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Peter Handke : assez d’unilatéralisme, parlons de Yougoslavie

Publie le lundi 15 mai 2006 par Open-Publishing
27 commentaires

de Peter Handke Traduit de l’italien par karl&rosa

Enfin, après plus d’une décennie d’un langage journalistique à sens (et à non sens) unique, il semble qu’une ouverture dans la presse en France (1), peut-être pas qu’en France, est en train de se créer, pour parler d’une façon différente - ou simplement pour commencer à parler - de la Yougoslavie. Un débat, une discussion, une confrontation fructueuse, un questionnement commun et des narrations qui se parlent...

Auparavant il n’y avait rien et encore rien, de la diffamation au lieu de débat, une diffamation par des mots préfabriqués, répétés à l’infini et utilisés comme des armes automatiques.

Elargissons donc cette brèche ou cette ouverture, ce printemps de mots. Ecoutons -nous enfin les uns les autres plutôt que de hurler et d’aboyer de deux camps ennemis. Mais ne tolérons plus non plus les êtres (?), les âmes (?) méchantes (!) qui, dans le magique dilemme yougoslave, continuent à lancer des mots projectiles tels que "révisionnisme", "apartheid", "Hitler", "dictature sanguinaire", etc.

Arrêtons toute comparaison et parallèle en ce qui concerne la guerre en Yougoslavie. Tenons-nous en aux faits qui, en tant qu’évènements d’une guerre civile, amorcée ou au moins co-produite par une Europe de mauvaise foi ou, au moins, ignorante, même s’ils ont déjà été mis à nu, restent de toute façon terribles pour toutes les parties . Arrêtons de comparer Slobodan Milosevic à Hitler. Arrêtons de le comparer avec son épouse Mira Markovic à Macbeth et à sa Lady et de faire des parallèles entre le couple et le dictateur Ceausescu et sa femme. Et n’utilisons plus pour les camps surgis ça et là dans la guerre de sécession en Yougoslavie l’expression "camps de concentration".

C’est vrai : il y avait des camps intolérables entre 1992 et 1995 dans le territoire des Républiques yougoslaves, surtout en Bosnie. Mais arrêtons d’associer mécaniquement dans notre tête ces camps aux Serbes bosniaques : il y avait des camps croates et des camps musulmans aussi, et les crimes qui y ont été commis sont et seront jugés par le Tribunal de La Haye. Et arrêtons, enfin, d’associer les massacres (dont - au pluriel - ceux de Srebrenica de juillet 1995 sont de loin les plus atroces) aux forces armées ou aux paramilitaires serbes.

Ecoutons aussi - enfin - les survivants des massacres perpétrés par les Musulmans dans les nombreux villages serbes autour de Srebrenica qui amenèrent en juillet 1995 - une vengeance infernale et une honte ineffaçable pour les responsables serbes bosniaques - à la grande tuerie, et pour une fois le mot qui a été souvent répété est vraiment juste, "la plus grande en Europe après la Deuxième guerre mondiale".

En ajoutant cette information : que tous les soldats et les hommes de Srebrenica qui se sont enfuis en Bosnie serbe en traversant le fleuve Drina, la frontière entre les deux Etats, s’enfuyaient en Serbie, un pays qui était à l’époque sous l’autorité de Milosevic, que tous ces soldats, en arrivant dans la soi-disant Serbie ennemie étaient sauvés, sans que des tueries ou des massacres n’y soient perpétrés.

Oui, écoutons, après avoir écouté "les mères de Srebrenica", aussi les mères ou une seule mère du village serbe de Kravica, tout proche, raconter le massacre du Noël orthodoxe 1992-1993, perpétré par les forces musulmanes de Srebrenica, un massacre, celui-là aussi, contre les femmes et les enfants de Kravica (le seul crime pour lequel le mot "génocide" est valable). Et arrêtons d’associer aveuglement les "snipers" de Sarajevo aux "Serbes" : la plupart des casques bleus français tués à Sarajevo furent les victimes des tireurs musulmans.

Et arrêtons d’associer le siège (horrible, stupide, incompréhensible) de Sarajevo exclusivement à l’armée serbe bosniaque : dans le Sarajevo des années 1992-1995, des dizaines de milliers de civils serbes restèrent bloqués dans les quartiers du centre, comme Grbavica, assiégés à leur tour - et comment ! - par les forces musulmanes. Et arrêtons d’attribuer les viols seulement aux Serbes.

