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La diversité rend plus fort

Publie le vendredi 24 décembre 2004 par Open-Publishing


de Nature

Un projet prévoyant de réformer les commissions de dotation au Congrès américain - et
d’en créer une seule dévolue à la science- a peu de chance d’aboutir. Ce qui
est aussi bien.

La gestion des programmes de recherche et développement du gouvernement américain
est dispersée entre les ministères et les commissions du congrès d’une manière
assez hasardeuse.

Pendant des dizaines d’années, certains esprits étroits ont suggéré des améliorations.
Mais celles-ci ont été ignorées -et la science américaine est devenue de plus
en plus performante.

La plus récente proposition vient de Tom DeLay (Républicain, Texas), le leader
de la majorité à la Chambre des Représentants, qui souhaite réduire à l’essentiel le nombre des sous-commissions de dotation qui définissent les budgets.

Son projet
prévoirait une sous-commission pour la science qui prendrait sous son aile la
NASA, le NIH (National Institute of Health, Institut National de la Santé), la
NSF (National Science Foundation, Fondation Nationale des Sciences), et les programmes
de recherche du DOE (Department of Energy, Département à l’Energie).

Actuellement, les organismes scientifiques dépendent de différentes sous-commissions de dotation, ainsi la NASA est en compétition directe avec les services des Anciens Combattants et ceux du Logement pour son financement. Le NIH a parmi ses concurrents le ministère de l’Education. Ce système peut manquer de logique, mais il a bien profité à la science. Les organismes scientifiques ont chacun trouvé des défenseurs dans chaque Chambre du Congrès, qui connaissent et soutiennent leur travail.

Le système actuel implique aussi que ces organismes ne sont pas en compétition directe pour leur budget - les décisions qui concernent la manière de financer le spatial sont prises séparément de celles qui se rapportent à la recherche biomédicale. Cela a mis un frein à la redistribution inattendue de l’argent vers des sphères à la mode ou politiquement correctes, et a contribué à l’édification de l’entreprise de recherche la plus puissante et la plus diversifiée au monde.

Tout mettre dans les mains d’une seule sous-commission de dotation pourrait fragiliser tout cela. Les organismes entreraient en compétition farouche pour leur financement, et de mauvaises priorités pourraient être prises en compte. La dynamique habituelle des commissions du Congrès suggérerait que les membres dont les régions possèdent d’importantes installations de la NASA ou du DOE soient dominants au sein de cette sous-commission, ce qui amenuiserait l’influence d’autres organisations comme le NIH et la NSF qui attribuent de petits budgets aux chercheurs de tout le pays.

Cela fait peut-être partie des objectifs de DeLay. Il est récemment intervenu pour rétablir le budget de la NASA - à la fois en défendant le programme de vols spatiaux humains du Président Bush, et à la fois pour retirer un peu de gloire personnelle au nom du Centre Spatial Johnson implanté dans son propre district. Il peut penser qu’une sous-commission à la recherche servirait mieux les intérêts de la NASA. Mais l’intention majeure de son projet, d’après le journal du Capitol Hill le Roll Call qui a dévoilé l’affaire le 6 décembre, est de modifier le système budgétaire pour permettre à la direction du parti Républicain de réduire le pouvoir du gouvernement fédéral.

Mais même l’homme surnommé « Le Marteau » à Washington aura beaucoup de pain sur la planche pour réformer un système tellement enraciné. La Chambre sera réticente à dissoudre sa structure actuelle, et il faut s’attendre à une réaction hostile du Sénat. Rien ne devrait se passer dans l’immédiat, mais cela pourrait changer si les Républicains renforcent leur influence au Sénat en 2006.

Cette inertie est probablement une bonne nouvelle pour le monde scientifique, et pour ses lobbyistes, qui se plaignent du système actuel, mais savent faire avec. Comme l’un d’entre eux disait la semaine dernière, « je préfère mener neuf petites batailles pour obtenir un financement de recherche correct qu’affronter une seule grande bataille, à l’issue de laquelle le gain pour un domaine scientifique se fait aux dépens de tous les autres ». La concentration excessive du pouvoir au niveau de la distribution des financements de recherche conduirait à davantage d’interférence politique, d’instabilité budgétaire, et à moins de diversité dans la recherche scientifique américaine.

Traduit de l’anglaise par Valerie de Bellaciao

http://www.nature.com/