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Austérité québécoise : Pour une critique du maelstrom néolibéral contemporain

par Samuel Beaudoin Guzzo

Publie le mardi 9 décembre 2014 par Samuel Beaudoin Guzzo - Open-Publishing

L’auteur est diplômé en sociologie à l’Université du Québec à Montréal. Il s’intéresse particulièrement aux divers enjeux auxquels sont confrontées les sociétés contemporaines notamment en ce qui a trait à la reconnaissance sociale, au dialogue culturel ainsi qu’aux conditions de la démocratie et de la justice sociale. On peut le suivre sur sa page Google+.

Illustration du maelstrom néolibéral contemporain !
Contestons les mesures d’austérité, misons sur le bien commun et décidons collectivement de l’avenir qui nous convient

Il y a quelques jours, je suis tombé par un pur hasard sur la petite revue « Savoir » du mois de juin 2014 de la « Fédération des commissions scolaires du Québec » (FCSQ) dans laquelle a été publié une entrevue avec le ministre libéral de l’éducation Yves Bolduc du gouvernement de Philippe Couillard. Je m’attendais avec tout mon optimisme (certains diraient ma naïveté) à y découvrir une entrevue classique du type question/réponse, mais mon désappointement fut grand lorsque j’ai constaté que le contenu du papier en question signé de la main de Marie Blouin, conseillère en communications à la FCSQ, arrivait hélas bien loin des attentes que je m’étais faites. Récit d’une déception et d’un mécontentement à l’égard de la contexte social actuel !

« Agir pour les élèves les plus démunis ! » tels sont les propos d’Yves Bolduc qui ont servis de titre à cet article pour le moins biaisé et subjectif dans lequel figure il est vrai quelques citations du valet à l’éducation de Monsieur Couillard. On y apprend entre autres que monsieur Bolduc a à cœur le succès des enfants et que dans cette optique, il a même la grandeur intellectuelle de miser sur les « bons coups » du gouvernement péquiste précédent en la matière ! Par ailleurs, comme le note l’auteure, le ministre de l’éducation considère que les commissions scolaires sont les chefs de fil du système d’éducation et qu’elles connaissent mieux que quiconque la réalité vécue par les élèves dans les diverses régions du Québec. De plus, on y apprend que le ministre se questionne grandement sur les actions les plus opportunes et pertinentes à mettre de l’avant afin d’appuyer, de stimuler et d’aider les élèves à réussir.

Avec tout ce qui s’est passé au Québec depuis le mois juin, je ne sais pas si madame Blouin a changé certaines des positions qu’elle avait à l’époque, mais je ne peux personnellement pas passer à côté de souligner ce qui m’apparaît comme un véritable excès de confiance envers le ministre et m’indigner des distorsions entre les dires de monsieur Bolduc et la réalité sociopolitique à laquelle nous assistons en ce moment qui est marquée par des mesures obsessives et nuisibles d’austérité. Les élèves (défavorisés ou non) au cœur des priorités ? Vraiment !? Avec toutes les coupures, que dis-je, les mutilations, dans à peu près toutes les sphères imaginables (aide aux devoirs, incitation à la lecture, services alimentaires...) sous prétexte de nécessité, j’en doute ! Il est illusoire de penser que les mesures actuelles n’auront pas d’incidence sur les élèves comme le défend le ministre de l’éducation. Je trouve désolant de vous le dire madame Blouin, mais vos « Yves Bolduc fera assurément ceci » et « Yves Bolduc fera très certainement cela » ne se sont pas avérés et c’est la population en général qui en paiera le prix à long terme.

Contrairement à ce que le gouvernement néolibéral au pouvoir veut nous laisser croire, c’est un mensonge éhonté qu’il n’y a pas d’argent au Québec ! Avec la somme colossale que le peuple québécois perd par année avec l’évasion fiscale et les choix économiques qui, dans les faits, vont contre le bien-être de la société, il n’y a pas d’argent parce que le gouvernement décide qu’il n’y en pas en concordance avec son idéologie simpliste et socialement pathologique ! Si l’on s’attaquait aux réels enjeux socio-économiques de ce monde au lieu d’aller fouiller dans le portefeuille des citoyens, ce qui est évidemment la solution la plus facile, on se rendrait compte que l’on ne manque pas de moyens au Québec !

À titre d’exemple, la tarification progressive dans les garderies pour laquelle le gouvernement vient tout juste d’opter est un choix certes implicite, mais pur et simple pour le privé. En effet, dans un contexte où les places en services de garde manquent, le gouvernement misera sans aucun doute pour des garderies privées à but lucratif pour lesquelles il n’aura pas à débourser un sou pour la construction des bâtiments au détriment des CPE (Centres de la petite enfance) où la qualité des services est supérieure, études à l’appui. Je trouve absolument scandaleux d’assister à une telle scène où la seule considération est celle de la rationalité économique qui prévaut sur la qualité des services que les enfants et les étudiants recevront.

Ce n’est certainement pas les coupures dans les programmes sociaux qui règleront les problèmes auxquels le Québec est confronté aujourd’hui. Dans l’optique néolibérale de l’obsession de la réduction de l’État et de la glorification des libertés individuelles par opposition aux responsabilités collectives, notre province serait certes économiquement plus "équilibrée", mais au prix de la multiplication exponentielle des injustices sociales diverses ; dommages collatéraux qui n’apparaissent tout simplement pas sur le radar de la droite québécoise.

Je conclurai en affirmant que M. Bolduc qui dit vouloir régler les problèmes des commissions scolaires - au « cas-par-cas » à la manière d’une entreprise - se méprend totalement sur la manière de le faire dans la mesure où sa philosophie anti-universaliste et les inflexions idéologiques socialement néfastes prises par le gouvernement auquel il appartient ne feront qu’envenimer la situation. Je considère qu’il est honteux de la part du gouvernement de faire payer la population - des enfants jusqu’aux personnes âgées - en raison de coupes soit disant "nécessaires" et "inévitables" ! Si les Couillard, Bolduc et Coiteux de ce monde se souciaient de l’avenir du Québec, ils s’attaqueraient aux problématiques contemporaines qui génèrent la souffrance et les iniquités en assumant ce que cela signifie en termes de choix de société !

Contestons les mesures d’austérité, misons sur le bien commun et décidons collectivement de l’avenir qui nous convient !

Source de l’image : https://cgcookie.com/blender/files/2011/12/maelstrom-foam.png