Arrêtons d’associer les mots d’une façon unilatérale, à la manière du chien de Pavlov. Elargissons l’ouverture qui se présente à nous. Que la brèche ne soit plus obstruée par des mots pourris et empoisonnés. Que tout esprit mauvais reste dehors. Abandonnons enfin ce langage. Apprenons l’art de la question, voyageons dans le pays sonore, au nom de la Yougoslavie, au nom d’une autre Europe. Vive l’autre Europe. Vive la Yougoslavie. Zinela Jugoslavija.

(1) Parmi d’autres, les articles de Brigitte Salino et d’Anne Weber dans Le Monde du 4 mai, le commentaire de Pierre Marcabru dans Le Figaro du même jour et l’appel de Christian Salmon dans Libération du 5 mai.

Cet article de l’écrivain et dramaturge autrichien censuré par la Comédie Française "parce qu’il s’est rendu au funérailles de Milosevic", est sorti mercredi 10 dans Libération et il a été publié par Il Manifesto avec l’autorisation de l’auteur.

http://www.ilmanifesto.it/Quotidian...

Messages

  • ""Auparavant il n’y avait rien et encore rien, de la diffamation au lieu de débat, une diffamation par des mots préfabriqués, répétés à l’infini et utilisés comme des armes automatiques.""

    Tout simplement merci , monsieur HANDKE , de rétablir quelques vérités que certains avaient omis d’introduire dans le débat sur la triste fin de la YOUGOSLAVIE .

    claude de Toulouse .

    • C’est curieux, le même article a déjà été publié (sauf confusion de ma part, je l’ai peut-être lu dans Libé). Je croyais que l’hébergement n’était pas gratuit ? ;-)

      D’accord avec toi, Claude : Handle a le mérite de mettre les points sur les "i". Si tout ce qu’il écrit est vrai, ce dont je ne doute pas, cela justifie-t-il pour autant le fait qu’il ait assisté aux obsèques de Milosevic, alors que lui-même reconnaît que les Serbes ont aussi commis des massacres ?

      Ce qui s’est passé en Yougoslavie me fait penser aux génocides entre ethnies africaines - notamment au Rwenda. Dans ces cas-là, ce n’est pas parce que l’une a tort que l’autre a raison.

      Konrad

    • cher konrad ,

      les morts n’ont jamais tort ou raison , ils sont morts point barre .
      Il faut reconnaitre que sur la yougoslavie , il y avait de bons morts , dont on parlait , et donc de mauvais criminels dont on parlait beaucoup , et puis des morts dont on ne parlait pas , ce qui evitait de parler des criminels .
      Handke retablit l’equilibre et certains n’aiment pas cela , car la parole d’Handke les renvoit à leurs declarations fracassantes et à leurs silences .

      claude de Toulouse .

    • C’est justement ce que je "reconnais", cher Claude... ;-)

      Mais, désolé, soutenir après coup Milosevic en allant à ses obsèques, c’est aller trop loin. Car s’il y a des criminels dont on évite de parler, cela n’empêche pas Milosevic d’en avoir été un. A mon sens, Handke a raison de dénoncer la partialité des voix officielles, mais a tort de prendre parti pour l’un des deux camps.

      Konrad

    • J’ai reçu le mail suivant de Guelfings :

      >Monsieur,
      >sur Bellaciao vous écrivez :
      >"Ce qui s’est passé en Yougoslavie me fait penser aux génocides entre ethnies africaines - notamment au Rwenda. Dans ces cas-là, ce n’est pas parce que l’une a tort que l’autre a raison."
      >D’une part vous faites un amalgame, d’autre part vous faites deux négationnismes.
      >En avez vous conscience ?
      >Le soutien affiché par Bellaciao à Peter Handke est très grave.
      >Renseignez vous ! Allez sur le site "Survie" déjà, concernant le Rwanda.
      >J’en ai assez de lire des propos négationnistes !

      Voici ma réponse :

      Madame, ou Monsieur, (désolé, mais votre pseudonyme est neutre)

      Vous faites visiblement erreur sur le sens de mes propos. Je vais donc tâcher de vous détromper.

      Concernant le Rwanda, je ne nie aucunement les effroyables massacres qui y ont été perpétrés ; mais je sais que si les Hutus, ou les Tutsi (je ne sais plus au juste qui a commencé), ont massacré les Tutsi, ou les Hutus, pour autant il me semble que l’ethnie victime ne se prive pas de se venger plus qu’il n’est raisonnable.(source : un reportage de France Inter, je ne saurais vous dire quand je l’ai entendu)
      Par contre, je vous accorde le risque d’amalgame, car je ne connais pas assez ces situations pour pouvoir être sûr de ce que je disais - d’où la tournure "me fait penser à"...

