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Bové et Greenpeace sont dans un canot... et ont vu trop haut

Publie le mercredi 26 janvier 2005 par Open-Publishing

Militantisme. Arraisonnement raté d’un bateau rempli d’OGM par le
porte-parole de la Confédération paysannne et l’association écologiste.
Bové et Greenpeace sont dans un canot... et ont vu trop haut

Par Raphaël KRAFFT
A bord de l’Esperanza (au large du Portugal) envoyé spécial

« Cette action spectaculaire, c’est la suite de toutes les actions qu’on mène
depuis des années, déclarait, hier matin, José Bové avant d’embarquer sur le
Zodiac. Aujourd’hui, on s’en prend aux bateaux puisque 80 % des OGM arrivent
en Europe par la mer. » A bord de l’Esperanza, l’un des trois bateaux de la
flotte de Greenpeace, José Bové a troqué sa pipe contre un sifflet de
survie. Harnaché de la tête au pied, casque jaune et combinaison rouge, il
n’a que sa moustache qui dépasse. Huit heures, hier matin, au large du
Portugal. Avec Arnaud Apoteker, responsable de la lutte anti-OGM chez
Greenpeace, ils entendent aborder et occuper le Golden Lion, un navire de
180 mètres transportant 32 000 tonnes de tourteau de soja transgénique en
provenance d’Argentine à destination de Lorient.

Grimpeurs. La mer est forte. Deux Zodiac ont été mis à l’eau. L’un
transporte une équipe d’escaladeurs professionnels. Ils doivent ouvrir la
voie aux deux militants. Sur l’autre, José Bové et Arnaud Apoteker sont
accompagnés d’un cameraman et d’un photographe de Greenpeace. « Il faut des
images pour que nos actions soient comprises par le plus grand nombre »,
indique Bové. Si la Confédération paysanne et les Faucheurs volontaires se
sont associés avec Greenpeace dans cette campagne, « c’est pour essayer de
combiner notre capacité de mobilisation avec les outils techniques qu’ils
savent très bien maîtriser ». Avant que les grimpeurs passent à l’abordage,
Frank Kamp, le capitaine de l’Esperanza lance un message radio au Golden
Lion avec une pointe d’arrogance : « Bonjour et bienvenue dans les eaux
européennes. J’espère que vous avez fait bon voyage depuis l’Argentine.
Cependant, nous ne sommes pas très satisfaits par votre chargement. Nous
savons que le soja que vous transportez a été modifié génétiquement. Nos
inspecteurs vont monter à bord. Gardez votre vitesse et votre cap, nous ne
vous infligerons aucun dommage. »

Pendant ce temps, le premier Zodiac s’est collé à la coque du Golden Lion.
Mikey Rosato, le premier grimpeur, fixe son échelle de corde au pont du
cargo à l’aide d’une perche, s’y agrippe et commence à grimper. ça balance.
Son pied se coince dans l’échelle de corde. Le voici la tête en bas. Il fait
l’ascenseur dans des creux de trois à quatre mètres et percute la coque à
plusieurs reprises. Il est sonné. Le second grimpeur coupe l’échelle de
corde à la faveur d’une vague. Par chance, Rosato retombe dans le Zodiac.
Ces images spectaculaires, les téléspectateurs européens ne les verront pas.

Circonspection. C’est la déception à bord. « Nous espérions pouvoir créer un
événement spectaculaire qui aiderait à une mobilisation », regrette Apoteker.
Elle aura lieu dans le port de Lorient vendredi matin, date d’arrivée d’un
Golden Lion « escorté » par l’Esperanza. Pendant l’entraînement d’escalade,
Olivier Keller, paysan dans l’Ardèche et secrétaire national de la
Confédération, ne cachait pas sa circonspection sur l’action en cours : « ça
fait un peu télé-réalité cette histoire. » Hier, dans un communiqué,
Greenpeace se bornait à évoquer l’« interception » du navire, en omettant de
décrire l’échec de l’opération.