Accueil > COMMENT POUVEZ-VOUS ACHETER LE CIEL, LA TERRE ?

COMMENT POUVEZ-VOUS ACHETER LE CIEL, LA TERRE ?

Publie le dimanche 16 mars 2003 par Open-Publishing

CE TEXTE EST DEVENU UN CLASSIQUE. IL EST TOUJOURS INSPIRANT DE LE
RELIRE...

De : http://www.abacq.net/seattle/index.htm

Chef Seattle : COMMENT POUVEZ-VOUS ACHETER LE CIEL, LA TERRE ?

Seattle (1786 ?-1866) est avant tout le nom d’un grand chef indien des
tribus Dumawish et Suquamish. Il est connu en particulier pour son
discours
de 1854 lors de négociations avec le gouvernement des Etats Unis, dans
lequel il exprimait son refus de vendre les territoires indiens.

L’authenticité des mots est contestée, et il existe au moins trois
versions
du texte. Grâce aux notes prises par le docteur Henry Smith,
négociateur du
gouvernement, une première version fût publiée dans le Seattle Sunday
Star
en octobre 1887. Celle qui fait aujourd’hui figure de référence date
des
années 70

De : http://www.abacq.net/seattle/comment.htm

Comment pouvez-vous acheter ou vendre le ciel, la chaleur de la terre ?

L’idée nous paraît étrange. Si nous ne possédons pas la fraîcheur de
l’air
et le miroitement de l’eau, comment est-ce que vous pouvez les acheter
 ?

Chaque parcelle de cette terre est sacrée pour mon peuple.

Chaque aiguille de pin luisante, chaque rive sableuse, chaque lambeau
de
brume dans les bois sombres, chaque clairière et chaque bourdonnement
d’insecte sont sacrés dans le souvenir et l’expérience de mon peuple.

La sève qui coule dans les arbres transporte les souvenirs de l’homme
rouge.

Les morts des hommes blancs oublient le pays de leur naissance
lorsqu’ils
vont se promener parmi les étoiles. Nos morts n’oublient jamais cette
terre
magnifique, car elle est la mère de l’homme rouge. Nous sommes une
partie
de la terre, et elle fait partie de nous. Les fleurs parfumées sont nos
soeurs ; le cerf, le cheval, le grand aigle, ce sont nos frères. Les
crêtes
rocheuses, les sucs dans les prés, la chaleur du poney, et l’homme,
tous
appartiennent à la même famille.

Aussi lorsque le Grand chef à Washington envoie dire qu’il veut acheter
notre terre, demande-t-il beaucoup de nous. Le Grand chef envoie dire
qu’il
nous réservera un endroit de façon que nous puissions vivre
confortablement
entre nous. Il sera notre père et nous serons ses enfants. Nous
considérons
donc, votre offre d’acheter notre terre. Mais ce ne sera pas facile.
Car
cette terre nous est sacrée.

Cette eau scintillante qui coule dans les ruisseaux et les rivières
n’est
pas seulement de l’eau mais le sang de nos ancêtres. Si nous vous
vendons
de la terre, vous devez vous rappeler qu’elle est sacrée et que chaque
reflet spectral dans l’eau claire des lacs parle d’événements et de
souvenirs de la vie de mon peuple. Le murmure de l’eau est la voix du
père
de mon père.

Les rivières sont nos frères, elles étanchent notre soif. Les rivières
portent nos canoës, et nourrissent nos enfants. Si nous vous vendons
notre
terre, vous devez désormais vous rappeler, et l’enseigner à vos
enfants,
que les rivières sont nos frères et les vôtres, et vous devez désormais
montrer pour les rivières la tendresse que vous montreriez pour un
frère.
Nous savons que l’homme blanc ne comprend pas nos moeurs. Une parcelle
de
terre ressemble pour lui à la suivante, car c’est un étranger qui
arrive
dans la nuit et prend à la terre ce dont il a besoin. La terre n’est
pas
son frère, mais son ennemi, et lorsqu’il l’a conquise, il va plus loin.
Il
abandonne la tombe de ses aïeux, et cela ne le tracasse pas. Il enlève
la
terre à ses enfants et cela ne le tracasse pas. La tombe de ses aïeux
et le
patrimoine de ses enfants tombent dans l’oubli. Il traite sa mère, la
terre, et son frère, le ciel, comme des choses à acheter, piller,
vendre
comme les moutons ou les perles brillantes. Son appétit dévorera la
terre
et ne laissera derrière lui qu’un désert.