      Et vous croyez que je fais du négationnisme au sujet de la Yougoslavie, quand j’écris : "Dans ce cas-là, ce n’est pas parce que l’une a tort que l’autre a raison." ? Non. Voici ce que je voulais dire (peut-être me suis mal exprimé) :

      Les Serbes de Milosevic ont commis des crimes inacceptables contre l’humanité, que je réprouve totalement. Là-dessus, Peter Handke affirme que les Musulmans, en se défendant, ont eux-aussi perpétrés des massacres ; étant donné que personne ne l’accuse de diffamation, j’en déduis que c’est a priori vrai, et donc - en toute logique - je réprouve également les crimes commis par certains Musulmans.

      Certains commentateurs de Bellaciao m’ont l’air, ainsi qu’Handke, et en cela vous avez raison, de se servir des crimes musulmans pour disculper les Serbes. Tous mes propos à ce sujet et sur Bellaciao tendent justement à montrer que :
       Peter Handke a tort de défendre Milosevic.
       Peter Handke, SI CE QU’IL DIT EST VRAI, a raison de souligner que les Musulmans ont également commis des crimes.
       le directeur de la Comédie Française a raison de ne pas vouloir donner à cet individu une visibilité (celle d’être joué dans ce théâtre) ; cependant je ne peux que m’interroger sur l’efficacité de cette tactique, car finalement il a généré un scandale, et le scandale est la meilleure des publicités.

      Permettez-moi toutefois de ne pas souscrire à votre accusation envers Bellaciao : ce collectif n’a (A MA CONNAISSANCE) jamais nié les crimes de Yougoslavie. Quant à leur manière de défendre Handke, c’est de faire (comme tant "d’intellectuels") une distinction entre l’homme et l’oeuvre... ce que tout le monde, à l’exception d’Emmanuel Faye, fait au sujet d’Heidegger.

      Vous ne pourrez jamais me prendre en faute par rapport aux crimes contre l’humanité, car j’y suis catégoriquement opposé. Les propos à tendance négationniste nous énervent tous deux, mais j’essaie de les combattre sur le terrain de l’argumentation. J’espère donc avoir dissipé notre malentendu.

      Cordialement,

      Konrad

      Post-Scriptum : Vous pourrez retrouver cette réponse sur mon blog, car je ne tiens pas de double discours.

      Voici l’URL du site auquel fait référence Guelfings : http://www.survie-france.org

      J’en profite pour vous inviter à lire mon article sur la torture sous toutes ses formes (attention : images choquantes en bas de page).

    • Handke, une affaire salutaire

      par Louise L. LAMBRICHS
      Libération : lundi 15 mai 2006

      Louise
      L. Lambrichs essayiste et écrivaine.

      "Voyage au pays sonore ou l’Art de la question, tel est le titre de la pièce déprogrammée de Peter Handke, titre qui laisse rêveur le lecteur attentif de son oeuvre et de son engagement politique. Tout le monde s’empresse de clamer ­ notre ministre de la Culture en tête ­ que cette pièce n’a « rien à voir » avec la guerre de Yougoslavie, puisqu’elle fut écrite en 1989. Divines certitudes. Pour avoir lu d’assez près le travail de Handke (1), je parierais plutôt ­ et c’est bien là la question de l’art, et de toute création artistique sans doute ­ que cette pièce renvoie très subtilement à la question qui taraude (ou a taraudé) Peter Handke, et qui permet de comprendre aussi bien les discours des diverses propagandes contradictoires qui ont sévi depuis quinze ans que le sens de cette guerre. Car pour ce qui concerne l’art de la question, il faut bien se rendre à l’évidence : Handke pratique avec une rare subtilité l’art de ne pas poser les bonnes. Ce faisant, il continue à propager ses thèses délirantes, qui relèvent d’un néonégationnisme plus partagé en France qu’on ne pourrait le croire.

      Si, depuis quinze ans, nous avons été quelques-uns (Annie Le Brun en tête, et précisément dans Libération) à dénoncer le national-communisme de Milosevic, nous avons eu dans ce pays bruyant beaucoup de mal à nous faire entendre et jusqu’à très récemment, contrairement à ce que croit Peter Handke, nous sommes demeurés très isolés. J’en veux pour preuve le courageux silence qui a salué Nous ne verrons jamais Vukovar (2), lu pourtant par toutes les rédactions. Ainsi Peter Handke apprendra-t-il que la « censure » (ou l’autocensure, ou le politiquement correct) n’est pas forcément aujourd’hui, sur la question que soulève son cas, du côté qu’il suppose.

