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Le virus, c’est nous

par montbuzat

Publie le mercredi 15 avril 2020 par montbuzat - Open-Publishing

Depuis toujours, l’homme s’interroge sur son destin. Dans les périodes où le sens de la vie se dissipe, il supporte particulièrement mal l’incertitude. Ne pas savoir le conduit à imputer ce qui lui est incompréhensible à l’action d’une puissance supérieure ou à rechercher des explications dans ce qu’on appelle aujourd’hui les infox, les théories du complot. Le doute sous-tend les croyances. Il est également indispensable dans la recherche scientifique où il conditionne même de nouvelles découvertes.
La récente référence présidentielle à une guerre appartient à ces tentatives pour fournir des repères. A l’évidence, nous ne sommes pas en guerre. Les infrastructures des différents pays concernés ne sont pas détruites. Si des guerres se déroulent dans plusieurs contrées, elles n’ont pas une envergure planétaire, en tout cas pas sous une forme traditionnelle. Il ne s’agit pas non plus d’une guerre bactériologique. On a souvent distingué la guerre, intervention humaine délibérée, d’une épidémie qui serait un phénomène non humain. A cet égard, on se réfère fréquemment à La Peste d’Albert Camus. L’auteur insiste dans son livre sur des caractéristiques toujours actuelles : la solitude, l’isolement, l’exil des malades. Des commentateurs ont établi un parallèle entre la peste et la peste brune, contre laquelle il n’existe toujours pas de vaccin. Mais Camus précise que la peste, c’est la vie. « Chacun porte en soi la peste. » Dans ses Essais, Michel de Montaigne avait déjà noté : « Tu ne meurs pas de ce que tu es malade. Tu meurs de ce que tu es vivant. » Ce lien étroit entre la vie et la mort se vérifie pleinement dans cette pandémie où un dérèglement du système immunitaire consécutif à la maladie tue plus que le virus lui-même. On présente aussi volontiers la catastrophe actuelle comme un événement imprévisible, alors que les avertissements répétés de quelques lanceurs d’alerte perspicaces n’ont pas été écoutés. En la circonstance, il est difficile d’exonérer l’humanité de toute responsabilité. En effet, le mode de vie actuel qui inflige de lourdes souffrances à la nature est impliqué dans l’origine et dans la propagation du virus. Il faudrait être bien naïf pour penser que l’homme va changer vraiment. Comme dans la fable de La Fontaine, Les animaux malades de la peste, les puissants tenteront d’éluder leurs responsabilités en désignant des boucs émissaires à la vindicte populaire. Il ne sera toutefois plus possible de se contenter de refaire le monde dans un échange sans conséquence de postillons.