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CONTRE LE FASCISME : COLLABORATION OU RESISTANCE ?

par Robert SAE

Publie le jeudi 23 mars 2017 par Robert SAE - Open-Publishing

Parmi ceux qui annoncent leur intention de voter pour Marine Lepen, on compte des ouvriers licenciés, des chômeurs non indemnisés, des artisans et des agriculteurs ruinés, des afro-descendants ressortissants de territoires colonisés par la France. Pourtant, cette dame qui, personnellement fait partie de la minorité des très riches, dirige un parti politique d’extrême droite dont le racisme, la xénophobie et la corruption sont incontestables. Comment comprendre cette contradiction ?

Avant de répondre à cette question, rappelons les principaux arguments développés par « l’électorat populaire » du Front National pour se justifier.
 Premièrement, la candidate du FN serait « la seule à dire la vérité » : elle dénonce les méfaits de l’Europe qui viole la souveraineté des peuples et la corruption qui gangrène la classe politique.
 Deuxièmement, « Tous les autres partis ont échoué, il faut l’essayer pour voir si elle ne fera pas une autre politique, surtout en ce qui concerne l’invasion des immigrés responsables du chômage et de la délinquance dans le pays ! »
Concernant le premier argument, il n’est pas besoin de démontrer que de nombreuses autres forces politiques et sociales, opposées au FN, non seulement, dénoncent la dictature des institutions Européennes mais, plus encore, sont celles-ci qui luttent concrètement sur le terrain contre les effets désastreux de la politique de saccage social imposées par les dites institutions. La vérité sur la corruption ! Proportionnellement, le Front National est le parti français qui a le plus d’élus poursuivis ou condamnés pour des affaires de corruption ! Quant à Marine LEPEN, elle-même, elle serait bien en peine de révéler l’origine et l’étendue du patrimoine de sa famille qui fait partie des privilégiés du système. Cet argument, en réalité, sert à se donner bonne conscience, car il est difficile d’avouer qu’on avalise des thèses racistes et xénophobes.
Le deuxième argument est significatif à cet égard. Force est de constater que dans les villes dirigées par le Front National, à part des mesures mesquines pour attiser la haine contre les étrangers, rien n’a été initié pour mettre fin aux inégalités sociales et pour améliorer concrètement les conditions de vie de la population. Rien dans le programme du FN n’annonce son intention d’éradiquer la dictature des banques et des multinationales. En tout état de cause, il serait absolument surréaliste de mettre en jeu l’avenir de sa famille et de son pays en misant sur un candidat comme on le ferait au casino dans l’espoir de gagner le gros lot !
Ce que révèle, avant tout, le développement d’un électorat pro-FN au sein des couches populaires, outre le dégoût pour les partis qui se sont succédé au pouvoir et qui ont toujours trahi leurs engagements, c’est que les classes dominantes ont réussi à manipuler l’opinion et à diviser les opprimés pour enfreindre la construction d’une force capable de les renverser.
Aussi, pour ceux qui veulent conjurer les dangers de fascisme et de guerre, pour ceux qui aspirent à jeter les bases de la construction d’une société plus équitable et plus solidaire, le devoir et l’urgence commandent de déconstruire les préjugés et les mystifications propagés par l’extrême droite.
 En premier lieu, le prétendu lien entre l’immigration et le développement du chômage doit être démenti. C’est principalement la politique néolibérale et d’austérité imposée par les dirigeants européens y compris français qui est génératrice de chômage et de précarité. L’arrivée de l’extrême droite au pouvoir ne changerait strictement rien à cet égard. D’autre part, loin d’être un poids pour l’économie française, les immigrés en sont un levier important et indispensable, par les richesses qu’ils créent et par le poids de leurs cotisations dans le financement de la protection sociale.
 Ensuite, il faut dénoncer l’amalgame entretenu par l’extrême droite entre délinquance et immigration. Qui pourrait honnêtement contester que les membres des communautés et les habitants des quartiers stigmatisés, dans leur immense majorité, sont de simples personnes qui ne cessent de se battre pour survivre dignement et que ce sont, elles-mêmes, les premières victimes de la délinquance. Les auteurs d’actes criminels et délictueux sont des minorités qui viennent autant de communautés immigrées que de la population française de souche. Une chose est indéniable : seule la solidarité entre toutes les victimes du système, quelle qu’en soit l’origine, leur permettra de mettre fin aux violences économiques et aux discriminations qu’elles subissent - dont les classes dominantes et leurs gouvernements sont les premiers responsables - et d’améliorer ainsi leurs conditions de vie.
En popularisant massivement les explications permettant de comprendre les causes réelles des problèmes et d’identifier les vrais ennemis, il est possible d’éveiller la conscience et l’humanisme qui sommeillent assurément chez toutes ces victimes du système qui, par désespoir, se tournent vers le Front National et qui, sans s’en rendre compte, en votant pour ses dirigeants, participeraient à l’instauration d’un régime fasciste.
Les Hitler et autres Mussolini, eux aussi, avaient prétendu mettre fin au chômage et à l’insécurité en organisant la chasse aux étrangers, en diabolisant une religion et ses adeptes, en s’autoproclamant, tout comme le Front National, seuls défenseur du peuple en souffrance. Eux aussi ont été portés au pouvoir par des couches populaires qui avaient succombé au chant des sirènes. Nous en connaissons tous les conséquences. Est-il concevable que, par insuffisance de réflexion, en son âme et conscience, un ouvrier licencié, un chômeur non indemnisé, un artisan ou un agriculteur ruiné, un afro-descendant ressortissant de territoire colonisé par la France, alimente le risque que se renouvelle de telles tragédies ?
Dans le contexte chaotique actuel où le danger fasciste se précise, deux voies se distinguent : celle de la collaboration et celle de la résistance. A chacun et à chacune de choisir celle qu’il empruntera !