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Licenciement à l’école de musique en pays de Pévèle

par collectif des professeurs de l’EMPP et les syndicats qui les représente

Publie le mardi 4 août 2015 par collectif des professeurs de l’EMPP et les syndicats qui les représente - Open-Publishing
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Licenciement à l’Ecole de Musique en Pays de Pévèle

Un début d’année scolaire mouvementé
L’Ecole de Musique en Pays de Pévèle (EMPP) est une structure associative qui œuvre dans la Pévèle, une zone rurale et résidentielle à quelques kilomètres de Lille dans le département du Nord. Elle donne des cours de musique à des élèves de tous âges. L’EMPP compte plus de 200 élèves et une vingtaine de professeurs.
L’EMPP est gérée par un conseil d’administration élu lors de l’assemblée générale des adhérents. Elle est actuellement présidée par Régis Warocquier. Il s’agit de l’ex D.R.H d’Heineken-Pelforth, Bonduelle, Damart et de la Voix du Nord. Il est également président de LAPIE (Libre Association de Protection des Interêts des Ennevelinois).
La présidence de Mr Warocquier, toujours en cours, a été marquée par de nombreux conflits aboutissant à des démissions ou licenciement(s). ( D. et G, professeurs, D., membre du CA...)
Premier épisode des évènements de cette année, la démission de la direction pédagogique de l’EMPP dans son intégralité le 5 Décembre 2014. Le directeur, Xavier Segers (technicien audiovisuel du département Arts de Lille 3) et Isabelle Mouvaux (chef d’orchestre de l’harmonie). En cause, notamment, l’intrusion du président dans la vie pédagogique, qui révisait à son gré la composition de l’équipe de direction.
Cette démission a servi d’accélérateur à une prise de conscience collective des professeurs. De nombreux dysfonctionnements étaient relevés, s’ajoutant aux malaises humains, à une ambiance délétère ou à des désaccords sur le sens de leur travail. Lors de sa prise de fonction, Mr Warocquier indiquait dans la Voix du Nord :

« C’est une mini entreprise qui accueille 250 élèves, emploie 19 professeurs et dispose d’un budget d’environ 200 000 E.(...)
La Voix du Nord du 28/09/2010 »

Si l’importance de la structure n’a jamais été niée, la comparaison entre une association et une entreprise a de quoi faire frémir les musiciens qui y travaillent. On a pas connaissance d’une école de musique qui produise de la richesse autre qu’une richesse culturelle qui échappe, par nature, à toute gestion entrepreneuriale.

La création d’un collectif de professeurs
Des professeurs ont discuté entre eux. Cette discussion a aboutit à la rédaction d’un courrier adressé le 5 Mars 2015 au CA et aux parents d’élèves signé « collectif des professeurs ». Ce courrier était signé par 19 des 21 professeurs.
Le collectif pointait du doigt l’absence d’adhésion des professeurs aux projets du CA pour l’EMPP.
A titre d’illustration, l’année 2015 voyait la célébration des 10 ans de l’association. Des festivités avaient été prévu. La totalité des professeurs avait élaboré un projet. Celui-ci a été purement et simplement ignoré par le CA qui a choisi d’organiser un événement ne correspondant pas aux souhaits de l’équipe pédagogique. Le CA a ensuite utilisé l’organisation cette festivité pour exercer un chantage sur les professeurs qui seraient « tenus responsable d’un éventuel fiasco de la journée du 30 Mai, fiasco qui serait épouvantable en terme d’image pour l’école ».
Les professeurs s’inquiétaient d’une dévalorisation des examens en faveur de cet événement.
Le CA souhaitait mettre en place des primes différenciées en valorisant les professeurs dirigeant un atelier de pratique collective. Ce qui excluait de fait de toute valorisation salariale les professeurs ne dirigeant pas d’atelier.
Le collectif s’inquiétait d’une possible disparition de l’orchestre d’harmonie, il exprimait la sensation d’une remise en cause des compétences des professeurs et dénonçait une gestion humaine qui consiste à organiser des réunions par groupes de professeurs, à les monter les uns contre les autres afin de les diviser et rendre indispensable une gestion extérieure.
Enfin, le collectif appelait à une démission du CA. Cette démission aurait, nécessairement, débouché sur l’organisation d’une Assemblé Générale Extraordinaire qui aurait permis de mettre les choses « à plat » et de changer l’équipe du CA, ou même de la reconduire.
Afin d’accentuer la pression et pour montrer leur mécontentement, le collectif a choisi de retourner la tentative de chantage du CA contre lui en refusant de participer aux 10 ans de l’association. Il espérait fortement que la situation soit débloquée avant, afin de ne pas priver les élèves d’un événement musical fort.

