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J.F. Copé, un drôle de client, pas très citoyen

Publie le mercredi 27 juillet 2005 par Open-Publishing

J.F. Copé, un drôle de client, pas très citoyen

de João Silveirinho

Beaucoup de gens de gauche ne lisent pas L’Express. On ne saurait leur en vouloir : son orientation droitière et, comme c’est aussi le cas de ses confrères « news magazines » Le Point et le Nouvel Observateur, une avalanche publicitaire dans laquelle surnagent quelques articles qu’il serait présomptueux de qualifier de fond, sauf à faire référence à celui des tiroirs peuvent décourager les meilleures volontés. Si on lit L’Express, c’est souvent dans une de ces occasions où le désoeuvrement nous fait prendre ce qui nous tombe sous la main : le train ou l’avion, le coiffeur, la salle d’attente du médecin. La dernière livraison de cet hebdomadaire donne la parole à M. Jean-François Copé, qui doit probablement à l’indigence de la fin de mandat de notre Président le fait d’être ministre du budget et de la réforme de l’Etat. Paroles stupéfiantes : « Le citoyen est un client, et le client est roi », proclame fièrement M. Copé. Paroles imprudentes, au demeurant, car si les citoyens étaient des client-rois, il serait bien possible que nombre d’entre eux délaissent la boutique de M. Copé, qu’ils n’ont pas choisi, hors sa bonne ville, comme fournisseur.

M. Copé nous informe qu’il va s’attaquer pour de bon à la réforme de l’Etat., passer, dit-il, « du prototype ponctuel à la production en série ». Nous passons, nous, des raffarinades aux copénades, ce qui n’est pas un progrès sensible. Et comment va-t-il faire, M. Copé ? Accrochons-nous. Phase 1, supprimer les lois inutiles. Au moins 130 (seulement ? ndlr). Lesquelles ? M. Copé nous donne deux exemples bouleversants, et deux seulement : l’ordonnance de 1723 sur les ouvrages royaux dans les rivières et la loi de 1960 sur le service militaire des mineurs de fond. Après une tornade, nous dirons même plus, un nettoyage au kärcher de cet acabit, nul doute que l’administration et ses administrés-clients-rois vont tomber dans les bras les uns des autres, noyant leur réconciliation sous des tonnes d’effusions.

Phase 2 : faire porter par les fonctionnaires la réforme de l’Etat. Car, contrairement à son collègue Dutreil, M. Copé les aime, lui, les fonctionnaires. Et il va leur prouver son amour. Il va leur offrir « un audit portant chaque année sur 20% des missions de l’Etat pour diagnostiquer comment il les remplit et faire des gains de performance ». « En cinq ans, nous les aurons toutes examinées », précise-t-il, ce qui nous démontre qu’il sait vachement bien compter. Mais ce n’est pas tout : « Ensuite, comme cela se fait dans beaucoup d’entreprises (tiens, le MEDEF n’est jamais bien loin de M. Copé) tous les services en contact avec le client seront certifiées par un organisme indépendant pour garantir un service public de qualité ». Voilà de quoi, sans conteste, mobiliser les fonctionnaires en vaillantes cohortes unies derrière l’étendard de la réforme de l’Etat brandi par M. Copé.

Nous nous disons, nous, simples citoyens qui n’avons pas, mais pas du tout, envie de devenir clients de services qui n’auraient, on le sent bien, de « publics » que le nom, que M. Copé nous prend pour des pommes. A moins que nous ayons été naïfs en pensant qu’il y avait des inspections pour garantir un service public de qualité, une Cour des comptes pour vérifier la bonne utilisation des dépenses publiques. Il faudrait, en plus financer par nos impôts des audits « indépendants » ? Un sentiment nous est venu, transformé en certitude à la vitesse de l’éclair : M. Copé méprise par ses propos la fonction publique, les fonctionnaires et, finalement, ses « citoyens clients ».

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