L’équipe de France de football : des fantassins en uniforme bleu blanc rouge frappé du coq.

Aucun(-e) commentateur(-trice) n’a relevé que Samuel Umtiti, après son coup de tête à la 51ème minute de la demi-finale du Mondial contre la Belgique, avait exécuté le salut militaire (1) face à la tribune située derrière les filets adverses. Un cérémonial évidemment non anodin !…

Le 13 juin dernier, lors d’une conférence de presse à Istra, ville où Didier Deschamps et ses « troupes » venaient d’établir leur « camp de base » pour la durée de la compétition, Presnel Kimpembé, défenseur central du Paris Saint-Germain, répondant à une question d’Yves Leroy du « Parisien » à propos de ses cheveux, avait déclaré, en provoquant l’hilarité de l’assistance : « C’est la Coupe du Monde. Faut aller à la guerre, faut une coupe de militaire ! »

De pseudo-journalistes qualifient régulièrement tel ou telle sportif(-ve) de « guerrier(-ère) » (2). Les reporters et présentateur(-trice)s des chaînes de télévision, privées et publiques, rivalisent de ce genre de métaphores poisseuses, a fortiori en ce jour de « Fête nationale », veille de la « grande finale » dont nous aurions « tous rêvé » !…

Message subliminal de propagande : dans certains gingles annonçant « the » match de demain après-midi apparaît la Patrouille de France traçant dans le ciel les trois couleurs de « notre » drapeau… Jean-Sébastien Gallois perçoit l’attaquant de l’Atletico Madrid Antoine Griezmann comme le « ministre de la défense » (3)...

Ce matin, pour TF1, l’astronaute Thomas Pesquet a « fait vivre » le défilé du 14 juillet depuis le cockpit d’un avion de chasse « Rafale ». Des envoyés spéciaux de France 2 avaient embarqué dans des blindés de l’armée…
Plus de cent dix mille gendarmes et policiers ont été mobilisés pour cette célébration et la confrontation avec les Croates, en particulier près des fan-zones.

Dans ce contexte de délire et de défoulement collectifs, les voix discordantes ne sont nullement les bienvenues. Pour Jean-Marie Brohm, un des principaux théoriciens de la « sociologie critique du sport », « le football apparaît comme une apothéose de la pensée unique », un marqueur fort d’une réalité des plus inquiétantes, « le renoncement généralisé au savoir, cette décérébration génératrice de dépolitisation » (4).

(1) La gestuelle de prédilection du Français Valérien Ismaël célébrant un but avec le club allemand du Werder Bremen, ce qui, heureusement, n’advenait pas souvent !

(2) L’inane Céline Géraud en use jusqu’à la garde, de même que de « Bienvenue à bord ! » lorsqu’elle cornaque « Tout le sport » sur France 3.

(3) « Dernières Nouvelles d’Alsace » du 14 juillet 2018.

(4) Dans un entretien avec Christophe Yvetot pour la revue « Grains de sable » (automne 1998), repris dans « Quel sport ? » de mai 2018, « Total football, une arme de diversion massive ».
René HAMM
Bischoffsheim (Bas-Rhin)