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TREMBLEMENT DE TERRE DE WAN (TURQUIE) : LES KURDES ABANDONNES

Publie le dimanche 4 décembre 2011 par Open-Publishing

Les séismes de Wan, d’octobre et novembre 2011, (Kurdistan turc) ont suscité, par leur gravité, une immense émotion internationale. Après avoir concédé que les services de secours n’étaient pas à la hauteur, le premier ministre Erdogan, a accepté, du bout des lèvres, l’aide internationale. Depuis les autorités affirment faire face à la situation.

De retour de Wan, où j’ai séjourné durant quatre jours, aux côtés des sinistrés, je souhaite alerter l’opinion internationale sur l’abandon complet dont les populations kurdes font l’objet. Un scandale humanitaire, dont l’Etat turc porte l’entière responsabilité, se déroule quotidiennement.

La terre tremble encore et accroit les destructions sur un bâti fragilisé. 80% des habitations sont détruites. La population vit dans la terreur des répliques meurtrières. On dénombre à ce jour 672 morts et plus de 6000 blessés. Wan est une ville fantôme. Plus de 400 000 habitants ont fui la région, seuls restent les familles les plus pauvres, sans familles pour les recueillir dans d’autres régions.

Ces sinistrés sont livrés à eux-mêmes. Ils meurent de froid par une température glaciale (moins 15°C), des enfants succombent à des pneumonies, à l’absence d’hygiène et de nourriture. Quelques médecins, des bénévoles, le personnel de la mairie de Wan, tentent, sans aucun moyen, de leur porter assistance.

Face à ce désastre, Ankara a choisi de faire payer aux kurdes leurs revendications politiques et culturelles. Seules, l’armée et la police bénéficient des secours qui s’imposent. Une petite minorité de la population a reçu des tentes tandis que la grande majorité kurde en est totalement dépourvue. Ils se protègent avec des abris de fortune, des bâches et des cartons sans aucune possibilité de chauffage. Trois enfants sont décédés suite à l’embrasement de ces matériaux. Les gens se regroupent le soir autour de braseros improvisés. Il n’y a pas d’eau ni, de sanitaires. Ils doivent survivre au froid, à la faim, à l’épuisement, à la terreur quand la terre gronde. Partout règne la misère et la souffrance. Mais la terreur s’accroît la nuit lorsque la police tire sur des groupes d’individus au nom de la « lutte anti-terroriste » , contre " les pillards"et que l’on entend les bombardements de l’armée contre les bases de la résistance populaire du PKK.

Tous les membres de la délégation européenne, à laquelle je participais, ce sont interrogés sur l’utilisation des aides internationales parvenues en Turquie ? Le gouvernement autonome du Kurdistan irakien a envoyé plusieurs millions d’euros et 200 préfabriqués. L’Ukraine a apporté 4 tentes pouvant abriter 20 personnes chacune, équipées de système de chauffage. Israël a envoyé 7 maisons préfabriquées. L’Union Européenne, l’Italie, la France, la Grande-Bretagne, le Japon, la Suisse, l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Qatar, l’Arabie Saoudite, la Jordanie et l’Egypte, la Belgique ont participé à cet élan de solidarité.

Où sont passés ces dons destinés aux sinistrés ?

Le Maire de Wan, M. Bekir KAYA, a confirmé que la municipalité n’avait reçu aucun don. La totalité a été versée au gouvernement turc, soit 100 millions d’euros. Deux millions ont été versés à l’armée tandis que le reste s’est évanoui. Le gouverneur de Wan fait un usage partisan de quelques subsides… suivant en cela les consignes du pouvoir qui affirme désormais que la région n’est pas sinistrée. De telles déclarations sont une honte et une atteinte supplémentaire aux droits humains. Quant aux dons en nature (tentes, vêtements, médicaments…), ils sont stockés dans des hangars ou "accidentellement" brûlés.

Le cynisme a atteint son comble ces jours-ci. Les trois municipalités dirigées par le BDP (Parti pour la Démocratie et la Paix, kurde) se sont vues réclamer le paiement de leurs crédits d’emprunt et les frais de déblaiement de la ville. La seule cité dirigée par le parti au pouvoir, l’AKP, en a été exonérée !

Le gouvernement français et les organisations humanitaires donatrices doivent exiger des comptes de la Turquie et ne pas se laisser abuser par le camp « modèle » destiné aux médias.

La population kurde de Wan se meurt du refus de l’Etat turc de lui porter assistance. De plus, la Turquie, qui prétend être un Etat de droit, détourne les fonds internationaux destinés aux sinistrés.

Il y a une urgence absolue.

TORRE Dominique

Déléguée du PCF