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Hans Küng : les critiques du théologien à Karol Wojtyla provoquent des polémiques en Allemagne

Publie le jeudi 7 avril 2005 par Open-Publishing

de M.DE C. * traduit de l’italien par Karl&rosa

Une voix qui ne fait pas chorus : dans l’univers des éloges démesurés et de l’apologétique internationale sur Karol Wojtyla, le théologien suisse Hans Küng s’est nettement distingué, provoquant de fortes polémiques dans les médias allemands. Küng - une des grosses têtes du Concile Vatican II, exclu en 1979 par le Saint Office qui lui révoqua la chaire et l’orthodoxie - s’est exprimé ces derniers jours dans l’hebdomadaire Der Spiegel, mais c’est son apparition sur la télévision publique "ARD", dans le populaire talk show de "Sabine Christiansen" qui a réveillé un nid de guêpes.

Küng a listé une série de contradictions de Wojtyla, en touchant d’abord le point crucial de la bataille du pape contre l’usage de la pilule anticonceptionnelle et en définissant "désastreuses" les conséquences de cette ligne dans les pays en voie de développement. "Jean-Paul II - a-t-il dit - est l’un des plus grands responsables de l’explosion démographique dans ces pays". La liste des plaintes exprimées par le théologien a concerné aussi l’attitude du pape polonais envers les femmes : "Grand admirateur de Marie - a-t-il poursuivi - Wojtyla prêche les idéaux féminins, mais en interdisant aux femmes la pilule et en leur refusant l’ordination".

Une objection liée à cette vision machiste de l’église, "Karol Wojtyla a propagé une figure sacerdotale masculine caractérisée par le célibat et il a été le principal responsable de la carence catastrophique de prêtres et du scandale de la pédophilie dans le clergé, désormais venu au grand jour". L’attaque à fond de Küng s’est poursuivi : "Le pape a pratiqué un nombre très élevé de canonisations, mais il a ignoré en même temps l’inquisition mise en œuvre vis-à-vis de théologiens, de prêtres et de membres d’ordres mal vus par l’Eglise".

Küng a cité des hommes et des femmes qui se sont distingués pour leur pensée critique et leur volonté énergique de réformes, "traités, au contraire, avec des méthodes propres de l’Inquisition" : Schillebeecks, Balasuriya, Boff, Bulànyi, Curran, Fox, Drewermann et aussi l’évêque d’Evreux, Gaillot et l’archevêque de Seattle, Huntington. "Dans la vie publique - a-t-il affirmé - manquent aujourd’hui des intellectuels et des théologiens de l’intelligence de la génération du Concile".

Egalement fortes les critiques envers la politique de Jean-Paul II dans les rapports œcuméniques : "Il a souvent et volontiers fait l’éloge du mouvement œcuménique, mais il a en même temps compromis les rapports avec les églises orthodoxes et avec les églises réformistes et il a évité de reconnaître leurs fonctionnaires et l’eucharistie. Il aurait dû aussi réduire le pouvoir excessif exercé par l’église sur les églises de l’Est et renoncer à l’installation des évêques catholiques dans les zones des Eglises russes orthodoxes".

En outre, le pape a "méprisé la collégialité du pontife avec les évêques décrétée au Vatican II", et des termes conciliaires comme "mise à jour, dialogue, collégialité et ouverture œcuménique" ont été remplacés par des mots comme "restauration, magistère, obéissance, re-romanisation".

Enfin, dit Küng, "Jean-Paul II a offert en 2000 une confession publique des pêchés pour les fautes de l’Eglise dans le passé, mais sans en tirer aucune conséquence pratique", en glissant sur "les intrigues des différents sièges de la Curie dans des affaires mafieuses et a contribué plutôt à occulter qu’à révéler des scandales et des crimes (Banque Vaticane, le "suicide" de Roberto Calvi, le meurtre qui a eu lieu dans le milieu du corps des gardes suisses). Le Vatican a été aussi extraordinairement vacillant avec le révélation des scandales de la pédophilie de membres du clergé, ".

Les remarques du théologien d’origine suisse ont provoqué un tollé en Allemagne, où le gouvernement - le ministre des Affaires Etrangères Joschka Fischer en tête - a fait officiellement ses condoléances à l’ambassade du Vatican à Berlin. Ainsi Der Spiegel, qui avait pourtant publié les thèses de Küng, a écrit que - alors que tout le monde pleurait le pontife disparu, Sabine Christiansen et ses hôtes sont entrés lourdement en scène en leur qualité de critiques de l’Eglise". Et il a ajouté : "Les catholiques allemands de gauche se sentent offensés pour le fait d’avoir perdu beaucoup d’influence dans ces derniers vingt-six ans à cause de la popularité débordante du pape". En remarquant après, paradoxalement, que c’était le président du conseil des Eglises évangéliques allemandes, Wolfgang Huber, "qui avait défendu le pape des critiques du catholique Hans Küng".

* Lettera 22

http://www.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/05-Aprile-2005/art61.html