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Un îlot de fidélité "aux idées" dans une mer de trahisons : le Berliner Ensemble

Publie le mardi 22 mai 2012 par Open-Publishing

Petite recension de la dernière de la "Hanns Eisler Revue" donnée au Berliner Ensemble de Berlin, le 13 mai 2012.

Le Berliner Ensemble
temple brechtien

Nul besoin de s’étendre, le Berliner Ensemble est la création de Bertholt Brecht et depuis sa mort, les équipes qui se sont succédées ont peu ou prou tenu la barre en produisant des programmations dignes et fidèles à l’engagement sans concessions du fondateur pour la cause de la classe ouvrière.

C’est donc bien d’un îlot de fidélité "aux idées" qu’il s’agit. Ile au sens figuré, entourée de lieux de mémoires, dans ce quartier du Schiffbauerdamm où les combats des derniers jours du 3e Reich avec l’armée rouge furent féroces à en juger les traces du passé qui subsistent de nos jours.

une nuit sur le Schiffbauerdamm

Dans une mer de trahisons aussi, en effet, nul besoin de s’étendre sur le contexte politique du Berlin de 2012 qui n’a plus rien à voir avec celui de Brecht d’avant 1933 ou de 1953. Un Berlin gouverné de la main droite par une Linke gauchère. Wedding la rouge a-t-elle perdu ses ouvriers ?

Heureusement, cet îlot subsiste et pour le non germaniste, il existe UN moyen de découvrir l’esprit Brechtien du Berliner Ensemble, c’est la" Revue Hanns Eisler" créée en février 2011 et qui a connu sa dernière représentation de la saison 2011-2012 le 13 mai dernier.

Cette revue musicale relate la vie mouvementée de Hanns Eisler, compositeur né à Leipzig de parents autrichiens et juifs, qui au sortir de la 1ère guerre mondiale choisit la cause de la révolution prolétarienne et l’épousa stylistiquement en créant une musique vouée à rendre l’auditeur acteur de l’acte musical lui même porté au niveau d’arme dans le combat de classe.

L’histoire de ce personnage attachant nous est contée de manière soignée, humour et brechtismes étant de rigueur, avec un recours plutôt amusant à l’art bertholtien de la raillerie surtout lorsqu’il s’agit de dénoncer les compromissions de la social-démocratie ou encore celles de la bourgeoisie lors de l’ascension d’Hitler au pouvoir suprême.

Berliner Ensemble, la scène inclinée

Le compositeur incarne les contradictions de l’intellectuel engagé, utile dans la lutte, critiqué par ses pairs dans la " paix", affligé par un Jdanovisme Est-allemand hostile voire irrité par les railleries d’un Eisler orphelin d’un Brecht, protecteur ?

Brecht à Eisler : " travaille sur ce qui est impérieux"

finale de la Revue Hanns Eisler

En un mot, lecteurs de Bellaciao.org, allez_y avant de trépasser au moins UNE fois dans votre vie de militants ou de simple citoyen conscient.
Nous en sommes ressortis revigorés en nous disant que notre époque manque cruellement d’un Brecht et d’un Eisler pour dire ou clamer en poèmes, pièces théâtrales, chansons et mélodies entrainantes la nécessité de changer radicalement ce Monde, car il en a bien besoin.

La musique est riche, vocale, engageante, les principaux titres qui firent le succès de la kampf musik sont là, exécutés avec brio par une troupe magnifique, enthousiasmante et des musiciens hors pairs.

La "Eisler Revue" reprend à l’Automne avec en perspective la commémoration des 50 ans de la disparition du compositeur de l’hymne fabuleux de la République Démocratique d’Allemagne qui dans ses derniers jours avait pris l’habitude d’aller se saouler à l’Ouest pour mieux "dissoudre" sa dépression à l’Est.
Eisler un simple homme.

http://www.berliner-ensemble.de/

Manouche, Strasbourg le 22 mai 2012.