En réponse à ce courrier, le CA a convoqué une réunion le 19 mars invitant uniquement les parents d’élèves, les professeurs ayant été convoqués à une date ultérieure, le 26 mars. Date à laquelle, bien entendu, tous étaient au travail : les professeurs de musique travaillent le soir et dans plusieurs structures.
Les parents d’élèves présents ont rapporté l’atmosphère extrêmement tendue de cette réunion. Le président monopolisant la parole et ayant un usage fortement agressif de celle-ci, empêchant, de fait, toute possibilité de dialogue à l’aide d’une forme de domination toute particulière, celle de l’homme, blanc, patron, imbus de son pouvoir.
Le CA reconnaissait avoir souhaité « mettre son nez » dans les examens :

« L’indulgence aux examens a effectivement été évoquée en CA mais pas en terme d’indulgence ! (synthèse de de la rencontre du 19 mars, rédaction : CA) »

Le CA reconnaissait avoir attribué sous forme de temps une augmentation au professeur de l’un des ateliers. Il mettait en balance le doublement du nombre d’heure d’un autre atelier « deux saisons » auparavant.
Ces deux modulations horaires étaient sans rapports entre elles. La première étant liée à des procédés et des particularités de l’atelier, la seconde à l’augmentation du nombre d’élèves et à la création d’un second atelier. Cette mise en parallèle ne visait qu’à opposer les professeurs et à susciter de la défiance. Que cela ait été volontaire ou non, cela illustre le mode de fonctionnement de l’administration de l’association.
L’utilisation du terme « saison » au lieu « d’année scolaire » démontre également assez bien l’usage qui est fait de l’école. Les professeurs parlent d’année scolaire, eux.
Le CA promettait le maintient de l’orchestre d’harmonie, s’appuyant sur sa complémentarité avec un orchestre symphonique inexistant.
S’ensuivait ensuite une litanie de lamentations conclue sur la pseudo-stupéfaction de Régis Warocquier (le courrier était signé « avec le CA Régis Warocquier ») de voir la publication d’un article dans la Voix du Nord (d’un article) sur la discorde au sein de l’EMPP.
Vous l’aviez oublié ? Régis est l’ancien DRH de la Voix du Nord...

Une pétition des parents d’élèves
Le 25 Mars, les parents d’élèves ont demandé à rencontrer les professeurs pour discuter avec eux. Au sein d’une association, ce sont les membres qui décident en élisant leurs représentants qui sont leurs exécutants.
Suite à cette réunion, les parents présents ont émit le souhait d’organiser une assemblée générale extraordinaire afin de mettre en débat collectivement, avec l’ensemble des adhérents et les professeurs, les difficultés qui étaient désormais devenues sensibles et, éventuellement, de procéder à une nouvelle élection d’un C.A si la nécessité s’en faisait sentir après concertation.
Afin de relayer cette demande, les parents ont demandé aux professeurs de transmettre ce souhait auprès des parents d’élèves et élèves majeurs adhérents de l’association sous la forme d’une pétition. La majorité des adhérents (96 sur 176, certains adhérents n’ayant pas souhaité se prononcer, d’autre désapprouvant cette demande) ayant soutenu le principe d’une AG extraordinaire, la demande a été transmise au CA le 7 mai 2015.

