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FRONT NATIONAL ET « DEMOCRATIE »

par Patrick MIGNARD

Publie le dimanche 24 juin 2012 par Patrick MIGNARD - Open-Publishing
3 commentaires

Les questions qui fâchent !

L’entrée de deux députés du Front National à l’Assemblée Nationale pose un double problème. D’une part la signification politique, idéologique et éthique des idées de l’extrême droite dans un parlement,… dont on sait ce que ça peut donner. D’autre part le décalage entre le nombre d’électeurs du Front National et le nombre de ses députés.

Ces deux problèmes montrent toute l’ambiguïté, les limites et les contradictions de ce que l’on appelle la démocratie représentative qui a su, et le 20e siècle nous nous montre, nourrir en son sein les germes du fascisme.

LE FRONT NATIONAL UN PARTI DANGEREUX

A l’origine, en 1973, le Front National s’est créé, d’entrée, sur une idéologie nationaliste et discriminatoire. Les fées qui se sont penchées sur son berceau sont en fait des sorcières qui ont pour nom : collaboration, vichysme, pétainisme, Milice, waffen SS, catholique intégriste, anti communisme, colonialisme, OAS,…

Le FN cajole les exclus, les chômeurs, les pauvres, pour avoir leurs voix ( ce qu’ont fait tous les partis fascistes et néo fascistes). Il fonde son action et ses interventions sur des nervis directement issus de l’extrême droite et mouvement néo nazi… les agressions voire les crimes qui ponctuent son histoire sont là pour l’attester.

La brutalité des actions, les fréquentations plus que douteuses de ses chefs en font, en plus de ses idées un parti dangereux.

LE FRONT NATIONAL UN PUR PRODUIT DU « SYSTÈME »

Même si les chefs du FN s’en prennent systématiquement au « système », il n’empêche qu’il en est un pur produit et fait tout pour entrer dans ce « jeu » qu’il dénonce à longueur de tribunes. Loin de lui toute idée progressiste ou sociale, sinon pour surfer sur les conséquences de la crise du système marchand,… ce que les partis d’extrême droite on toujours fait. On n’a jamais vu le FN parler du rapport capital/ travail, répartition des richesses, initiatives solidaires, écologie, retraites, défense du système de santé, défense du service public, respect des droits de l’homme… Son discours économique est inexistant.

Il n’y a dans son programme aucune rupture avec les principes du capitalisme,… seulement un vague discours sur la nation, la culture (et encore succinctement !) et en filigrane, la race, la méfiance et le mépris de l’autre – hier le juif, aujourd’hui l’arabe, le tzigane,…

L’obsession des chefs du FN est de trouver leur place dans le système qu’ils disent honnir. Pour cela ils savent parfaitement jouer le jeu institutionnel et médiatique,… ce qu’ont toujours fait les partis d’extrême droite, sauf dans les cas de coup d’état militaire. L’accession au pouvoir par la voie légale est un grand classique du fascisme qui, une fois au pouvoir, supprime toutes les libertés.

Le danger est sournois, permanent et prend de multiples visages – même l’apparence démocratique - qu’il nous faut dénoncer.

LA SOUS REPRÉSENTATION DU FN

Avec un peu plus de 6 millions d’électeurs, le FN n’a que deux députés… Un tel décalage le fait hurler – à juste titre - au nom du principe d’égalité démocratique (ben voyons !). Formellement, il faut reconnaître qu’il a parfaitement raison,… et il joue à merveille de ce formalisme… la « vierge démocratique » outragée !

Si le principe de la proportionnalité est celui de la représentation démocratique – ce que personne ne conteste – le FN devrait avoir beaucoup plus de députés… surtout comparé au Front de Gauche et aux écologistes. Pourtant, à part lui, tout le monde se satisfait de cette situation et évite soigneusement de l’évoquer.

Pourquoi ?

Il y a au moins deux raisons plus ou moins avouables :

 c’est un parti « non républicain » d’où ses difficultés dans les accords et reports de voix… Quoique cette appréciation est plus ou moins élastique, pour la Droite comme pour la Gauche (Mitterrand l’a favorisé en son temps et l’UMP trouve des valeurs communes chez lui…) ;

 dans le jeu politique du bipartisme qui se met en place il est un troisième larron qui vient « picorer » dans la mangeoire de la classe politique déjà établie,… à ce titre il est mal venu… Rejet camouflé par une attitude pseudo morale qui tombe dès qu’il y a intérêt à s’entendre (non officiellement) avec lui.

