Accueil > La vente de l’eau met le feu au Honduras

La vente de l’eau met le feu au Honduras

Publie le samedi 30 août 2003 par Open-Publishing

http://www.lecourrier.ch/essai.htm?/Selection/sel2003_682.htm

Paru le : 28 août 2003

La vente de l’eau met le feu au Honduras
PRIVATISATION • Le Honduras a connu sa principale mobilisation sociale depuis plus de dix ans.

par BENITO PEREZ

Au Honduras, le chaudron social a débordé jusque dans les travées du Parlement. Mardi, une massive
mobilisation syndicale contre la politique du président libéral Ricardo Maduro s’est terminée en
bataille rangée dans et autour du bâtiment du Congrès, faisant une trentaine de blessés et de
nombreux dégâts.

Les 15 000 manifestants protestaient contre la loi de privatisation de l’eau adoptée la semaine
dernière. Dans leur collimateur également, trois projets législatifs visant à réduire les salaires
des fonctionnaires, à supprimer certains droits syndicaux et à réformer la « loi de la terre ». Les
deux premières mesures répondent aux pressions du Fonds monétaire international (FMI), dont le
président hondurien espère obtenir un nouveau prêt de 350 millions de dollars et l’effacement
d’anciennes créances.

TEGUCIGALPA PARALYSEE

Dès 4 h 30 du matin, des milliers de sympathisants de la Coordination de résistance populaire
(CRP) ont envahi les principales artères de la capitale Tegucigalpa. Dans une ambiance festive mais
déterminée, paysans, syndicalistes et étudiants ont entièrement paralysé la circulation automobile
durant plus de huit heures, tandis que 60 000 fonctionnaires de l’éducation débrayaient à travers
tout le pays.

En début d’après-midi, les contestataires disséminés aux quatre coins de la capitale ont levé
leurs barrages pour converger vers le Parlement dans une « Grande marche pour la dignité », bientôt
rejoints par des milliers de grévistes de la fonction publique sanitaire.
Parmi les quelque 15 000 manifestants, la plupart des pancartes affichaient l’hostilité de la
foule envers le FMI mais surtout à l’encontre du président Maduro. Celui-ci a concentré l’essentiel
des critiques des orateurs, dont celles de l’évêque de Santa Rosa qui l’a accusé d’agir contre le
peuple et l’a invité à démissionner.

80% DE PAUVRES

C’est lorsque résonnaient les derniers discours que des manifestants ont lancé des pierres et des
cocktails Molotov sur les forces de l’ordre, parvenant à forcer le passage vers l’intérieur du
Palais du Congrès. La police a alors fait usage de balles en plastique et de gaz lacrymogène pour
évacuer le bâtiment.

Des échauffourées se sont poursuivies dans les rues de la capitale, se soldant par une trentaine
de blessés, dix arrestations et d’importants dégâts à des agences bancaires et des fast food
étasuniens, notamment. Une succursale d’une chaîne d’électroménager appartenant au président Maduro a
également été mise à sac.

Selon le quotidien local El Tiempo, la manifestation convoquée par la CRP constituait le plus
grand rassemblement social des dix dernières années au Honduras. Quatre-vingts pour cent de la
population de ce petit Etat d’Amérique centrale vit en dessous du seuil de pauvreté.