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Josette Dupuy , enseignante syndicaliste, contre le projet de Constitution Européenne

Publie le dimanche 19 décembre 2004 par Open-Publishing

de Josette Dupuy

Comme communiste et comme enseignante, moi aussi je voterai et j’appellerai à voter non au projet de Constitution européenne, pour toutes les raisons qui ont été développées, et pour celle dont je vais vous parler plus particulièrement maintenant.

Les mots laïcité, laïque, n’apparaissent pas une seule fois dans ce texte.

Par contre les références au religieux y sont multiples, et ce dès le préambule, où il est dit que les rédacteurs de la Constitution se sont inspirés "des héritages culturels, religieux et humanistes" de l’Europe.

Il est vrai que le texte de la Constitution réaffirme plusieurs fois le respect des convictions philosophiques. Faut-il deviner sous cette appellation très vague le respect aussi de la laïcité, qui serait ainsi ramenée au rang de conviction respectable au même titre - mais pas plus - que beaucoup d’autres ?

Car la laïcité n’est pas seulement une conception philosophique : elle est à la fois une exigence très haute et une pratique démocratique, qui implique et porte en elle - entre autres - le respect des convictions philosophiques et religieuses. Mais elle n’est pas neutre par rapport à ces convictions : de ce point de vue, elle est un excellent rempart contre les communautarismes et les intégrismes de tout poil qui fleurissent de nos jours, en France et en Europe.

Ce projet de Constitution est le reflet d’une réalité : il ne fait pas référence à la laïcité parce que la laïcité n’est pas une préoccupation essentielle de ceux qui l’ont rédigé.

De nombreux états européens ne sont pas laïques. D’autres confondent laïcité et oecuménisme, laïcité et coexistence des religions, voire des intégrismes, laïcité et neutralité (ou soi-disant neutralité) face à ces phénomènes.

Mais ceux qui ont participé au nom de notre pays à la rédaction de ce projet ont-ils au moins essayé de porter cette idée de laïcité, de la faire progresser, de lui gagner une place dans le texte ? Au vu de la personnalité de beaucoup d’entre eux, j’en doute fortement.

Alors je souhaite que cette Constitution soit remise en chantier, que le principe de laïcité soit enfin débattu, approfondi, enrichi encore si possible, et pourquoi pas inscrit dans une nouvelle rédaction de ce texte. Qu’au moins on essaie de le faire ! Car si les états européens ne sont pas laïques, des exigences laïques s’expriment en de nombreux endroits de son territoire, parmi les peuples. Appuyons-nous donc sur ces aspirations populaires pour affirmer la nécessité d’une Europe laïque !

L’Europe n’est pas laïque, et la France l’est de moins en moins. Et ce n’est sûrement pas le vote de la loi sur les signes religieux qui me convaincra du contraire.

La laïcité comme pratique démocratique s’intéresse aussi, bien sûr, aux contenus des enseignements : elle réclame des contenus exigeants, émancipateurs, à mille lieues du misérable "socle commun" que veulent nous imposer le rapport Thélot et le projet de loi Fillon. De ce point de vue, le projet de loi d’orientation que propose le gouvernement marque un nouveau recul de la laïcité en France ! Nous devons le refuser aussi pour cette raison.

Autrement dit : en France, nous nous battons contre le projet Fillon ; nous votons contre l’actuel projet de Constitution ; et nous portons partout, en France et en Europe, notre exigence de laïcité, jusqu’à ce qu’elle s’inscrive dans le texte même de la Constitution.

Je vous remercie de m’avoir écoutée.