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Goodyear Amiens-Nord, une action collective aux USA

par Lulu d’Aubrac

Publie le lundi 5 mai 2014 par Lulu d’Aubrac - Open-Publishing

Mercredi dernier, les avocats des salariés de l’usine Goodyear Amiens-Nord ont lancé une procédure contre Goodyear, le constructeur américain de pneumatiques, auprès du tribunal d’Akron (Ohio), ville où se situe le siège de la multinationale.
Cette action collective (« class action ») engage plus d’un millier de salariés qui accusent Goodyear de les avoir « exposés à des produits dangereux pour leur santé sans que les protections indispensables ne leur soient procurées » indique Me Fiodor Rilov, un de leurs avocats.
Elle vise à faire reconnaître le lien entre les HAP/CMR. (Hydrocarbures aromatiques polycycliques/Cancérigènes mutagènes toxiques pour la reproduction) utilisés dans la fabrication des pneus et les maladies professionnelles qui se sont déclarées ou qui pourraient se déclarer chez les anciens travailleurs de l’usine Goodyear d’Amiens-Nord (fermée en janvier dernier).
Ces produits présentent en effet des risques importants de cancers, d’affections respiratoires et cutanées. Plusieurs décès d’anciens salariés (dont l’implication des expositions aux HAP-CMR y a été reconnue par des médecins) sont à déplorer sans qu’aucun ne soit reconnu comme maladie professionnel. De même pour les retraités ou salariés malades.
En dépit du décret du 1er février 2001 relatif aux règles de prévention des risques CMR obligeant à fournir la liste des produits cancérigènes à la sécurité sociale et proposant d’autres possibilités de prévention telle que l’utilisation de ces produits « en vase clos » ou bien la mise en place d’une protection collective (par exemple, l’aspiration à la source des fumées dégagées par le mélange des HAP et de la gomme, le tout porté à 180 °C) et la dotation pour les opérateurs d’équipements de protection individuels, rien n’a été fait et ce malgré les demandes répétés des salariés et de leur représentants.
Pour Me Fiodor Rilov, « Goodyear aurait pu et dû remplacer ces produits très toxiques par d’autres non dangereux ou moins dangereux, ou bien, si ce n’était pas possible, diminuer leur quantité utilisée dans les process, mais elle ne l’a pas fait ».
D’autre part, l’avocat ajoute : "il semblerait, selon des informations qui viennent de nous arriver, qu’il y ait également de l’amiante en quantité massive sur le site, que les salariés ont été amenés pendant de très longues années à manipuler ».
Pour les avocats, cette procédure aux USA ouvre de nouvelles perspectives. Ils souhaitent le déplacement d’un maximum d’ex-salariés à Akron, afin qu’ils y témoignent.
Enfin, côté français, le tribunal correctionnel d’Amiens devrait examiner plusieurs plaintes, le 8 juin.
Dès 2006, Mourad Laffitte a suivi les salariés de l’usine Goodyear d’Amiens Nord caméra au poing et a filmé leur quotidien.
Après « Chronique d’une délocalisation annoncée », un documentaire qui relate la lutte de 1300 salariés de l’usine contre un plan de licenciements, il réalise en 2012« Good year, Mort en bout de chaîne » qui aborde le chapitre les conditions de travail de ces salariés et les risques sanitaires qu’ils
encourent.
Pour ce réalisateur, il était indispensable de s’intéresser plus précisément à ce scandale sanitaire partiellement évoqué dans le premier volet de le dénoncer.
Aujourd’hui, en effet, pour les centaines d’ouvriers, après les licenciements, plane un risque de maladies professionnelles graves dû à leur exposition prolongée à certains produits nocifs tels que les HAP-CMR utilisés dans la composition des pneus.
Éveiller les consciences et engager le débat sur le sujet sont les objectifs de ce documentaire. Il s’inscritdans une problématique plus large et tristement actuelle : désindustrialisation, liquidation de lamédecine du travail (les activités de protection et de prévention ainsi que la surveillance de la santé des travailleurs), démantèlement du code du travail…


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