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Le petit Poucet et le père Gaymard un conte d’aujourd’hui

Publie le samedi 26 février 2005 par Open-Publishing

un conte de Franca Maï

Il était une fois...
Once upon a time...

Les huit enfants de la fratrie Gaymard étaient très perturbés par les bourdes de leur papa, ministre de l’économie de France. Ce dernier avait violé trois fois la circulaire du 10 mai 2002 édictée par Jean-Pierre Raffarin relative aux conditions de logement des membres du gouvernement et s’était fendu d’un mensonge public.

Ils étaient donc à la rue, épinglés par les flocons de neige versatiles ne sachant plus s’ils devaient poser leurs guêtres et malles :

 dans l’appartement de 235m2 situé boulevard St Michel à Paris
 dans la maison familiale en Savoie dressée au coeur du petit hameau de Vilar

ou

 dans celle nichée en Bretagne, sur la pointe très prisée de Trévignon, avec vue imprenable sur l’océan et les îles de Glénan.

Il faut dire que les goélands, ça fout le blues en hiver.

Les deux F2 et le garage à Bourg-Saint-Maurice du local de permanence d’Albertville -appartenant également à l’homme qui les avait sculptés- ne pouvaient décemment pas faire concurrence au duplex de fonction de 600m2 -loué 14.000 euros par mois aux frais de l’Etat- duquel ils avaient été éjectés comme des vulgaires cantharides.

Des petits cailloux dans la poche, vivement recommandés par les sagesses prémonitoires, la progéniture Gaymard se dressait, perturbée, devant l’éventail proposé.

Un choix cornélien percutait leurs cerveaux. Lorsque l’on possède des parents multi-propriétaires, où projeter son quotidien ?

Telle était la question.

Les enfants du ministre regardaient avec envie et jalousie toutes ces familles de chômeurs en fin de droits et ces licenciés confrontés aux problèmes permanents d’habitation qui eux, ne se trituraient pas les neurones avec des broutilles. Et pour cause, ils ne possédaient rien ! ... Cela évitait les maux de crâne ! ...

Souvent expulsés à l’aube de matins blafards d’une rare violence, ces précaires y restaient figés ou se transformaient en nomades improvisés, squattant aléatoirement des espaces de 20m2, le temps de se refaire une santé.

Ou alors...

A bout de souffle, ils se pendaient lors d’un dernier soubresaut alcoolisé, préférant la musicalité d’une corde intègre.

Il faut préciser qu’avant cet ultime acte de délivrance, aidés de leurs petits cailloux universels, ces êtres au bout du rouleau, avaient massacré des chats afin de paralyser la faim dévorante.

Devoir chausser des bottes de sept lieux éventées leur avaient procuré des cors aux pieds.
Tout le monde n’ayant pas la chance d’avoir un grand-père cordonnier !
Mais les enfants Gaymard étaient également habités de cauchemars hallucinants.

Ils avaient ouïe dire que certains patrons exploitaient des mômes de leur âge dans des pays de chimères, sous couvert de rentabilité industrielle... que Borloo inventait le pavillon discount et le chèque emploi universel.

Toutes ces informations fourmillantes avaient une influence néfaste sur leur sommeil agité. Les images et projections étaient tétanisantes.

S’ils ne se décidaient pas assez vite dans le choix de leur nouvelle demeure, ces prédateurs sans âme ne verraient-ils pas en eux, des proies faciles et à portée de main ? N’auraient-ils pas la mauvaise idée de les exploiter ?

Tous se réveillaient alors en sueur.

Mais un jour de clairvoyance, leur père donna sa démission.

Ils respirèrent enfin. Tous les mauvais nuages fuguèrent.

Ils furent fiers de lui.

Papa, s’était enfin comporté comme un vrai juste.

Car un homme désigné aux mannes d’une économie qui prouve par des actes irresponsables, qu’il ne sait pas compter, peut devenir un réel poison distillé dans les règles d’une démocratie.

Et cette donnée, même les enfants peuvent la comprendre.

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