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La droite osera-t-elle privatiser le train ?

par nouvelobs

Publie le samedi 9 juillet 2011 par nouvelobs - Open-Publishing
6 commentaires

En France, le processus de libéralisation du secteur ferroviaire a débuté en 1997. Les choses pourraient maintenant s’accélérer.

Les bruits de couloirs disent qu’elle pourrait. Des élus s’en inquiètent. Les difficultés récurrentes de la SNCF à assurer un service de qualité font régulièrement la Une des journaux. Les blogs s’emparent du mécontentement des voyageurs pour lancer les plus folles rumeurs. Plusieurs agences de notation ont revu la note de la SNCF à la baisse.

Le risque ? Livrer notre patrimoine (notre réseau ferré) à des entreprises privées qui, à l’instar de ce qui s’est passé sur les autoroutes, l’énergie, l’eau, le téléphone et bientôt la poste, chercheront à faire du profit sur le dos de consommateurs captifs.

La libéralisation gagne du terrain

Sans avoir procédé au moindre bilan de l’application des directives précédentes, la Commission s’enfonce dans le dogme ultra-libéral de la concurrence "libre et non faussée"1. Elle s’apprête à adopter de nouvelles directives ferroviaires (les paquets ferroviaires) exigeant des États membres de prendre plus rapidement les décisions nécessaires à l’ouverture totale des marchés.

Car dans le secteur ferroviaire, libéraliser le service suppose quelques étapes préalables. Il faut d’abord rendre le réseau indépendant avant de créer une autorité chargée de veiller au respect des règles de la "bonne concurrence" et enfin procéder aux ajustements règlementaires sur les conditions d’exercice de la profession de conducteur, les modalités techniques d’accès aux voies etc. En France, ce processus a été engagé en 1997, quand la droite (c’était avant la dissolution) a procédé à une séparation très imparfaite des activités de la SNCF et de Réseau Ferré de France (crée pour l’occasion).

Est venue ensuite la libéralisation du fret en 2006, puis celle du transport international de voyageur en 2009, date à laquelle la France s’est dotée de la fameuse autorité de régulation des activités ferroviaires.

A priori, donc, tout est prêt pour que la France franchisse les prochaines étapes de la libéralisation que sont l’ouverture à la concurrence des grandes lignes intérieures et des transports régionaux.

Tout est prêt mais rien n’est obligatoire

En France, la loi confère à la SNCF le monopole de l’exploitation des lignes intérieures et des transports régionaux. Et alors que les directives autorisent clairement chaque État à attribuer directement un tel marché, l’affaire est moins entendue pour les transports régionaux.

Conformément à l’article L. 2121-4 du code des transports, les régions doivent conclure une convention avec la SNCF. Depuis 2009 toutefois, en droit européen, le Règlement relatif au service public de transport de voyageurs (dit ROSP) prévoit que toute autorité compétente procède par appel d’offre, sauf en cas d’exploitation directe. Or la SNCF n’est pas une régie directe des régions.

Les deux législations sont-elles compatibles ? Oui, jusqu’en 2019 disent les politiques. Le règlement fixe en effet à 2019 la date de fin d’une "période transitoire". Non, disent les entreprises ferroviaires concurrentes de la SNCF qui veulent entrer sur le marché. Réunies au sein de l’Association française du rail (AFRA), elles menacent régulièrement de porter l’affaire devant les tribunaux. Et pour cause, tant que loi française demeure, elles ne peuvent prétendre à prendre aucun marché sur le sol français.

Anticipant, le gouvernement a commandé dès 2009 au sénateur Grignon un rapport sur l’ouverture à la concurrence dans les régions. Plusieurs fois repoussée, la publication eu lieu le 18 mai : il propose une expérimentation.

La direction de la SNCF semble avoir fait son deuil de ce monopole. Qualifiant le rapport Grignon de "bon rapport qui propose une ouverture progressive, raisonnable et régulée à la concurrence" son président a affiché que sa priorité était désormais de gagner des marchés à l’étranger. Toute publique qu’elle soit, la SNCF exporte son savoir-faire et ne cache plus ses ambitions.

De leur côté, les collectivités estiment que "multiplier les opérateurs sur un réseau en mauvais état et dont la gouvernance est en pleine crise ne pourrait, dans une telle situation, qu’engendrer des difficultés supplémentaires, voire porter atteinte à la sécurité des circulations ferroviaire".

La réalité c’est que les régions métropolitaines, dont les présidents sont tous socialistes à l’exception de l’Alsace, sont mal à l’aise avec cette perspective, en partie parce que la réforme est souvent présentée par la droite comme une suite logique à la régionalisation lancée par la gauche en 1998. Mais pas seulement.