Bref, le FN arrive difficilement à faire son « trou ». Est-ce scandaleux ?

Sur un plan formel, on l’a vu,…oui ! Mais peut-on en rester à un plan formel ?

Certainement pas.

Pourquoi ?

Parce que l’on sait ce qu’il en coûte de permettre à un parti néo fasciste de gravir les marches du pouvoir et de s’y installer.

Oui, mais dira-t-on, « que signifie de nier institutionnellement l’opinion de millions d’électeurs ? »

La réponse à cette question est difficile, car il faut pouvoir justifier, au nom de la « démocratie » et d’une « éthique politique », le fait qu’il se peut qu’une opinion partagée par une partie conséquente de la population, voire majoritaire est dangereuse… l’Histoire est là pour nous mettre en garde.

Oui, l’opinion publique majoritaire n’est effectivement pas à tous les coups ce qu’il y a de mieux pour l’ensemble de la population… Faut-il donner des exemples au 20e siècle ?

Oui, le suffrage universel peut conduire à la catastrophe, surtout quand les puissances d’argent se sont dotées de moyens de propagande efficaces et sans scrupules… ce qui est le cas aujourd’hui.

Oui, le fascisme est toujours né des incapacités du système marchand à résoudre ses contradictions et de son système politique à maintenir la paix sociale.

Oui, l’expression de certaines idées, même majoritaires, ou soutenues par une partie importante de la population, sont dangereuses et à combattre.

En ce sens, la sous représentation des idées du FN est souhaitable ce qui ne règle pourtant aucunement la question de l’émergence de telles idées.

Mais quel politicien traditionnel osera l’affirmer ? Aucun ! Les intérêts – de caste, de nomenklatura - de la classe politique est plus dans la manipulation des citoyens que dans leur élévation de niveau de conscience. Reconnaître tout cela c’est montrer les limites du système économique marchand et celles du système politique dit « démocratique ». Donc silence total sur ces questions.

Le doute est maintenu au maximum jusqu’à ce qu’il soit finalement trop tard.

Une telle conception n’est-elle pas la porte ouverte au blocage de toute idée nouvelle, de toute idée progressiste, de toute idée de changement ?

Oui,… et là est bien le danger ! Mais le système de « démocratie formelle » qui fonctionne dans les pays démocratiques, permet dans une certaine mesure d’imposer un ersatz de démocratie, qui en a le goût, la couleur, l’odeur, mais qui verrouille le processus démocratique en imposant de fait un bipartisme aboutissant sur l’alternance. Les risques de changements radicaux – dans le sens de la transformation des rapports sociaux – sont ainsi conjurés… Par contre l’éventualité d’une arrivée au pouvoir de l’extrême droite est toujours possible,… et c’est cette solution que trouve le capitalisme en cas de crise de majeure et de risque de son renversement.

Juin 2012 Patrick MIGNARD

Messages

  • Bonjour

    Démocratie ou république ?

    Dans une république "1789" en france la logique est simple tous égaux .
    Dans un démocratique pays cela est plus compliqué "ex URSS , Chine et USA"
    Mais en France c’est le NI NI , en toute logique toutes les tendances politiques devraient avoir des droits égaux " front de gauche ,front de droite , modem .."pour représenter le peuple au parlement.
    Je pense que le parti du retour aux cavernes avec 2% a l’élection du président royal ne respecte pas le pact républicain.
    Le problème c’est le choix république "1789" ou démocratie populaire ?
    Prise de risque ou ! "état policier"

  • Nous citons : "Il n’y a dans son programme aucune rupture avec les principes du capitalisme,…", c’est bien le cœur du problème, au même titre que FdG, PS ou UMPP. Mais mieux vaut taper sur un (le FN), absolvant ainsi les autres, mieux, les lavant de toute attache avec le capital, puisqu’ils sont ... Antifascistes.
    Et le capital, derrière et à la manœuvre de cette fausse polarisation, vit...