoire par quelques politiciens pour leur plaisir perso. afin de "placer" quelques petits copains comme "policier de l’environement" donc des "branleurs" qui ne connaisse rien à la nature et ne l’entretiennent pas ( voir le PNC de port-cros et l’enclave sur Porquerolles). De plus il faut quand même savoir que le principal acteur de ces parcs se nomme Mr Guirand, ancien Maire de St Cyr-sur-Mer, en fait celui qui a organisé toute la promotionimmobiliere du Plan de la Mer, c.a.d. tout le bétonage de la plaine entr St Cyr et Les Lecques à ce qu’il se raconte dans les chaumieres du coin ; il parait même que c’est à cause de cela qu’il a été balayé de son poste lorsqu’il sest représenté comme édile de son village....
    Il faut certe protéger la nature, mais sans l’interdire ; au contraire il fautaider les gens à en profiter en les éduquant, en leur faisans prendre conscience qu e l’on peut jouir de l’environement sans le detruire . LE PARC NATONAL DES CALANQUES EST UNE VOLONTE POLITIQUE TOTALEMENT DEMAGOGIQUE !!!!et qui va à l’encontre de la SANTE PUBLIQUE car si on ne peut plus respirer un peu d’air "pur" dans nos collines il ne nous restera que les gaz d’échappement en ville.... Bonjour les pneumopathies.. ;donc ACCROISSEMENT DU DEFICIT DE LA SECU !!!!!

  • Chère Madame Degert, on peut comprendre certaines inquiétudes, et c’est votre métier de faire valoir certains points de vue des opposants à CE parc national là... néanmoins, vous auriez pu recouper (on dit ainsi dans les écoles de journalisme) vos informations car pour la plupart, elles sont tout simplement fausses, il est assez simple de vérifier auprès du GIP des Calanques. Et comme vous n’utilisez pas les guillemets pour les retranscrire en général, elles peuvent être considérées comme relevant d’une enquête journalistique, et non d’un propos d’un des acteurs. C’est une faute. Sans parler du fait que vous ne donnez quasiment pas la parole aux promoteurs du projet.
    C’est bien triste d’utiliser le prétexte de l’article journalistique pour se faire simple porte-parole des opposants...espérons que ça ne trompe que ceux qui y ont déjà un avis arrêté sur la question, sans envie d’en changer...

    • Merci d’avoir porté attention à mon article sur le parc national des calanques. Il fait suite à une enquête sérieuse sur « La face cachée des parcs nationaux » publiée par Médiapart et sur Bellaciao.

      http://blogs.mediapart.fr/blog/francoise-degert/020311/la-face-cachee-des-parcs-nationaux

      http://bellaciao.org/fr/spip.php?article114400

      Cette enquête révèle les enjeux économiques et financiers des aires protégées tracés par les poids lourds de l’industrie (entre autres, pharmaceutique), des sociétés de service pour la gestion des parcs, auxquels s’ajoutent l’industrie touristique, l’immobilier, les banques… Elle conclut que les aires protégées dépossèdent les habitants de leur territoire pour l’accaparer, le privatiser. Tout ceci par le biais de contraintes liberticides, au nom de la protection de la biodiversité.

      Une telle enquête aurait mérité d’écrire un livre, tant un article ne peut tout aborder. Ainsi j’ai passé sous silence les études brésiliennes montrant que les communautés indiennes d’Amazonie protégeaient parfaitement la biodiversité de leur territoire, bien mieux que les aires protégées situées à proximité. Normal : les populations s’organisent pour préserver elles-mêmes l’environnement dont elles tirent les ressources essentielles. Et ce, gratuitement. Cette notion a été largement développée par Elinor Ostrom, prix Nobel de l’Économie en 2009 pour son travail sur les « Communs ».

      Cette constante vaut pour le Brésil, les Etats-Unis (Elinor Ostrom), la France et les autres pays.
      Le parc national des calanques n’échappe pas à la règle. C’est pourquoi les opposants au projet m’ont intéressée : leurs propos méritaient d’être exposés, même brièvement (je n’ai d’ailleurs pas très bien compris votre remarque sur les citations).

      En bref, cet article, qui se raccroche à « La face cachée des parcs nationaux », ne porte pas sur l’ensemble du projet.

      FD

  • Il est très étonnant, et attristant, de trouver dans Bellaciao l’apologie des adversaires du projet de Parc National des Calanques.
    Et cela dans un texte bourré de mensonges et d’erreurs, volant au secours des propriétaires de grosses vedettes qui veulent continuer à mouiller l’ancre n’importe où, d’"écologistes" (?) qui comme les opposants ciotadens au Parc s’élèvent contre les restrictions à l’urbanisation, etc. etc.

    Non, le Parc National n’interdira pas tout, il suffit de lire les documents du GIP-calanques.
    Il y a déjà 9 Parcs nationaux en France. Il est interdit de s’y promener ???
    Ce qui y est interdit, c’est un usage abusif par certains privilégiés qui se croient partout chez eux, c’est la négligence, c’est la moto "verte" et le quad rugissant, etc.

    ET SURTOUT IL EST INTERDIT DE CONFISQUER LA NATURE AU PROFIT DE LA SPECULATION IMMOBILIERE, ce qui évidemment ne convient pas à certains.