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Europe : chassé-croisé à gauche entre ouistes et nonistes

par LILIAN ALEMAGNA

Publie le jeudi 13 septembre 2012 par LILIAN ALEMAGNA - Open-Publishing
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D’un côté il y a les constants. Ceux qui diront « oui » ou « non » au traité européen de stabilité budgétaire comme ils étaient « ouistes » ou « nonistes » lors du référendum sur la Constitution européenne de mai 2005. Et de l’autre, il y a les changeants. Ceux qui en sept ans se sont rangés dans le camp d’en face. On les trouve à gauche. Avec quelques surprises...

Les écologistes remportent la palme du va-et-vient. Prenons leurs députés européens : l’ex-candidate à la présidentielle Eva Joly, « ouiste » convaincue en 2005, est très remontée contre le nouveau traité. « Je suis fédéraliste, mais en limitant le déficit structurel à 0,5% du PIB, on crée les conditions de notre propre récession, défendait-elle en août dans Libération. Le petit ajout sur la croissance que le Président prétend avoir obtenu n’est pas à la mesure des enjeux. »

A l’inverse, son collègue à Strasbourg José Bové a vite pris le pli de sens des « compromis » européens. Figure du « non » en 2005 aux côtés des communistes, de Jean-Luc Mélenchon et d’Olivier Besancenot, l’ancien syndicaliste de la Confédération paysanne se prononcerait pour le TSCG s’il avait à voter au Parlement français. « L’abstention, c’est pour les faux-culs, défend-t-il. Même si ce traité n’est pas la panacée, ne pas vouloir faire ce petit pas qui mène vers une mutualisation des dettes publiques, ce n’est pas bon. » 

« Eva voit la Grèce et elle se dit qu’on ne peut pas appliquer les mêmes recettes à toute l’Europe, explique Pascal Durand, le patron d’Europe Ecologie - Les Verts (EE-LV). José de son côté, par ses discussions avec Dany [Cohn-Bendit] a compris ce fonctionnement par étapes. »

Utilisé par les partisans du « oui » il y a sept ans, cet argument des « petit pas européens » est désormais rejeté par la majorité des parlementaires écologistes français pourtant favorables à la constitution européenne. « En 2005, je m’étais dit que c’était la dernière fois qu’on me vendait le fameux : "après cela permettra des avancées sociales et démocratiques" », fait valoir Jean-Vincent Placé. Le patron des sénateurs d’Europe Ecologie - Les Verts (EE-LV) aurait aimé un vrai « saut fédéral » avec plus de pouvoirs au Parlement européen et une « harmonisation fiscale » entre les Etats de l’UE. Mêmes explications chez son homologue à l’Assemblée, François de Rugy : « Ce texte est un héritage de Sarkozy. Je rejette l’idée même de ces traités qui nous disent comment on va équilibrer un budget. » « Ils sont tactiquement d’accord, déplore l’eurodéputé Yannick Jadot, c’est une manière d’utiliser l’Europe comme soupape de décompression dans les tensions qu’ils rencontrent avec les socialistes. »

Cazeneuve fait volte-face

Au PS justement, on a beau chercher un ex-partisan du oui prêt à voter contre le traité budgétaire, on sèche... En revanche, de fervents « nonistes » de 2005 – Laurent Fabius, Vincent Peillon, Arnaud Montebourg... – défendent aujourd’hui sans rechigner une adoption des nouvelles règles européennes. Le plus significatif étant le VRP du traité : Bernard Cazeneuve. Le ministre délégué aux Affaires européennes et proche de Fabius, aujourd’hui patron du Quai d’Orsay, avait planché en 2005 pour... le non ! Comme ses adversaires de l’époque, Cazeneuve explique aujourd’hui pour convaincre l’aile gauche du PS – invariablement contre les traités européens depuis celui d’Amsterdam en 1997 – qu’il « n’y a pas de plan B », qu’il ne faut pas être « dans la posture » et qu’un rejet du texte « affaiblirait l’action de François Hollande ». « Nous ne sommes pas en 2005. On est six mois après l’élection de François Hollande, défend le député de la Nièvre Christian Paul, lui aussi ex-noniste. Mais le problème n’est pas notre vote. C’est de mobiliser les Français sur la suite de la construction européenne. »

Au finale, avec une partie des écologistes et de l’aile gauche du PS, seuls les communistes et les amis de Jean-Luc Mélenchon campent sur un « non » ferme à un traité qu’ils qualifient d’« austéritaire ». Au Front de gauche, on place cette « bataille » dans la « continuité » de celle de 2005 (lire l’interview de Jean-Luc Mélenchon en édition abonnés). En observant ses ex-camarades en campagne, José Bové est moqueur : « Ils font une tentative de revival ».

http://www.liberation.fr/politiques/2012/09/12/europe-chasse-croise-a-gauche-entre-ouistes-et-nonistes_845541

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