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Italie : De vieux trains et des alarmes fantômes, les réductions budgétaires freinent le plan de sécurité

Publie le samedi 24 décembre 2005 par Open-Publishing

La moitié du réseau est encore dépourvue de systèmes de contrôle modernes. Et avec la prochaine loi de finances ce sera la paralysie

de GIANCARLO MOLA Traduit du français par karl&rosa

Très souvent, les trains sont plus vieux que ceux qui les conduisent. Presque la moitié du réseau ferroviaire est dépourvue de systèmes automatisés modernes pour le freinage d’urgence. Et parfois les mécanismes de blocage, dans les tronçons où ils sont installés, ne peuvent pas entrer en fonction parce qu’à bord manque l’équipement en mesure d’en capter le signal. Quand cela va mal, c’est l’accident, quand cela va très mal, c’est la tragédie.

Mais même la simple routine devient compliquée, dans l’Italie qui rêve de la grande vitesse mais doit s’accommoder d’une infrastructure sur rails qui au cours des 50 dernières années n’est pas arrivée à se refaire une beauté. Et qui, au contraire, se trouve aujourd’hui face à une crise sans précédents.

"Les chiffres contenus dans la loi de finances sont impressionnants : pour 2006, les ressources pour les chemins de fer sont réduites de 92,6%, en ne laissant disponibles que 276 millions d’euros ; la réduction arrive ensuite à frôler les 98% en 2008. Il est clair qu’avec ces chiffres on ne va nulle part", disait hier Anna Donati, responsable des Verts pour les transports.

Dix milliards d’euros tout rond en trois ans manquent à l’appel. Et si les Chemins de fer n’y mettent pas leurs propres ressources, tout va s’arrêter", fait écho Franco Nasso, secrétaire national de la Filt-cgil. Donc, pour les FS, l’année qui est en passe de commencer s’annonce critique. Il est vrai que les investissements en technologie et sécurité ont toujours augmenté ces dernières années, en passant d’un milliard et demi d’euros en 2000 à 2,86 milliards en 2005.

Mais il est vrai aussi que la réduction drastique des transferts contenue dans la loi de finances rendra impossible - sauf si on intervient massivement sur le prix des billets, ce qui est fort improbable - de procéder au plan de modernisation des rails et des rames devenu aujourd’hui plus que jamais urgent : bien que le taux d’accidentalité ait progressivement diminué sur les chemins de fer italiens, 2005 a été un "annus horribilis" pour la sécurité dans les trains, ouvert par la tragédie de Crevalcore (17 morts, contre 11 en 2004 et 7 en 2003) et achevé par le désastre de Roccasecca.

Il faut de l’argent, sur tous les fronts. En commençant par ce que les cheminots appellent "matériel roulant". Quelques exemples : les locomotives diesel pour le transport régional ont un âge moyen de 23,8 ans, les électriques s’arrêtent à 21,3 ans, les motrices diesel cargo ont 31,4 ans tandis que les vieilles "michelines" - encore très nombreuses - arrivent à 44 ans, toujours en moyenne. Et ce n’est pas fini : "A la vétusté de la flotte s’ajoutent les conditions d’exploitation, c’est-à-dire l’exploitation des machines, immensément augmentée. On s’est trop rapproché du point de rupture et en nombre de cas nous l’avons dépassé", dénonce Armando Romeo, secrétaire général de l’Orsa - chemins de fer.

Et puis, il y a la question de la sécurité sur les lignes. Au demeurant, la technologie considérée la plus fiable s’appelle Système de contrôle de la marche du train (Scmt) : la vitesse du train est surveillée automatiquement, à chaque seconde du voyage, et si les limites ne sont pas respectées la locomotive freine sans que l’intervention du conducteur soit nécessaire. On prévoit que quand le plan sera réalisé, le mécanisme sera installé sur 10.500 kilomètres des 16 mille totaux du réseau ferroviaire : pour le moment il est opérationnel sur à peine 4.384.

A ce moment-là, les 5.500 kilomètres qui n’auront pas le système Scmt seront équipés d’un des mécanisme alternatifs pour les tronçons mineurs : il s’appelle Système de support de la conduite (Ssc) et vérifie que le conducteur reconnaît les indications liées aux signaux et entreprend les actions conséquentes : les travaux vont débuter l’année prochaine.

Entre temps, sur 4.683 kilomètres de rails on se débrouille avec le dit blocage automatique à courants codifiés, un vieux système de signalisation du danger qui demande la présence à bord du train d’un répétiteur spécial (par exemple, le train qui est rentré dans l’autre, à Roccasecca, n’en était pas équipé). Sur le reste du réseau, et on parle de presque sept mille kilomètres, les systèmes de sécurité sont encore plus archaïques.

Une urgence, en somme. Qui exige des interventions radicales. Et rapides. Le plan des FS se donne jusqu’à 2008 pour l’adaptation aux standards de sécurité. A condition de disposer réellement des ressources économiques. Et voila justement le dilemme de ces journées intenses de fin 2005.

http://www.repubblica.it/2005/l/sez...