      Qui a lu attentivement « Parlons donc de la Yougoslavie » (Libération du 10 mai) aura peut-être repéré un « détail » qui, à mes yeux, n’en est pas un : c’est que pour Peter Handke, le « seul crime pour lequel convient le mot génocide » est « le massacre du Noël orthodoxe 1992-1993, commis par les forces musulmanes à Srebrenica, un massacre aussi contre femmes et enfants [serbes] de Kravica ». Nous sommes là au point d’abjection central, qui a organisé pendant quinze ans tous les discours pour ne pas dire les propagandes sur cette guerre, et qui reste la question que personne ne soulève et qui fut au coeur de mon élaboration : comment se fait-il qu’en Europe, une génération après la Shoah, ait pu se produire pendant trois ans, sous les yeux de toute la communauté internationale et des troupes de l’ONU, le génocide d’une population civile musulmane, laïque, parfaitement européenne ? (Je rappelle à ceux qui l’ignorent encore que plus de quatre cents charniers ont été mis au jour en Bosnie et que les Bosniaques continuent, dix ans après Srebrenica, de rechercher et d’enterrer leurs morts, sans parler des corps des Albanais du Kosovo, non encore rendus par Belgrade à leurs familles.)

      C’est autour de ce mot, génocide, de son usage et de son abus, que se sont organisées les positions des uns et des autres, qui, grâce à cette affaire Handke qui n’est jamais qu’un symptôme de notre temps, commencent heureusement à bouger. La question que soulevait Nous ne verrons jamais Vukovar n’a toujours pas été abordée en France : c’est celle du négationnisme des nationalistes serbes (car c’est à ce négationnisme-là que Handke souscrit aveuglément, et il est loin d’être le seul). Les documents historiques issus des archives de Belgrade, commentés par l’historienne croate Ljubica Stefan, et que j’ai publiés à ce sujet car ils étaient inédits en France, sont si stupéfiants, ils renversent à tel point nos représentations, ils éclairent si bien ce qui s’est passé, qu’il serait important de les porter à la connaissance de tous, et particulièrement de la jeunesse serbe qui manifeste aujourd’hui, contre Milosevic et n’est pas allée lui rendre hommage à ses obsèques.

      Que la Serbie de Milan Nedic ait collaboré de façon très zélée avec les nazis ne remet pas en cause le fait qu’il y eut aussi des résistants serbes. Mais cela détruit le mythe qui court encore en France et qui gouverna François Mitterrand, le mythe qui durant plus de quatre ans justifia aux yeux de l’opinion ­ et trop souvent de la presse ­ la politique française en ex-Yougoslavie (et, me semble-t-il, la politique anglaise). Le temps paraît venu, et l’affaire Handke en offre l’occasion, de dépasser les querelles partisanes pour convenir d’une évidence effrayante : à savoir que nous avons eu sous les yeux, en Serbie, en Bosnie, en Croatie, ce que peut produire le négationnisme, l’absence de travail de mémoire, la manipulation éhontée de la mémoire collective, et nous avons eu ainsi pour la première fois dans l’histoire européenne l’illustration, à l’échelle collective, du mécanisme freudien suivant lequel le déni engendre la répétition.

      Si le peuple serbe avait eu connaissance de son passé, si le travail de mémoire avait pu s’accomplir sous la Yougoslavie titiste, les élites politiques nationalistes serbes n’auraient jamais pu prétendre avec autant de succès que les Serbes avaient été victimes d’un génocide comme les juifs, qu’ils n’avaient jamais rien fait aux juifs, que l’histoire était là pour l’attester

      (voir la lettre de Vuk Draskovic aux écrivains israéliens de 1985), et que cela allait recommencer ­ discours terrifiant qui, martelé avec force pendant des années, a évidemment affolé les populations et déroulé le tapis rouge aux milices tchetniks comme à l’armée captée par Belgrade (hommage aux déserteurs serbes).

