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Afrique du Sud. Trois jours après le massacre, les grévistes menacés de licenciement

Publie le dimanche 19 août 2012 par Open-Publishing

L’exploitant de Marikana menace toujours de licencier les grévistes qui ne reprendraient pas le travail lundi matin : le bras de fer continue, en Afrique du Sud, trois jours après la tragédie : jeudi, 34 mineurs avaient été tués par la police. Les grévistes, qui réclament toujours de substantielles augmentations de salaires, semblent majoritairement prêts à rejeter cet ultimatum, en mémoire de leurs camarades tués.

"L’ultimatum final a été repoussé au lundi 20 à la suite des événements de jeudi", explique le porte-parole de Lonmin : "l’ultimatum final donne aux employés une dernière chance de reprendre le travail ou de s’exposer à un possible licenciement".

"Une insulte"

"S’attendre à ce que nous retournions au travail, c’est comme une insulte. Beaucoup de nos amis et collègues sont morts et on s’attendrait qu’on reprenne le travail ? Jamais !", s’emporte Zachariah Mbewu, assurant qu’aucun de ses camarades mineurs ne se présenterait à son poste lundi. "Il y a des gens en prison et à l’hôpital. Demain, on retourne sur la montagne mais on ne descend pas dans la mine, à moins que les patrons nous donnent ce qu’on réclame",.

400 euros par mois

La "montagne" est une petite colline proche de la mine où les mineurs s’étaient rassemblés au début de leur mouvement lancé le 10 aout, jusqu’à la fusillade de jeudi, qui a fait 34 morts et 78 blessés. "Nous attendons que la direction s’exprime. Demain nous ne reprendrons pas le travail s’ils n’écoutent pas nos exigences d’augmentation de salaire", poursuit Fezile Magxaba, un contremaître de Marikana.

Les mineurs, qui touchent en moyenne 4.000 rands (400 euros) par mois, réclament 12.500 rands (1.250 euros), soit plus qu’un triplement de leur salaire. "Des gens sont morts. On est en colère. Si on reprenait le travail, ce serait comme s’ils étaient morts pour rien", dit-il en faisant sa lessive à un robinet collectif.

Une enquête ouverte

Une enquête doit déterminer les circonstances exactes du déclenchement de la fusillade. La police affirme avoir agi en état de légitime défense face à des mineurs qui chargeaient, brandissant des machettes et des lances. Autour des misérables baraquements, les forces de l’ordre se faisaient discrètes ce dimanche. Les gens semblaient vaquer à leurs occupations quotidiennes, mais la colère restait vive.

Un ancien leader de l’ANC sur le front

Dans le pays, les commentaires politiques allaient bon train, accusant notamment le président Jacob Zuma d’avoir été passif tout au long de la crise. La vedette des journaux du dimanche était le jeune tribun populiste Julius Malema, soudain sorti de l’anonymat politique dans lequel il était tombé après avoir été exclu en avril de l’ANC, le parti au pouvoir, pour ses provocations répétées.

Samedi, l’ancien leader de la ligue de jeunesse de l’ANC s’est rendu auprès des mineurs et s’est adressé à eux, refusant toute forme de protection policière. Il a accusé le président Zuma d’être responsable du massacre et l’a appelé à démissionner.

"Julius Malema a saisi une opportunité et a exploité le massacre de Marikana en se présentant comme le seul leader capable de s’adresser aux mineurs armés et en colère", notait dimanche matin The Sunday Independant : "Pendant que le président Zuma arrivait à Marikana nuitamment, Malema a profité du vide pour sortir brutalement de l’obscurité politique où il était plongé".

Malema, qui n’a plus aucune structure politique autour de lui, a très longtemps incarné l’aile radicale de l’ANC. Insatisfait de voir le chômage, la misère et les inégalités s’aggraver 18 ans après la chute de l’apartheid, il appelait notamment à la nationalisation des mines et à l’expulsion sans compensation des grands propriétaires terriens blancs.

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