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Réaction à l’article de Colombani qui assimile le NON de gauche au NON Lepeniste

Publie le jeudi 26 mai 2005 par Open-Publishing
10 commentaires

de Sergio

Article paru ce jour dans le Monde du 26 mai 2005

Il fallait oser et Jean - Marie COLOMBANI l’a fait. Il a franchi, d’une certaine façon le Rubicon. Assimiler et donc faire croire à ses lecteurs que le NON de gauche est assimilable au NON de droite et pis, au NON d’extrême droite et faire accroire que le NON de gauche est un NON de repli, un NON identitaire, nationaliste, voire xénophobe et raciste. J’entends déjà les media, dimanche soir si le NON l’emporte de peu et avec une participation faible. Le grand vainqueur, Le PEN. C’est révoltant de la part de ce quotidien mais nullement étonnant.

Si le NON l’emporte, alors il faudra faire comprendre aux grands media que leur matraquage n’aura servi à rien. Mais il faudra leur signifier, d’une façon ou d’une autre que dans ce champ là aussi, se dessinera une reprise en main citoyenne, une reprise en main de l’information PAR TOUS et POUR TOUS.


Editorial : Illusion du non, par Jean-Marie Colombani

de Jean-Marie Colombani

Tout laisse à penser que la France s’apprête à rejeter la première Constitution de l’Union européenne, qu’elle a elle-même demandée, négociée et, en grande partie, écrite de la plume de son ancien président, Valéry Giscard d’Estaing. Le refus de ce texte, pourtant de nature à améliorer substantiellement la position relative de la France en Europe, serait, pour les Français, un vote d’illusion et de désillusions.

L’illusion est double : croire que l’on sanctionne le pouvoir, et lui seul ; faire croire que le non va permettre de changer l’Europe. Le vote-sanction s’est déjà exprimé lors des élections régionales, puis européennes. Le gouvernement est resté en place, soutenu par la majorité élue en 2002 pour cinq ans.
Désavouer le président peut certes provoquer un certain soulagement, comme tout cri de colère.

Mais ce désaveu - le chef de l’Etat n’ayant aucune intention d’imiter le général de Gaulle au soir du référendum perdu d’avril 1969 - ne règle rien. En tout cas pas dans l’immédiat le problème principal de l’économie et de la société françaises : le chômage de masse. Il risque en outre de retarder, ou de renvoyer aux calendes, la prochaine alternance, car la gauche sort profondément et durablement divisée de cette campagne.

Une partie de celle-ci, emmenée par Laurent Fabius, a "objectivement" (comme aurait dit Georges Marchais) donné la main à Jacques Chirac, dont il ne faut pas oublier qu’il a choisi le référendum parce qu’il était une arme pour diviser les socialistes. Cette gauche-là a gagné la bataille médiatique en accréditant l’idée que le non est de gauche, quand toute l’Europe progressiste et syndicale vote oui. Qu’on le veuille ou non, elle légitime ainsi un populisme de gauche : elle s’est en effet ralliée à l’idée "droitière et xénophobe" (comme l’a écrit Jürgen Habermas dans Le Nouvel Observateur) selon laquelle "l’abolition des frontières entraîne des conséquences sociales indésirables" que l’on pourrait éviter par un repli sur l’Etat-nation. Or chacun sait que la seule capacité de l’Etat-nation, seul, ne suffit plus depuis longtemps à faire pièce aux conséquences de la mondialisation.

L’idéologie qui porte le non - et que mesurent les sondages : les partisans du non sont ceux qui estiment très majoritairement que l’on en fait plus pour les autres Européens que pour les Français - est bien davantage souverainiste que de gauche.

Au reste, pour le chef de file du non à gauche, Laurent Fabius, cette évolution n’est guère surprenante : il était logique et cohérent qu’un jour ou l’autre l’homme qui s’était distingué en assurant que Le Pen posait "les bonnes questions" finisse par donner sur un sujet décisif la même réponse que Le Pen. Les Français, dans notre sondage, désignent par avance ce dernier, avec Philippe de Villiers, comme le vainqueur du scrutin : il n’en demandait par tant ! L’illusion est aussi de croire que voter non permettra de changer l’Europe, de donner naissance à une Europe qui, grâce au non français, réglerait les problèmes français sans que l’on sache très bien ce que l’on voudrait qu’elle soit.

De Villiers nous fait croire que nous allons aussitôt signer un nouveau "pacte des nations européennes" et Fabius que le non n’empêchera pas l’Europe de continuer ! Mais alors pourquoi se priver d’un texte - le projet de Constitution - qui rend possible des progrès qui ne le seront pas sans lui. Et comment imaginer que les pays qui ont déjà ratifié cette Constitution accepteraient de la renégocier du seul fait qu’il existe, au sein du "shaker" français du non, quelques leaders qui assurent se réclamer de l’Europe et voudraient que celle-ci aille plus loin ? Ce serait évidemment une prime à tous ces partis - des agrariens polonais à la Ligue du Nord en Italie - qui jugent au contraire que l’Europe est déjà allée trop loin.