      Lorsqu’on dit, en Croatie ou en Bosnie, que cette guerre est une répétition déplacée de la Seconde Guerre mondiale, la plupart des gens accueillent cette interprétation comme une évidence. Ils ajoutent même : vous ne pourrez rien faire, cela recommencera encore. La question qui se pose ­ que je leur pose quand je vais là-bas faire des conférences et que je pose à la France et à l’Union européenne ­ est donc : à quoi sommes-nous prêts pour éviter que ce mécanisme de répétition fasse encore son oeuvre ?

      Construire la paix dans les Balkans suppose d’avoir de cette guerre une lecture rigoureuse, mais celle-ci ­ bousculant les idées reçues comme les cadres d’expertise traditionnels ­ ne pouvait que rencontrer le mur du déni, solide, que Peter Handke a contribué à consolider, avec un certain nombre de signataires de la pétition d’Anne Weber. Grâce à Bruno Bayen et à Marcel Bozonnet, cette « affaire » salutaire l’ébranle. De quel côté tombera-t-il ? Au moins les voix qui s’élèvent éclairent-elles, d’une lumière un peu sombre parfois, les positions des uns et des autres."

      (1) Voir le Cas Handke, éd. Inventaire-Invention, 2003.

      (2) De l’auteur. Philippe Rey éditeur, 2005.

  • Dans sa vaste documentation sur la question yougoslave, Libération semble avoir oublié aujourd’hui "La Croisade des fous" de Diana Johnstone.

    La lecture de "La Croisade des fous" est essentielle pour tous ceux qui veulent comprendre les causes, les effets, le vrai et le faux dans les guerres des Balkans depuis le début des années 90. Le livre devrait être une priorité surtout pour la gauche, dont une grande partie s’est laissée emporter par la ligne du parti de l’OTAN et par un déluge de propagande faisant croire qu’il s’agissait, pour une fois, d’un cas d’intervention occidentale bien-intentionnée ayant des résultats bénéfiques. (Ces commentaires sont du co-auteur de "La Fabrique de l’Opinion Publique").

    Traduit de l’anglais par l’auteur aux éditions "Le Temps des Cerises" en Novembre 2005.
    Sous-titre de l’édition française : "Yougoslavie, première guerre de la mondialisation".

    Jacques

    • J’ai besoin de comprendre comment ayant vécu des siècles ensemble, des gens s’aperçoivent que leurs différences sont désormais trop grandes pour cohabiter plus longtemps ; imaginez les Basques et les Béarnais se disputant leurs frontières dans les Pyrénées Atlantiques, chassant de leurs "territoires" proclamés ceux qui ne sont pas de leur "ethnie"... Il y a de plus en plus de moments pénibles, dans la Crise du Capitalisme que nous vivons, où on pense que ça pourrait arriver, tellement que le suivisme, la Connerie et le racisme prennent de la place dans les rapports humains. Jdes Pyrénées

    • à J des Pyrénées ,
      ""J’ai besoin de comprendre comment ayant vécu des siècles ensemble, des gens s’aperçoivent que leurs différences sont désormais trop grandes pour cohabiter plus longtemps ""

      Le probleme , c’est qu’ils n’ont pas vecu des siecles ensemble , il ont vecu à coté les uns des autres , et se sont entretués à longueur de temps .
      Si l’on prend les Serbes de Krajina , ils ont été installés sur ces terres en tant que paysans /soldats par l’empire autrichien pour lutter contre les poussées turques . Le vingtieme siecle a été pour ces pays le siecle de l’horreur connue , mais tout au long de l’histoire la memoire n’est porteuse que de crimes et de vengeances croisées .
      En 1941 , les croates se rangent du coté d’hitler , et la guerre en yougoslavie fait passer l’occupation de la france comme un camps de repos pour l’armée allemande , en Yougoslavie le fin fond de l’horreur fut dépassé , entre les allemands et la resistance , entre la resistance elle meme, entre les serbes et les croates , etc ........
      A la mort de Tito , les rivalités au sein de la ligue des communistes , ont cherché la caution ethnique pour assurer leur bases . et la chanson du diable s’est faite entendre de nouveau .

      claude de toulouse .

