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3,9 milliards d’euros de fraudes détectés en 2011 ! Le flou et l’omission...

par paq34

Publie le lundi 23 juillet 2012 par paq34 - Open-Publishing

On assiste ces jours ci à une floraison d’articles sur le thème "Près de 4 milliards d’euros de fraude en 2011 en France" (Le Figaro, BFM, Le Monde, La Tribune, Libé, PQR, etc...).

Quasiment tous les articles sur le même modèle, à la limite du couper/coller : Et que je t’en tartine, surtout, des couches sur les fraudeurs “bénéficiaires” de la Sécu, des Aides Sociales, de Pôle Emploi... (Exception : Libé ; tonalité différente, mais fond semblable). Bref, la routine de la propagande médiatique... Mais, sérieuse, hein, puisque basée sur un rapport tout ce qu’il y a d’officiel ! http://www.economie.gouv.fr/files/B...

Problème : Ces articles sont complètement biaisés, comme le rapport sur lesquels ils sont basés.

En effet, ce rapport daté de Mai 2012, a été commandité par le gouvernement Sarkozy. En conséquence, il annonce... Ce qu’il doit annoncer… Ce qui, par ailleurs, ne devrait pas chagriner plus que ça le nouveau gouvernement de « gôche »…

Toutefois, ses rédacteurs ont fait le boulot correctement, et par honnêteté (dont on ne saurait trop les féliciter) ont laissé trainer quelques infos qui mettent à mal leur conclusion principale : 3,864 milliards d’euros de fraude en 2011 !

En fait, dans son intégralité ce rapport fait état d’un cumul de fraude autour de 29 milliards d’euros !!!

Seulement, voila, il y a des fraudes qu’il est de bon ton de dénoncer (et le Figaro et consorts ne s’en privent pas) et d’autres qui font désordre…

Lisons donc le rapport et particulièrement le paragraphe 1.2 et ses alinéas 1.2.1 (et en particulier sa note (2) en bas de page) et 1.2.2 ainsi que les premières lignes du paragraphe 2 (pages 6 et 7) :

 
Début de citation […]

1.2 La fraude aux prélèvements obligatoires

1.2.1 Les cotisations sociales

Pour améliorer l’estimation de la fraude (2) réalisée depuis trois ans à partir des contrôles ciblés, l’ACOSS a mis en place en 2011 un plan de contrôles aléatoires ; pour mieux estimer la fraude aux cotisations sociales dans le cadre du travail au noir d’une part, la fraude comptable d’autre part. Pour cette dernière opération, l’ACOSS a introduit la notion de fraude dans le contrôle comptable d’assiette. Les résultats de ces estimations sont attendus pour le 1er semestre 2012.

1.2.2 Les impôts

La DGFIP a travaillé pendant l’année 2011 au renouvellement de l’estimation de la fraude à la TVA. La méthode a été réexaminée afin de lisser les effets conjoncturels trop directement visibles avec la première évaluation car celle-ci se basait sur l’ensemble de la période contrôlée. Dorénavant, les contrôles utilisés pour l’évaluation de la fraude sont annualisés de façon à ne retenir que les redressements observés pour l’année de la fraude évaluée. Ceci conduit à une évaluation de la fraude TVA pour l’année 2008 comprise entre 7,1
milliards d’euros et 9,1 milliards d’euros
, ce qui représente entre 5,5 et 7% des 130 milliards d’euros de la TVA collectée la même année, résultat proche de l’évaluation précédente. Cette méthode, plus précise et qui va permettre de générer une série annualisée, fournit en revanche un résultat pour l’année n-3. La fraude TVA 2009 sera donc rendue publique en 2012.

2. Eléments chiffrés relatifs à la fraude détectée

L’année 2011 a marqué une progression très importante des niveaux de fraude détectée. En effet, tous organismes et services confondus, les montants de la fraude détectée au cours de l’année 2011 sont en augmentation de près de 16% pour un total de 3,864 milliards d’euros contre 3,333 en 2010. Dans le détail, les résultats de la fraude détectée au cours de l’année 2011 sont les suivants.

[Notes de bas de page]

(1) […].

(2) Entre 15,5 et 18,7 milliards d’euros, soit 6 à 7,5% des 251 milliards d’euros de cotisations sociales contrôlables versées en 2009.

Fin de citation […]

Voila comment un « artifice » administrativo-technico-statistique va permettre d’évacuer ce qui gène (tout en l’évoquant : Honneur aux rédacteurs !), à savoir, pour l’essentiel, la fraude des entreprises… Reste, donc, 3,864 Mds € de fraudes, soigneusement détaillées et abondamment illustrées d’exemples pédagogiques sur, principalement, la responsabilité des particuliers et des assurés (environ 40 pages sur 71 !)…

Le cœur des journalistes, sans doute distraits, ne reprendra que les, presque, 4 Mds € et n’auront pas vu les autres, presque, 25 Mds € ?!

Remarque amusante : Vous aurez remarqué que les montants évoqués pour la fraude sur les Cotisations sociales correspond presque pile-poil au « trou de la Sécu »…

Je vous laisse juges des conclusions à tirer de tout ça…

PS : En 2010 (dernières données disponibles) l’État a accordé aux entreprises 172 milliards d’euros de mesures dérogatoires (en gros, des exonérations) sur leurs impôts, taxes, charges sociales, etc... (C’est-à-dire, plus que le déficit budgétaire à la même époque !)
Rapport du CPO, si dessous (il n’est plus disponible sur le site de la Cour des Comptes ?!)

Bon, alors, je ne sais pas pour vous ? Mais, moi, si l’État me faisait cadeau de plus de 170 milliards d’euros, je n’aurai pas le cœur de le gruger de 25 milliards de mieux !


Synthèse du Rapport du CPO (Conseil des Prélèvements Obligatoires) - Octobre 2010
Le Conseil des prélèvements obligatoires a analysé, à la demande de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale , les « niches » fiscales et sociales applicables aux entreprises. L’objectif principal assigné à ce rapport est l’identification de pistes permettant de réduire les pertes de recettes représentées par ces
dispositifs dérogatoires pour les finances publiques.
Lire :

ENTREPRISES ET “NICHES” FISCALES ET SOCIALES Des dispositifs dérogatoires nombreux