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Emmanuel Macron : coup d’État phase II

par JO

Publie le dimanche 6 janvier 2019 par JO - Open-Publishing
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par Mathieu Morel

Je suis de ceux qui considèrent que l’arrivée surprise à la présidence de la république d’Emmanuel Macron est le fruit d’un coup d’État. Je le radote depuis maintenant près de deux ans. La radicalisation de Macron à l’occasion de la crise des Gilets Jaunes n’est pas que l’expression de l’absence de toute culture démocratique chez ce personnage et ceux qui le soutiennent. La violence médiatique des petits valets, la brutalité de la police et la servilité de la justice sont les outils d’une remise en cause majeure du fonctionnement démocratique. Mathieu Morel s’interroge sur la volonté du petit roi de passer à l’étape suivante.

Régis de Castelnau

En cette période de vœux et de bonnes résolutions, il faut être un tout petit peu honnête : on ne peut pas mettre sur le seul dos de la bêtise ou de la cécité une aussi soigneuse accumulation de bourdes et de provocations. Il y a forcément autre chose dans cette obstination à marcher à rebours de l’Histoire tout en insultant avec délectation tous ceux lui signalent gentiment qu’il est à contresens.

Il n’a pas fallu bien longtemps pour découvrir que le « philosophe maître ès pendules » était une blague, une escroquerie échafaudée par quelques mécènes professionnels, « spin-doctors » et « story-tellers », pour gaver jusqu’au dernier souffle une machine ubuesque devenue infernale à force d’acharnement. Que les Cassandre d’il y a vingt ou trente ans aient eu raison contre le « cercle des Minc et Attali » importe peu aujourd’hui. Les méthodes alors employées pour les discréditer, les décourager ou les diaboliser étaient déjà les mêmes qu’aujourd’hui (« vous faites le jeu de », « vous parlez comme », « vous êtes pour le repli rabougri/nationaliste/nazi » etc.). Simplement, elles étaient un peu moins éculées qu’aujourd’hui, donc plus efficaces.

Exit, donc, le philosophe pourtant douteux, le théâtreux pourtant hésitant, le brillant bibliographe, le fougueux Jupiter. Les mécènes, spin-doctors et story-tellers semblent commencer eux-mêmes à s’en apercevoir, qui quittent un a un le navire et cherchent la prochaine poule aux œufs d’or (après le gros lot « jeune prodige », certaines rumeurs laissent à penser qu’on pourrait jouer la carte « femme », cette autre case « progressiste » que ces peuples rétrogrades se sont jusqu’ici obstinés à retoquer dans le « monde libre »).

Mais si eux commencent peut-être à s’en apercevoir, lui, en revanche, des nèfles ! Ce prodige-prince-enfant-roi, fils improbable et chevelu de Juppé et de Giscard, a hérité du premier la sagesse et la certitude de son absolue supériorité et du second la jeunesse et une empathie certaine. Ou réciproquement.
Tout un programme…

Il y a quelque chose de délibéré chez cet homme – et/ou ses conseillers/sponsors. Comme une part de jeu (« jusqu’ici, on gagne, jusqu’où pourrons-nous aller pour les soumettre et les humilier ? »), une part de défi (« qu’ils viennent me chercher » et quelques autres brillants aphorismes de la même saumure), une part de touchante certitude (« le peuple, ce tas de téléspectateurs confits et ventripotents, serait choqué par trop de violence, des allusions à la guillotine, un tag, une quenelle, un vilain mot… ils veulent un chef et ça tombe bien, je suis là, vive Moi ! »), une part de perfidie (« si je raconte n’importe quoi assez vite et assez longtemps en casant un maximum d’expressions et d’effets de manche dans un minimum de temps, personne n’osera dire qu’il n’a rien compris ou que j’ai raconté n’importe quoi » – il aurait vraiment dû lire Andersen et les Habits neufs, lui qui aime tant les sages Danois luthériens).

Il y a quelque chose de délibéré, une envie d’en découdre, d’entrer dans l’Histoire à tout prix pour qu’elle puisse s’enorgueillir de compter un homme de sa trempe dans ses pages, forcément glorieuses. Tout à son rêve éveillé, le prince-enfant-roi, que personne n’a jamais osé corriger pour lui apprendre à revenir sur Terre, se voit déjà de Gaulle, Napoléon, Louis XIV, Charlemagne, Néron, Empereur d’Europe, triomphant sans gloire mais triomphant quand même. Dans ce genre de rêve, l’hostilité – surtout vécue sous la haute protection zélée de chiourmes qu’on méprise autant que les autres – devient stimulation.

Une hypothèse : ce type-là – et/ou ses conseillers/sponsors – cherche à galvaniser sa base, ce petit cinquième de France qui s’est toujours accommodé de toutes les collusions, toutes les fuites à Varennes, tous les refuges à Coblence, toutes les compromissions avec n’importe qui (surtout vers le nord-est) contre les quatre autres cinquièmes, pourvu qu’il demeure, lui, à la barre. Ce n’est qu’avec cette base chauffée à blanc et le sésame des Institutions (non pas « la cinquième République » mais ce qu’on en a fait entre-temps, notamment pour convenance eurobéate), qu’il peut encore croire son omnipotence minoritaire assurée.

Et encore… Pour quoi faire ?

A ce stade de discrédit, il ne lui reste que l’entourloupe ou la force brutale. Pour l’entourloupe, il a grillé à peu près toutes les cartouches mais il lui en reste au moins une : convoquer un referendum institutionnel portant sur quelques réformes qui – peut-être à tort, d’ailleurs – feraient consensus (par exemple, l’annihilation finale du pouvoir législatif, jugé dispendieux, après l’avoir inféodé à l’exécutif grâce au « progressiste » quinquennat). Pour la force brutale, on a bien une petite idée : il ne lui manque plus que l’imagination, l’événement opportunément choquant ou le simple courage pour lancer son propre coup d’Etat.

On a bien un vague retour au « sacré », au mystique, au grandiose. On a bien une néo-pagano-trinité : une espèce d’Agrippine vaguement de Médicis, une espèce d’élève-Néron qui semble percer sous petipatapon et même un Alexandre qui évolue dans ce marigot vulgaire jusqu’à y donner l’illusion d’une forme de grandeur. Nous voici, en 2019, dans un drôle de Cluedo bizarre et cruel où, spectateurs, on se demande qui poignardera qui à la fin, mais où l’on nous invite doctement à croire mordicus que le poignard – qui nous frappera pourtant aussi, tôt ou tard, tant que nous accepterons de le laisser aux mains de ces dangereux dingues – est une affaire de grandes personnes.
Tandis que la guillotine, fût-elle évoquée en symbole par quelques gueux fluorescents, serait une vaine barbarie qu’il serait urgent d’oublier, sauf à encourir quatre mois de prison avec sursis.
« Pour le salut de la démocratie », nous serinent ceux qui ont fait une OPA dessus pour la noyer tranquillement, entre gens bien.

Mathieu Morel
source :http://www.vududroit.com/2019/01/emmanuel-macron-coup-detat-phase-ii/

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