  • Elles sont belles ces phrases. Mais attention tout de même à ne pas oublier, à toujours se soucier de la mémoire. A vouloir enterrer les faits horribles, à vouloir les teinter de mensonge, on reproduit les erreurs du passé.
    Il y a une histoire en Europe, la nier, c’est se nier soi même, c’est nier son prochain, c’est la fuite du désespoir, c’est le néant, ensuite.
    Pour un artiste, un écrivain, l’engagement de sa parole est essentiel, il faut l’assumer. Peter Handke semble clairement assumer ses propos, ses actes. Il se fait le porte parole de l’oubli. Cela ne mérite-t-il pas que l’on s’interroge ? Que l’on apprenne ? Que l’on ouvre des livres pour mieux connaître ?
    Handke, par ses déclarations, ne fait plus de la littérature, il fait de la politique. Et c’est en cela que sa pièce a été censuré. Car il fait de la politique révisionniste de l’histoire, de faits avérés.
    Le rôle de l’OTAN dans cette histoire est très criticable, c’est vrai. Et il faut critiquer l’OTAN.
    Mais il faut surtout critiquer les propos de Handke, ils sont indmissibles.

    • ""Peter Handke semble clairement assumer ses propos, ses actes. Il se fait le porte parole de l’oubli.""
      Il ne se fait pas le porte parole de l’oubli , il réintroduit dans l’histoire , la parole du peuple Serbe, qui dans cette histoire abominable a eté ,et reste désigné comme le seul responsable , pour la convenance de l’allemagne , du vatican et de l’OTAN .
      claude de toulouse

    • La parole du peuple serbe ? Le "peuple" serbe c’était aussi la résistance à Milosevic. Quid de cette résistance à travers ses propos ? Au contraire, en reprenant la cause de Milosevic, il jette un voile de mépris sur la résistance au nationalisme, et sur les morts dus au régime de Milosevic.

    • C’est toujours consternant de voir la facilité avec laquelle on simplifie à outrance la guerre civile en ex-yougoslavie.

      En quoi Handke propage il l’oubli ? Nie t’il les massacres commis a Srebrenica ? Non. Cherche t’il a en atténuer l’importance ? non.
      Au contraire, Handke rapelle a ceux qui voudrait bien simplifier l’histoire en effacant de la memoire collective certains faits que les atrocités n’ont pas été commises par un seul camp.

      Alors que c’est Milosevic qui est couramment comparé à Hitler (rappelez-vous ces affiches 4x3 placardée en France à l’époque), se souvient t’on que Franjo Tudjman le 1er président croate a réhabilité drapeaux, symboles et mémoire des sinistres oustachis, les tristements célèbres collabos croates durant la 2eme guerre mondiale ?

      Loin de moi l’idée de "défendre" l’action de Milosevic, mais je ne peux me résoudre à hurler avec les loups atlantistes.

      Au fait pourquoi ne s’interroge t’on pas également sur la provenance des armes ayant sévis pendant la guerre civile ?

      Jips

    • en Serbie , le seul parti nationaliste , le parti radical serbe de Vojislav SESELJ , a été battu aux elections par le parti socialiste de MILOSEVIC , alors que le parti nationaliste deTUDJMAN l’emportait en croatie , et qu’en Bosnie Herzégovine les partis nationalistes musulman , serbe , croate , dominaient le parlement . Ce n’est pas parce que la presse occidentale a qualifié à outrance Milosevic d’ultra nationaliste que cela correspondait à la réalité politique de la Serbie .

      claude de toulouse .

  • Que bellaciao ouvre un débat sur la "censure" dont est victime le théatreux pro serbe, je comprends, qu’on publie un texte ou il y dévelloppe ces thèses nationalistes, j’ai du mal...

    • Guelfings m’a répondu hier soir :

      Monsieur,
      J’ai lu votre réponse. Soit, au moins vous n’êtes pas de mauvaise fois. Mais je vous assure que, concernant le Rwanda, la désinformation en France est un fait avéré. Lisez les livres de Jean Paul Gouteux, tout est très clair, la France est impliquée et il existe, du coup, un véritable tabou sur ce génocide (car il y en a bien un et un seul, celui des hutus envers les tutsis) C’est une affaire tellement grave qu’elle est passée sous silence.

      Concernant Handke, je ne peux que vous conseillez de lire "Le cas Handke, Louise L. Lambrichs, Inventaire/Invention édition, 2003." "En 1996, Peter Handke demande publiquement « Justice pour la Serbie ». Cet engagement unilatéral, prenant la défense d’un régime qui mène une guerre sanglante et a renoué avec une idéologie de nettoyage ethnique remontant en Serbie au XIXe siècle, suscite à l’époque de nombreuses polémiques. L’écrivain estimé, contestataire, des années soixante-dix aurait-il « disjoncté » ? En 2002, Handke récidive en publiant un témoignage sur le procès de Milosevic, sur la culpabilité duquel il s’interroge. C’est l’occasion pour Louise L. Lambrichs, très engagée elle-même dans ce conflit, de s’interroger à son tour. Pourquoi Handke prend-il une telle position ? Relisant toute son oeuvre, elle y découvre une réponse qui permet de le situer et de comprendre la logique interne qui régit aussi bien l’oeuvre que l’engagement politique de cet écrivain emblématique d’une génération."

