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Vive la Sécu !

par Cialdella Michel

Publie le mardi 23 octobre 2012 par Cialdella Michel - Open-Publishing

Michel Cialdella
6, rue Joseph Bertoin
38600 Fontaine.
michel.cialdella 62p orange.fr
Fontaine, le 21 octobre 2012
Monsieur François Hollande
Président de la République française.
http://www.elysee.fr/ecrire/
55, rue du Faubourg Saint Honoré
75008 Paris

Monsieur le Président,
La presse rapporte que lors de votre intervention au congrès de la Mutualité française, vous avez plaidé pour une généralisation de l’accès des Français aux assurances complémentaires santé à l’horizon 2017. C’est-à-dire que pendant cinq ans encore ceux qui aujourd’hui renoncent à des soins ne pourront toujours pas se soigner bien que la Constitution française dans le préambule de 1946 annexé garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé. L’article 6 précisant que le Président de la République veille au respect de la constitution.(1)
Vous dites " quatre millions de Français ne bénéficient pas de couverture complémentaire maladie ". Cela montre l’inefficacité de la CMUC qui instaurait, en 2000, une structure pour les pauvres à l’intérieur de la Sécu destinée à être la même pour tous !
Vous dénoncez le risque, de laisser "le marché libre" de "sélectionner entre malades et bien-portants", "d’augmenter sans limites le coût de la couverture en fonction de l’âge". Mais ce n’est plus un risque puisque c’est déjà le cas aujourd’hui dans la plupart des mutuelles.
Souvenons-nous que la réforme du Code de la mutualité en 2001 ( à la demande de la Mutualité française ) (2) assimile assurances privées et mutuelles, ce qui rend complexe pour ces dernières la poursuite du principe de solidarité qui constitue leur fondement, puisque la concurrence s’avère exacerbée dans le domaine des complémentaires santé.
Souhaitez-vous vraiment l’accès aux soins pour tous ? Mais l’outil existe c’est la SÉCURITÉ SOCIALE.
Outil qui a fait ses preuves grâce notamment à quelques principes : Régime obligatoire, unique.
Cotisation sociale assise sur les richesses crées par les salariés.
On cotise selon ses moyens financiers et l’on reçoit selon ses besoins. Je rappelle que de taux de cotisation dite "patronale" (3) est figé pour l’Assurance Maladie depuis 1984 alors que pendant ce temps, le PIB a presque triplé en euros courants. Pire, les exonérations de ces cotisations représentent 30 milliards d’euros, nettement plus que le "déficit" de l’ensemble des 3 branches de la Sécurité sociale, sans résultat positif pour l’emploi.
La gestion par les intéressés (majoritairement des salariés) comme le souhaitaient ses fondateurs. Quand on voit comment les banquiers, les grands patrons gèrent les entreprises, les salariés ont tout intérêt à s’occuper de leurs affaires !
Aujourd’hui les mutuelles ( à leur corps défendant ? ) fonctionnent quasiment comme des assurances privées (concurrence, tarif en fonction de l’âge). En l’état elles ne sont pas une réponse efficace aux besoins de santé de la population. Pire elles contribuent à l’affaiblissement de notre système solidaire. Il est complètement scandaleux que l’État consacre de l’argent public (4 milliards selon vos dire) pour financer un système inégalitaire. Il y aurait 2000 mutuelles santé affiliées rien qu’à la Mutualité française (4). Est-ce que les salariés ont besoin d’autant de mutuelles ? Alors qu’en permanence on nous rebat les oreilles avec les coûts de fonctionnement de la Sécu qui sont 3 à 4 fois moindres que ceux d’une mutuelle ! N’y a-t-il pas là des sources d’économies ?
La Sécurité sociale favorise la productivité des travailleurs et c’est sans doute en partie grâce à cela qu’ils sont champions du monde dans ce domaine !
En ce qui concerne les dépassements d’honoraires, vous prétendez qu’ Il vaut mieux toujours un bon accord qu’une loi incertaine. Permettez que l’on préfère une loi républicaine qui interdise les dépassements et qui sanctionne en cas de non-respect. Ce qui n’est pas contradictoire avec une négociation pour établir une juste rémunération des médecins prise en charge à 100% par la Sécu. Il est établi que la gratuité d’accès aux soins est à terme source d’économie. Il faut également sortir du paiement à l’acte qui est inflationniste. Le paiement au forfait en fonction du nombre de patients est une piste à explorer d’autant qu’une majorité de nouveaux médecins souhaitent être salariés.
Une politique ambitieuse de prévention permettrait également dans un premier temps d’améliorer la santé de la population (songez à l’amiante) et à terme des économies. L’OMS nous informe que 40% des cancers seraient évitables.
Ces quelques observations montrent à l’évidence que vous faites fausse route.
Les premiers républicains disaient "vous n’êtes que nos mandataires, vous ne pouvez rien décider sans nous".
Et pourtant vous avez déjà décidé de faire passer le TSCG sans nous consulter il n’aura aucune légitimité, car en France, le souverain c’est le Peuple !
Je vous demande d’engager un grand débat sur la protection sociale.
Respectueuses salutations.

Michel Cialdella
ex-administrateur de la CPAM de Grenoble

(1) Site du Conseil constitutionnel http://www.conseil-constitutionnel.fr -
Le Préambule de la Constitution stipule « Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’homme et aux principes de la souveraineté nationale tel qu’ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu’aux droits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement de 2004 » Constitution révisée au 23 juillet 2008.
(2)M. René Teulade, alors président de la Fédération nationale de la Mutualité française, avait souhaité ce choix " osé ", selon l’expression de M. Lionel Jospin le 8 juin 2000 (discours d’ouverture du 36e congrès de la FNMF).
(3) En réalité les patrons ne sortent pas de leur poche les cotisations, car il s’agit d’une partie de la valeur ajoutée affectée aux organismes de Sécurité sociale (le salaire socialisé). C’est également vrai de la cotisation syndicale patronale qui est payée par l’entreprise.
Pierre Laroque qui fut directeur de la Sécurité sociale sous l’autorité d’Ambroise Croisat écrivait en 1946 « si l’on va au fond des choses, il n’y a pas de différence profonde entre la contribution de l’employeur et la contribution du bénéficiaire. En effet, la contribu¬tion de l’employeur est, en réalité, la contribution de l’entreprise. Et toute l’évolution économique et sociale d’aujourd’hui tend à asso¬cier les travailleurs à la gestion des entreprises et par là même doit les conduire à considérer que les deniers de l’entreprise sont en même temps les leurs, et que ce qui est versé par l’entreprise est versé par eux, ce qui est d’ailleurs, dans une certaine mesure, la vérité. Nous entendons ainsi réaliser le plan de Sécurité sociale sans rien demander au budget en demandant tout à l’effort des intéressés et des entreprises. »
(4) Alternatives Economiques dossier web n° 029, septembre 2008.