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À PLATES COUTURES !

par Ernest London

Publie le dimanche 4 octobre 2015 par Ernest London - Open-Publishing

L’auteure, Carole Thibaut, est allée à la rencontre des ouvrières de l’usine Lejaby, suite à la fermeture de l’usine. Elle a écoutée ces femmes pour rapporter leurs paroles. Le ton est toujours juste. Sans jamais sombrer dans le pathos, elle parvient à rendre compte de la disparité de leurs prises de conscience, « parce que si tu luttes, tu n’es peut-être pas sûr de gagner mais si tu renonces, tu es sûr de perdre ».
On les voulait « salariées » ; elles redeviennent, sous nos yeux, « ouvrières », terme sali à dessein pour ne plus servir leur conscience de classe mais qu’elles se réapproprient en même temps que leur fierté !

Par leur voix, on comprend la course inexorable vers plus de profit qui va les broyer. Elles sont payer 8,38 euros bruts de l’heure pour fabriquer un soutien-gorge en 9 minutes 37, lequel sera vendu 50 euros ! Elles nous expliquent l’annonce cynique, après le rachat par un gros groupe du luxe, de la délocalisation annoncée pour ne conserver que 8% de la production en France, puis le renvoie de tous les dirigeants pour conduire l’usine au déficit qui rendra le plan social inévitable et enfin, la liquidation anticipée pour éviter de l’appliquer, pour ne pas payer les primes négociées. La démonstration est foudroyante. On comprend tout parce qu’elles ont tout compris !
Les quatre femmes sur scène racontent leur dignité. Quatre personnages qui nous livrent leur intimité. Cette polyphonie rend compte de la variété des ressentis et de la puissance collective face aux inévitables doutes individuels.
L’interprétation est remarquable, sans fausse note. Les parties chantées, avec brio, rythment les différentes séquences de ce reportage intimiste. Les clichés sont toujours soigneusement évités. Même les chants de lutte sont écrits sur des airs du top 50.
Les comédiennes et le comédien qui endosse tous les rôles masculins, plus ingrats les uns que les autres, sont toujours justes, en équilibre mais juste.
La visite de l’homo politicus, par exemple, ne cède pas à la tentation de l’imitation. On reconnaît certaines expressions qui ont pu être réellement prononcées lors d’une visite présidentielle mais l’interprétation sait dépasser l’anecdote et rendre le propos universel.

Le texte, nourri aux leçons d’économie dessinée de Philippe Squarzoni, est remarquable. Il évite soigneusement tous les pièges, toutes les maladresses. L’auteur a su se nourrir des témoignages des ouvrières d’Yssingeaux tout en conservant une distance critique, une dose juste d’empathie.

Dans la grande tradition du théâtre engagé et chanté.

Ernest London,
le bibliothécaire-armurier.

À PLATES COUTURES !
par la compagnie Nosfératu.
http://www.compagnienosferatu.fr/-A-plates-coutures-.html

Parce qu’il faut d’abord comprendre le monde pour pouvoir le changer,
Parce qu’il faut tirer les leçons des luttes passées pour s’en inspirer, pour n’en pas renouveler les erreurs, pour prendre le meilleur dans tout,
Parce qu’il faut sans cesse se battre contre la bêtise, la haine, l’injustice, la barbarie,
Parce qu’il faut des armes pour se battre,
Parce qu’on a déjà perdu, si on renonce,
Voici, en permanente construction, une bibliothèque de références pour ceux qui souhaitent nourrir leur culture politique, analyses et comptes rendus de lectures utiles.
Les livres sont des armes.
Les spectacles aussi sont des armes.
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