      Cordialement

      En deux mots :
      la désinformation au sujet de l’implication du Rwanda a fortement diminué, et le reportage de France Inter que je citais en parlait. En évoquant (maladroitement) ce génocide et les exactions des revenchards, je souhaitais montrer qu’un peuple peut avoir tort sans que pour autant son adversaire ait raison. En l’occurrence, il me semble que les guerres ethniques africaines en sont généralement un bon exemple ; ou, plus visiblement encore, la guerre entre le IIIème Reich et -l’URSS.
       Handke se sert de tous les prétextes qu’il trouve pour défendre l’indéfendable. Cependant, personne (à ma connaissance) n’a contesté les faits qu’il avance, à savoir le massacre de Serbes par des Musulmans. J’en déduis que c’est hélas vrai, et je crois que Handke, en dénonçant les silences sur ce point, se rend utile à son insu.


      Réponse de Guelfings :

      Vous rendez vous compte de vos propos ? A ce compte là, c’est comme si vous aviez défendu, en son temps, la cause du nazisme. A cette époque aussi, il y a eu des morts allemands. C’est très grave, ce genre de propos. Je vais régulièrement sur votre blog, qui me paraità bon droit engagé, mais là je suis déçu.

      Nb : au Rwanda, la soit disant "guerre ethnique" est le qualificatif retenu pour atténuer la gravité du génocide commis par les Hutus envers les tutsis (preuve que vous êtes mal renseigné).

       Je veux bien qu’on m’accuse d’être mal renseigné, mais en aucun cas de défendre le nazisme. Visiblement vous n’avez pas compris mon propos, mais alors pas du tout. Les exactions nazies on été et sont toujours inadmissibles ; cependant celles de l’URSS, notamment envers leurs prisonniers de guerre, ne le sont pas moins. Désolé, mais dénoncer les crimes d’un camp ne revient pas à prendre aveuglément fait et cause pour l’autre si lui-aussi a tort.
       Je me rends surtout compte de VOS propos : vous montez tout de suite sur vos grands chevaux, cherchant visiblement à débusquer le nazi là où il n’y en a pas. Que cherchez-vous ? A polémiquer dans le vide ? Trouvez une autre cible.
       Cordialement,
       Konrad

    • Puisque Konrad nous fait profiter de ses échanges personnels, je mets mon grain de sel !
      Je suis d’accord avec son contradicteur, on ne peut pas mettre tout sur le meme plan. Je suis choqué quand je lis que les crimes de L’urss sont de meme nature que ceux de l’allemagne nazie. A ce compte là, tous les crimes se ressemblent et finalement le régime nazi n’était pas si pire que cela ....
      Je suis choqué également quand on emploie le terme de guerre ethinque pour parler du génocide rwandais : il y a là un révisionisme dont l’auteur, en toute bonne fois n’a pas conscience. Les crimes qui ont pu etre perpétré par des revanchards tutsis après la chute des hutus ne peuvent pas etre comparés au génocide lui-même. Oserions nous qualifier la shoah de crime ethnique ? Contrairemetn à ce qu’écrit Konrad, la désinformation continue. La France, a toujours du mal à reconnaitre la réalité du génocide (j’écris du génocide et non du crime de masse) sans doute pour faire oublier le soutien français au régime nazi des hutus. Ne pas oublier que le soutien logistique français a continué meme après le déclenchement du génocide. Et n’oublions pas non plus la fameuse opération "turquoise" dont le but affiché était la séparation des "belligérants" mais qui en réalité a permis la protection et la fuite des génocidaires hutus devant l’avancée du FPR.

      Audelà du génocide rwandais qui est un cas à part comme le sont les 3 génocides du 20eme siècle, les africains se font ils la guerre uniquement pour des raisons de difference d’ethnie ? ou aussi parce qu’il y a derrière des enjeux politiques et/ou économiques ? N’y a t’il aucune ingérence de pays tiers dans ces guerres ? En particulier en afrique francophone la france est elle absente de ces conflits ? N’attise t’elle jamais le tribalisme ?

      Jips

    • AU RWANDA ,
      Tout le monde semble oublier que lors du premiers massacre , les extremistes hutus n’ont pas massacrés que des tutsis , mais aussi tous les hutus modérés dont des listes avaient été etablies .
      claude de toulouse .