Le CA contre-attaque
Le 18 Avril, Régis Warocquier envoie une lettre d’observation en recommandé aux professeurs signataires de l’appel. Dans ce courrier il invite par deux fois les professeurs à la démission :

« En conséquence, si en votre qualité d’enseignant salarié vous ne partagez pas la politique et les décisions du Conseil d’Administration, il vous appartient, dés lors, d’en tirer toutes les conséquences personnelles sur votre présence en cette qualité au sein de l’Association. (…)
Nous vous invitons, si vous estimez ne plus partager les décisions du Conseil de l’Association, ses choix ou l’orientation qu’il entend donner à l’Association de suivre l’exemple de certains démissionnaires qui ont su tirer les conséquences de leur absence d’adhésion aux décisions et orientations prises par le Conseil (Il s’agit des démissions de la direction pédagogique). »

Le 30 Avril, Régis Warocquier envoie un mail d’avertissement disciplinaire aux professeurs afin d’accentuer la pression sur eux.
Le 5 Juin 2015, Régis Warocquier envoie aux parents d’élèves et aux professeurs un courrier les informant de la désignation d’un nouveau directeur pédagogique, Frédéric Candeille. Il annonce dans le même courrier la suppression de l’orchestre d’harmonie, entrainant de fait la mise au chômage technique de son chef. Il donne enfin la date de l’assemblé générale ordinaire, en Octobre 2015. La demande d’AG extraordinaire est purement et simplement ignorée.
Indignés, des parents d’élèves répondent au président et transmettent leur courrier aux élus de la Communauté de Commune de Pévèle Clérambault : Jean-Luc Tavernier, son président et Benjamin Dumortier, le vice président en charge de la culture.
Les parents s’étonnent en outre que l’AG, se tenant habituellement en Juillet, soit repoussée au mois d’Octobre. Ils s’interrogent ouvertement de savoir si le souhait du CA n’est pas de voir les professeur partir et les parents d’élèves en désaccords quitter l’association. Enfin, lorsqu’ils s’inquiètent du pourrissement de la situation et de la surdité du CA face à la demande des adhérents, il leur est répondu :

« Vous restez bien sûr libre de ne pas accepter ces explications et de ne pas valider votre préinscription... ».

 
Cordialement, A.S.B
(Ce que la plupart des parents ignorent, c’est que A.S.B n’est autre que la fille de Régis Warocquier.)

La situation s’enlise
Abasourdis, les parents signataires organisent le 10 Juin une nouvelle réunion afin de savoir que faire et d’organiser la riposte. Il est décidé de porter plainte en référé et des parents proposent un boycott des inscriptions. Cette proposition faisant l’unanimité, il est demandé aux professeurs de relayer cette action auprès de l’ensemble des parents d’élèves.
Le 15 Juin, Régis Warocquier envoie une nouvelle lettre. Une longue introduction pleine de sous-entendus complotistes :

« Lorsque les véritables raisons des démissions constatées pourront enfin être données, et lorsque les vraies raisons de l’acharnement constaté pourront enfin être livrées, alors sans doute la sérénité reviendra dans notre école.
Il répond à la demande d’AG extraordinaire en prétendant que la majorité n’était pas réunie. Il accuse certains parents de ne pas avoir payé leur inscription (en Juin...) et juge que :
les conditions ou les méthodes employées pour obtenir des signatures ne sont que peu louables et acceptables. »

Il semblerait que non content de diriger plusieurs associations dans la Pévèle, Régis Warocquier souhaiterait également expliquer aux personnes en désaccord avec lui, comment faire et leur donner des leçons.
Il insiste à nouveau sur l’identification de l’EMPP à une entreprise, conclu avec un peu de misérabilisme et un appel au départ des dissidents :

« confondre présidence et dictature », « son attitude, ses prises de décision menacent la pérennité de l’école », « pratiques du CA discutables ». Je voudrais dire simplement qu’il est bien entendu absurde de penser des choses pareilles et que ces écrits diffusés m’ont particulièrement blessé ainsi que ma famille et mes amis du CA. (…)
Alors oui, s’il faut en arriver là, que les professeurs qui ne souhaitent pas adhérer aux projets de l’école, la quittent, et que les parents qui n’ont plus confiance envers leur CA la quittent, comme ils l’ont dit. Nous sommes sûrs que les uns et les autres trouveront alors la sérénité dans une structure qu’ils préféreront.

Eparpillement
La désignation d’un nouveau directeur, Frédéric Candeille, répondait à la vacance du poste. Mais elle soulève également de nouveaux problèmes.
Son recrutement n’a pas été fait dans les règles de la convention collective.