Les responsables régionaux se plaignent souvent, dans les couloirs, de devoir faire face à un opérateur historique en situation de monopole, avec lequel les négociations sont souvent difficiles. Ils dénoncent un manque de transparence. Certains voient donc la mise en concurrence comme une solution pour obtenir plus de liberté, pour peser sur l’offre tarifaire, les horaires et les dessertes nouvelles.

Les mêmes n’en reconnaissent pas moins que l’arrivée de nouveaux entrants serait prématurée. Dilemme. Comment s’assurer qu’ils disposent des compétences nécessaires pour faire rouler les trains ? Comment s’assurer que les personnels soient respectés et, à l’instar de ce qui se passe dans les transports urbains ou la gestion des déchets, repris d’une entreprise à une autre ? Comment facturer les services en gare, assurés par la SNCF, aux nouveaux entrants ? Comment ne pas craindre les ententes entre opérateurs ?

Toutes ces questions militent pour ne pas sacrifier le monopole de la SNCF sans disposer des gages minimum de sécurité, de fiabilité et de durabilité du système dans son ensemble. En l’état du droit, le monopole présente encore plus d’avantages que d’inconvénients.

C’est pourquoi pendant ce temps, au Parlement, rendant leurs avis sur les projets de directives de la commission européenne, les parlementaires ont choisi de rappeler l’importance du maintien de l’unicité du réseau et d’une réforme profonde du système qui s’attache d’abord et avant tout à trouver les ressources nouvelles pour retrouver la qualité des voies ferrées .

Admettons que l’ouverture soit inéluctable. Sans la SNCF, les transports régionaux pourraient-ils malgré tout rester publics ?

Évidemment. Grâce à l’audace corse et aux sénateurs socialistes !

La première région à oser se défaire de la contrainte SNCF sera vraisemblablement la Corse. Le 24 juin 2001, Corse-Matin présentait le projet de création d’une SEM régionale faisant suite au rejet de l’offre de la SNCF qui exige une contribution de la collectivité multipliée par 4. En fait, la Corse vit déjà sous le régime "ROSP", mais souhaitant tout à la fois rejeter l’offre de la SNCF et préserver les cheminots, elle envisage la création d’un établissement public local.

L’EPL est l’alternative juridique à la régie publique. Un statut nouveau, sorte de filiale publique, qui permet aux collectivités de passer des "commandes" sans mise en concurrence. Et c’est une initiative socialiste qui a rendu possible cette avancée : éviter la privatisation tout en respectant le droit européen.

Alors, si d’aventure la droite envisageait d’en finir les monopoles de la SNCF – ce qui est fort probable – elle devra compter avec la détermination des élus socialistes qui, à l’instar de Rennes ou Paris pour la gestion de l’eau, peuvent désormais choisir que la gestion publique s’impose quand il s’agit de biens essentiels.

Si la droite envisageait de privatiser les trains... la gauche pourrait l’en empêcher

http://leplus.nouvelobs.com/contribution/170166;la-droite-osera-t-elle-privatiser-le-train.html

Messages

  • Alors, si d’aventure la droite envisageait d’en finir les monopoles de la SNCF – ce qui est fort probable – elle devra compter avec la détermination des élus socialistes qui, à l’instar de Rennes ou Paris pour la gestion de l’eau, peuvent désormais choisir que la gestion publique s’impose quand il s’agit de biens essentiels

    le problème est tout là !!les socialistes en sont ils capables ? on attend des actes et non des promesses !!!

  • La droite (et les sociaux-capitalos de Solférino), c’est comme les c... d’Ivan Audiard, ça ose tout ! Ils auraient tord de se retenir, la preuve : ça passe malgré tout.

  • Si la droite envisageait de privatiser les trains... la gauche pourrait l’en empêcher

    tout est dans le "pourrait"

    la gauche de la droite, autrement nommé PS, est aussi libéral que la droite ; ce n’est que dans les périodes de poussée des luttes sociales que les socialos font un peu de social !

    creusons nos sillons loin du spectacle médiatico-électoral et loin des socialos

    PS : ils oseront TOUT car ils sont dans l’idéologie pure ; aucune crise ne leur fera admettre leurs erreurs

    les capitalistes et leurs larbins sont les staliniens du XXIème siècle : ils nient la réalité quotidienne et se réfugient dans leur idéologie

    c’est notre chance

  • Denis Kessler n°2 du MEDEF, Directeur général d’Axa, banquier, président de la fédération française des sociétés d’assurances, président du groupe de réassurance Scor, membre du Conseil économique et social, du Conseil national des assurances, du Comité européen des assurances, de la Commission des comptes de la nation.

    Dans un éditorial du journal « Challenge », le 4 octobre 2007, il écrit notamment :

    « … Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. (…) Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie. Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité sociale, paritarisme… A y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. La liste des réformes ? C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ! »