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Charlie Hebdo et les mensonges de Fourest...

Publie le mardi 13 janvier 2015 par Open-Publishing
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C’est dans les colonnes de Marianne que Sigolène Vinson, a souhaité rétablir la vérité odieusement altérée, en faisant le récit précis des faits...

"Il était parti pour me tuer, je n’ai pas baissé les yeux"

de Thomas Rabino

Sigolène Vinson appartient à la rédaction de "Charlie Hebdo". En charge de la chronique judiciaire depuis septembre 2012, cette jeune quadragénaire a grandi à Djibouti avant d’embrasser une carrière d’avocate qu’elle finit par délaisser, faute de pouvoir défendre les causes sociales qui lui tiennent à cœur, notamment les salariés victimes de licenciements abusifs. Elle était dans la salle de réunion au moment du carnage. Elle livre son témoignage à "Marianne", alors que le bouclage du "numéro des survivants" de "Charlie" est imminent.

« Des choses ont été dites qui ne sont pas exactes », confie Sigolène Vinson cinq jours après l’attaque par les frères Kouachi des locaux de Charlie Hebdo. « En lisant les propos que l’on m’a prêtés et qui ont été répercutés dans toute les presse, en France comme à l’étranger, j’étais folle… », poursuit la chroniqueuse judiciaire qui tient à préciser qu’elle « ne [revient] pas sur [sa] version pour [se] protéger. » Quelques minutes après le drame, Radio France internationale recueillait en effet la parole de la journaliste en larmes. Elle aurait alors déclaré que l’un des assaillants lui avait dit : « On ne tue pas les femmes, mais tu dois te convertir à l’islam et te voiler, avant de crier “Allahou Akbar”. » Assurant rapporter à son tour les mots de la jeune quadragénaire, l’essayiste Caroline Fourest, ex-collaboratrice de Charlie Hebdo, ajoutait : « Il lui a dit : “Récite le Coran, et je t’épargne” ». Ce que réfute aujourd’hui Sigolène Vinson. Tout comme l’injonction à porter le voile : « Je vois mal comment j’aurais pu réciter le Coran… »

Voici plus d’une heure que la conférence de rédaction de Charlie Hebdo a commencé lorsque les terroristes font irruption dans les locaux du journal. Très vite, l’un des tireurs entre dans la salle de réunion, demande « Qui est Charb ? », et lance : « Vous allez payer, car vous avez insulté le Prophète », avant de se mettre à tirer. « Au deuxième coup de feu, je me suis jetée à terre. Là, j’ai entendu les autres tirs, des rafales… J’étais au sol, j’ai rampé et j’ai senti que le type s’approchait. Il était au-dessus de moi et me braquait avec sa kalachnikov. Je l’ai regardé. J’ai vu sa cagoule, et son regard. D’abord, il avait l’air sûr de lui. Il était parti pour me tuer. Je n’ai pas baissé les yeux. Je l’ai regardé sans haine, peut-être sans peur, et j’ai vu son expression changer. Je ne saurais pas dire de quelle façon, mais il a changé. Soudain, il a perdu son aplomb. Il m’a dit : “Calme toi, n’aie pas peur.” Il l’a répété à plusieurs reprises. “Je ne vais pas te tuer.” »

« Peut-être qu’il a vu mon humanité et que ça l’a déstabilisé »

Malgré cette situation effroyable, « Sigo », comme l’appellent ses amis, arrive à garder une certaine présence d’esprit qui lui a sans doute sauvé la vie : « Je savais, au fond de moi, qu’il fallait que je continue à le regarder. Si je le quittais des yeux, il tirerait. Peut-être qu’il a vu mon humanité et que ça l’a déstabilisé. Les autres, mes amis, il ne les a pas regardés avant de les tuer. » Quiconque a déjà rencontré Sigolène Vinson connaît la vive intelligence, mais aussi le profond humanisme qui se dégage de ses yeux clairs.

« Il a continué : “Ce n’est pas bien ce que tu fais.” Dans l’instant, je me suis demandé : “Mais pourquoi est-ce qu’il me dit ça ? C’est très bien, ce que je fais.” Ensuite, il a poursuivi : “Ce n’est pas bien, mais je ne vais pas te tuer. Puisque je t’épargne, tu pourras lire le Coran”. Et il est parti, en répétant, plus fort : “On ne tue pas les femmes !” » Quelques secondes auparavant, l’assassin venait pourtant d’exécuter Elsa Cayat, psychiatre de profession, auteur de la rubrique « Charlie Divan ».

« Les corps inertes de mes amis gisaient autour de moi, et les blessés avaient besoin d’aide. J’étais en état de choc quand Patrick [Pelloux] et les secours sont arrivés, précise Sigolène Vinson. C’est peut-être pour cette raison que les premiers mots que l’on m’a prêtés ne reflètent pas ce que j’ai vécu. »

Sigolène se souvient en détail de ces funestes minutes. Et elle ne semble pas éprouver de difficulté particulière à en parler, parce que, dit-elle, elle est « bien entourée » : « La cellule psychologique, mes proches, et surtout mes amis de Charlie Hebdo. On est tous ensemble, tous solidaires. Et le fait d’avoir replongé dans le boulot aide beaucoup. »

http://www.marianne.net/Il-etait-parti-pour-me-tuer-je-n-ai-pas-baisse-les-yeux_a243824.html

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