En cas de vacance ou de création de poste, l’employeur, avant de procéder au recrutement nécessaire, informe le personnel, par note interne, dont un exemplaire est affiché.
S’il s’agit d’un nouveau poste, sa description est jointe à l’annonce de la vacance, et le groupe de classification est indiqué.
Les candidatures internes répondant aux conditions requises sont étudiées en priorité.
Une réponse écrite et motivée est donnée si elles ne sont pas retenues.
Les candidatures externes répondant aux conditions requises sont alors étudiées.
(convention collective nationale de l’animation du 28 Juin 1988)

Aucune note n’a été transmise au personnel. Aucun affichage n’a été effectué et donc, si peut-être une candidature interne avait été étudié, l’ensemble des employés de l’EMPP n’y avait pas accès.
Ce que le CA ignore, c’est que les professeurs connaissent d’autres professeurs dans la région. Ils ont eu vents des procédés de recrutements de Régis Warocquier par l’un d’entre eux.
C’est ainsi qu’ils ont appris que la gestion de la crise, c’est « s’il ne sont pas content, qu’ils dégagent ». Ils ont également su que le recrutement n’avait pas été une partie de plaisir puisque ce même collègue avait été recontacté par Régis Warocquier pour qu’il « se dépêche de donner (sa) décision parce que je vais me retrouver le cul dans l’eau ». Bien entendu, ce collègue a refusé le poste et a fait passer l’information autour de lui quand à ce curieux recrutement (et c’est de cette façon que nous avons été au courant).
Frédéric Candeille serait auto entrepreneur d’une société de production. Il aurait donné quelques cours particuliers, mais semble inconnu des différents conservatoires de la région, dont sont issus les professeurs.
Le Lundi 22 Juin, il envoie un mail aux professeurs pour leur proposer une réunion le Jeudi 25 au soir, en pleine période d’ examens et de remises de prix dans les divers établissements où ils travaillent. Bien entendu, ils ne peuvent pas s’y rendre et le lui font savoir. Il réitère par la suite, toujours dans les mêmes conditions. Quelques professeurs parviennent tout de même à le croiser. Le 1er Juillet, en raison du peu de disponibilité des professeurs, certains n’ont même pas eu le temps de prendre connaissance des ces envois, Frédéric Candeille envoie un message menaçant :

Je vous demanderai donc de me transmettre vos disponibilités de la fin de cette semaine et celles de la semaine prochaine le plus vite possible, car dans le cas contraire, il serait dommage de commencer notre collaboration par des convocations.

Le 3 Juillet, il envoie un projet pédagogique qui est en partie le copié collé du projet pédagogique d’une autre école.

Licenciements
Le 16 Juillet 2015 8 professeurs reçoivent jour après jour un courrier les convoquant à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave, accompagné pour au moins un d’entre eux d’une mise à pied.
Les professeurs, absents ou travaillant dans d’autres régions pendant cette période de congé, répondent à ce courrier afin de demander un report de cet entretien à une date où ils sont présents.
Le 24 Juillet, un premier professeur reçoit en guise de réponse à sa demande de report une lettre de licenciement.

Et maintenant ?
La question du devenir des huit professeurs reste entière. Le collectif entend évidemment contester ces licenciements. Il songe à saisir les prud’hommes où Mr Warocquier est déjà bien connu (il a notamment perdu le dernier procès intenté par un ex-professeur de l’EMPP).
Que vont devenir les élèves de ces professeurs ? La relation professeurs/élèves est toujours une relation forte. Un changement brutal d’enseignant est presque toujours synonyme d’abandon.
Quelle image l’EMPP envoie-t-elle à la population qu’elle doit servir ? Aux instances démocratiques qui soutiennent financièrement et matériellement son action et sans lesquelles elle ne saurait oeuvrer et rayonner comme aujourd’hui ?
Si de nouveaux professeurs venaient à être recrutés, la collaboration avec eux serait forcément problématique. Quelle image leur C.V renverra-t-il à leur(s) futur(s) employeurs, leurs futurs collègues quand ils devront expliquer avoir pris la place d’un salarié renvoyé par un CA autoritaire ?
Le collectif des parents et des professeurs exige la réintégration immédiate des professeurs révoqués, le maintien de l’orchestre d’harmonie et le respect de la demande des adhérents d’une assemblée générale extraordinaire.
Le collectif des professeurs attend du nouveau directeur pédagogique qu’il prenne position en défendant les professeurs et la continuité pédagogique mise en péril par les agissements du CA.

Le collectif des professeurs de l’EMPP et des adhérents.

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