A ces illusions, le non français ajoutera son lot de désillusions. Celles-ci naîtront inévitablement du fait que personne, ni en Europe, ni en France, n’entend conduire une politique de rupture avec le capitalisme. En posant l’équation Europe = libéralisme = délocalisations = chômage, les partisans du non qui se réclament de la gauche ont usé de cette consigne de vote comme d’un substitut au mot d’ordre des années 1970 de "rupture avec le capitalisme". Même si Laurent Fabius continue de se dire "réformiste", cette ligne est au fond celle de tous ceux qui, à gauche, n’ont pas accepté le tournant de 1983, celui de l’acceptation par la gauche de gouvernement, de l’économie de marché. Ceux-là oublient simplement que le handicap économique des pays européens de l’ex-Empire soviétique résulte précisément de ce qu’ils ont été privés de l’économie de marché pendant la seconde moitié du XXe siècle.

La désillusion viendra aussi pour ceux qui, croyant avoir donné un coup d’arrêt à l’Europe libérale, vont devoir rapidement constater que celle-ci continue, en effet, mais désormais privée des instruments que crée la Constitution pour lui offrir des garanties sociales ; ils vont devoir se résoudre à ce que la voie soit désormais rouverte à une Europe conçue comme une simple et vaste zone de libre-échange, là où la France et l’Allemagne - et quelques autres - avaient obstinément, et pendant tant d’années, mis en avant la nécessité d’une Europe politique. Exit donc la perspective d’une politique extérieure et de sécurité commune, qui était au cœur du nouveau traité.

Bien sûr, il est des arguments en faveur du non qui méritent d’être retenus et auxquels Le Monde, comme c’est son rôle et son devoir, a largement ouvert ses colonnes, au gré de ses comptes rendus de la campagne comme des points de vue et des entretiens accordés à leurs principaux avocats, qu’il s’agisse de Laurent Fabius ou de Jean-Luc Mélenchon, de Philippe de Villiers ou d’Henri Emmanuelli. Nous ne rangerons pas, à ce chapitre, les mensonges, véhiculés par les "nonistes", sur les prétendues menaces qui pèseraient sur la laïcité de l’Etat français, le droit à l’avortement dans l’Hexagone ou notre capacité à organiser le financement public de services que, pour des raisons d’intérêt général, nous estimons devoir soustraire à la concurrence (santé, éducation, culture, etc.).

En revanche, il est vrai que ce texte est bancal. Une Constitution est un rappel de grands principes qui fondent un régime (partie II du traité, avec la déclaration des droits fondamentaux) et l’exposé des mécanismes régissant le fonctionnement de ses institutions. Ce ne devrait pas être un rappel exhaustif des politiques qui ont été menées. Une Constitution, c’est un texte court, pas un document de plusieurs centaines de pages. Peut-être ne fallait-il pas qualifier ce traité de "constitutionnel".

Il est vrai surtout que le référendum aurait dû avoir lieu sur l’élargissement de l’Union - de 15 à 25 membres - au moment où il a été décidé. Et la refonte des institutions aurait dû être achevée avant. Par son ampleur, l’élargissement ne pouvait pas ne pas changer la nature de l’Union. Il aurait fallu le reconnaître plutôt que de prétendre, contre toute évidence, que l’on pouvait mener de front l’approfondissement et l’agrandissement de l’Union. Si, dans l’histoire récente de l’Europe, il y a un moment-clé, c’est bien l’éclatement de l’aire soviétique. Il revenait aux chefs d’Etat et de gouvernement des Quinze d’en faire la pédagogie, d’en prévoir les conséquences et, notamment, d’imaginer comment réussir l’intégration du continent qui en résultait. Cette pédagogie-là supposait des gestes forts, des Assises de l’Europe ; elle exigeait de dresser une manière de "bilan" de l’expérience européenne, comme l’a écrit Paul Thibaud dans ces colonnes, avant de la renouveler en la transformant.
Il est vrai enfin que, à la demande expresse de l’Allemagne, de la France et de la Grande-Bretagne, le traité n’injecte pas la dose de fédéralisme que requiert le fonctionnement d’une entité composée de 25 à 30 membres.

Mais, si le non l’emporte, il resterait pour l’Histoire, un signal. Celui d’abord de l’affaiblissement de la France elle-même : elle sera désormais moins bien placée pour dire ce que doit être l’Europe. Celui, aussi, d’un alignement, à l’envers des proclamations des partisans du non. Recevant à l’été 2001 le premier ministre Tony Blair, George Bush l’interpella ainsi, comme le rapporte l’historien Timothy Garton Ash : "Tony, voulons-nous que l’Union européenne réussisse ?" A la réponse positive qu’il reçut, le président américain répondit que cela était certainement, de la part des Britanniques, une "provocation". A coup sûr, après un non de la France, l’Europe cessera effectivement d’être une "provocation" pour l’Amérique de George Bush.

Article paru dans l’édition du 27.05.05

http://www.lemonde.fr/web/article/0...