    • Tout à fait, les hutus opposés au génocide ont été impitoyablement massacrés. De la même façon que les communistes allemands ont été éliminés par les nazis.

      Cela montre bien qu’il est vain de prendre "l’ethnicisme" comme seule grille de lecture des conflits africains.

      Jips

    • OK autant pour moi. Cependant on ne va tout de même pas tomber dans le négationnisme des exécutions massives, des déportations dans les goulags et de la torture ? C’est tout ce que je voulais dire : la barbarie des nazis ne justifie pas les pratiques soviétiques.

      Mais, Jips, je ne cherche pas tant à faire profiter de mes "échanges personnels" qu’à répondre à mon "contradicteur", pour le cas où il viendrait chercher ma réponse après le commentaire qui l’a indigné (à cause d’un malentendu). Mais comme d’autres personnes que Guelfings peuvent lire cette réponse, je suis bien obligé de mentionner ce qu’il me dit...

      Konrad

  • UNE FOIS DE PLUS...

    Une fois de plus, on peut mesurer les ravages de la pensée unique et son efficacité à faire de nous des moutons ! Et encore, j’ai l’impression ici d’insulter les moutons...
    Oui, la guerre est atroce. La guerre civile tout autant que la "vraie" guerre... celle des militaires... celle qui tue le plus de civils !
    Et dans la guerre, on a pu le vérifier aussi tant de fois, dans les "2" camps on a une étrange capacité d’émulation avec l’autre pour faire toujours mieux dans l’atroce !

    Dans la littérature noire (polards) concernant ces conflits dans l’ex-Yougoslavie, on en trouve abondamment trace (voir "Tueuse" d’Annie Barrière chez L’Ecailler du Sud, ou "Le 4° cerveau" de Dominique Lombardi chez le même éditeur, par exemple).
    Et c’est vrai qu’il ne s’agit plus d’avoir l’indignation sélective... Il faut voir, et voir tout. Et voir n’est pas excuser ou prendre parti...

    Le seul parti à prendre est le parti de l’homme contre la monstruosité en chacun de nous, chaque fois que l’un s’abolit dans un collectif totalitaire.
    Ainsi, la vérité complexe, ou la complexité véritable, à laquelle nous appelle Peter HANDKE nous permet de rompre avec les réflexes complices auxquels nous appelle le dogme et le rêve libéral, à la recherche de nouveau marchés, en Europe Orientale comme ailleurs.
    On peut ne pas partager toutes les péoccupations d’Handke, mais on ne doit pas accepter de se laisser dicter ses rêves et ses raisons de vivre par le prêt à penser, libéral ou autre.

    Donc merci Handke pour ce travail de cheminement difficile dans la connaissance de ce Monde terrible mais aussi merveilleux où nous vivons !

    NOSE DE CHAMPAGNE

    • ATTENTION A CE QUI VA SE PASSER AU MONTENEGRO !!

      Les minorités albanaises et musulmanes vont recommencer leurs manoeuvres et demander l’independance , alors que la majorité de la population orthodoxe se considére comme serbe .
      Pour certains le demembrement de la Serbie , n’est pas terminé !

      claude de toulouse .

    • Les SERBES sont nos frères qui doivent lutter pour survivre.
      Ne les oublions pas.
      Merci P Handke

    • je suis très flattée d’être citée à propos d’un article concernant Peter Hanke. Je suis l’auteur du 4eme cerveau, Dominique Lombardi.
      Mon livre est une fiction bien sûr, écrite à partir de conversations et de rencontres. Mon voyage (en été) m’a emmenée autant en bosnie qu’en serbie.
      Ce qu’explique Nose de Champagne est exactement ce que j’ai voulu dire. La guerre est attroce quelque soit le camp et à part les véritable boureaux, les autres ne font que subir. La souffrance n’a pas de frontière. C’est une lapalissade mais trop de gens l’ont oublié à cause de la sacro sainte pensée correcte qui hante nos médias.
      Je ne connais pas Peter Hanke et espère le rencontrer un jour.
      Dominique Lombardi

  • merci d’avoir publié cet article, il est insupportable ce qui se passe depuis de nombreuses années en France et en occident avec la manipulation de l’opinion publique, toute guerre est sale et il n’y a pas les "bons" d’un côté et les "mauvais" de l’autre, les Balkans sont une affaire trop douloureuse et trop complexe...

    A.