Messages

  • merci sergio pour cet article je l’ai relayé sur indimédia je te conseille aussi de lire cet article de acrimed a ce sujet ainsi qu’a vous tous(tes)

    comment le monde pardon l’immonde nous pond des faux scoop
    sur l’appel des syndicats a voter oui

    lisez le les méthodes et le sens
    de la " déontologie " selon colombanni sont édifiantes et se passent de commentaires

    http://www.acrimed.org/article2036.html

    cerveaux non disponibles a la
    propagande Ouiste

  • les électeurs ne suivent plus les médias politiquement correct, principalement Le Monde ; c’est pour çela que colombani est hargneux !

  • Ben ouais, l’éditorialiste de la Pravda neo-libérale calomnie et ridiculise les adversaires de la pensée unique. Je vois pas trop ce qu’il aurait pu faire d’autre. Son boulot, c’est précisément d’écrire ce genre d’âneries.

  • Sidérant Colombani, mais pas surprenant du tout. Etre journaliste, c’est s’effacer devant l’info, c’est être le vecteur des courants de pensée, ce n’est pas inventer l’info, ce n’est pas penser à la place des autres ! C’est bien là la confusion dans laquelle baignent ces prétendus hommes de presse qui se croient ceints de la divine aura. Ils passent leur temps à être juge et partie, au gré de leurs humeurs, de leurs ambitions ou de leurs intérêts !
    Pour Colombani, les enjeux sont sérieux et vont au-delà de sa prose stéréotypée : son journal est au bord de la faillite depuis des années. Il serait plus urgent pour lui de s’interroger sérieusement sur le causes profondes des difficultés financières récurrentes du Monde, plutôt que de pondre un édito de circonstance qui ne convaincra que son auteur tellement la manoeuvre est grossière ! Ce type a peur. Il cherche à sauver sa peau de journaliste "reconnu", c’est clair ! Patron de presse ou pas, comme beaucoup, il n’est plus qu’un plumitif servile à la solde des dominants. Ce faisant, il déshonore cette profession, à laquelle il n’est pas réjouissant d’appartenir en ce moment.

    Verdi

  • quelque chose dont il faut se méfier se développe ces dernières heures. un sentiments diffus comme quoi les jeux sont faits, c’est plié, le "non" va l’emporter, le TCE aux oubliettes !
    Liberation, Le Monde, revues de presse sur des sites internet, chirac qui n’y croirait plus, sarkozy qui aurait dit "c’est rapé" ... prenons garde à ne pas nous voir trop beaux avant l’heure, à ne pas se laisser endormir ...

  • "Le Monde" reconnaît qu’il a menti sur l’extrême-droite dans le NON
    Il faut avoir de bon yeux pour lire page 6 aujourd’hui, dans un minuscule encadré placé dans un autre encadré, et par dessus un encart, dans l’édition de ce soir du journal "Le Monde", daté de demain vendredi 27 mai 2005 (en bas de la deuxième colonne), la phrase suivante, sous un intertitre anodin (ouf !) :

    "C’est donc par erreur que nous avons indiqué, dans Le Monde du 26 mai, que la droite et l’extrême-droite formaient toujours le socle majoritaire du non".

    Des excuses peu franches, plus qu’implicites, non-signées, et fort discrètes pour un tort causé de très grande ampleur !

    (source : liste LeMonde-etLaResistance)

  • abonnés à l’iMonde, il est temps de changé de journal !
    pensez à Politis qui a depuis le début défendu le Non
    brebis noire

  • Puisqu’on en est toujours (jusqu’au raccommodement du 30 mai - comme un nouveau 22 avril ?) à la lepénisation du "non de gauche" (il y avait des communistes dans la résistance, mais on n’a jamais entendu parler de "résistants de gauche"), le renvoi de l’argument aux social-ouistes a tout de même plus de sens :
    L’Europe qui se dessine est bien un totalitarisme ;
    « la mondialisation libérale est pour une part non négligeable une mondialisation criminelle » (projet NPS) ; l’économie officielle et l’économie "souterraine" sont devenues consubstantielles ;
    le mot corruption ne désigne plus que des pratiques extra-européennes ; l’attitude des medias ne peut s’excuser qu’en considérant la vérité comme facteur létal.
    Cela étant posé, le "réformisme" de M. DSK convie le socialisme à ratifier l’innommable au motif que, le socialisme représentant les plus démunis, M. DSK sera en position de force pour défendre leurs intérêts. Y a-t-il une différence avec la stratégie de défense de Pierre Laval : soumettons-nous au (soi-disant) fait accompli pour en atténuer la rigueur. Avec Rocard et Hollande comme gardiens, on aurait double ration de lard. C’est une façon de voir le socialisme ; pour être bien réformistes, mettons les choses au pire.
    Vive la famille (socialiste) !

    « le "non" serait une négation de nous-mêmes » (Jack Lang, JDD, 6/3/05)
    Dans sa bouche, le nous est de majesté, donc je vote non.