Il n’y a pas d’endroit paisible dans les villes de l’homme blanc. Pas
d’endroit pour entendre les feuilles se dérouler au printemps, ou le
froissement des ailes d’un insecte. Mais peut-être est-ce parce que je
suis
un sauvage et ne comprends pas. Le vacarme semble seulement insulter
les
oreilles. Et quel intérêt y a-t-il à vivre si l’homme ne peut entendre
le
cri solitaire de l’engoulevent ou les palabres des grenouilles autour
d’un
étang la nuit ? Je suis un homme rouge et ne comprends pas. L’Indien
préfère le son doux du vent s’élançant au-dessus de la face d’un étang,
et
l’odeur du vent lui-même, lavé par la pluie de midi, ou parfumé par le
pin
pignon.

L’air est précieux à l’homme rouge, car toutes choses partagent le même
souffle.

La bête, l’arbre, l’homme. Ils partagent tous le même souffle.

L’homme blanc ne semble pas remarquer l’air qu’il respire. Comme un
homme
qui met plusieurs jours à expirer, il est insensible à la puanteur.
Mais si
nous vous vendons notre terre, vous devez vous rappeler que l’air nous
est
précieux, que l’air partage son esprit avec tout ce qu’il fait vivre.
Le
vent qui a donné à notre grand-père son premier souffle a aussi reçu
son
dernier soupir. Et si nous vous vendons notre terre, vous devez la
garder à
part et la tenir pour sacrée, comme un endroit où même l’homme blanc
peut
aller goûter le vent adouci par les fleurs des prés. Nous considérerons
donc votre offre d’acheter notre terre. Mais si nous décidons de
l’accepter, j’y mettrai une condition : l’homme blanc devra traiter les
bêtes de cette terre comme ses frères.

Je suis un sauvage et je ne connais pas d’autre façon de vivre.

J’ai vu un millier de bisons pourrissant sur la prairie, abandonnés par
l’homme blanc qui les avait abattus d’un train qui passait. Je suis un
sauvage et ne comprends pas comment le cheval de fer fumant peut être
plus
important que le bison que nous ne tuons que pour subsister.

Qu’est-ce que l’homme sans les bêtes ?. Si toutes les bêtes
disparaissaient,
l’homme mourrait d’une grande solitude de l’esprit. Car ce qui arrive
aux
bêtes, arrive bientôt à l’homme. Toutes choses se tiennent.

Vous devez apprendre à vos enfants que le sol qu’ils foulent est fait
des
cendres de nos aïeux. Pour qu’ils respectent la terre, dites à vos
enfants
qu’elle est enrichie par les vies de notre race. Enseignez à vos
enfants ce
que nous avons enseigné aux nôtres, que la terre est notre mère. Tout
ce
qui arrive à la terre, arrive aux fils de la terre. Si les hommes
crachent
sur le sol, ils crachent sur eux-mêmes.

Nous savons au moins ceci : la terre n’appartient pas à l’homme ;
l’homme
appartient à la terre. Cela, nous le savons. Toutes choses se tiennent
comme le sang qui unit une même famille. Toutes choses se tiennent.

Tout ce qui arrive à la terre, arrive aux fils de la terre.

Ce n’est pas l’homme qui a tissé la trame de la vie : il en est
seulement
un fil. Tout ce qu’il fait à la trame, il le fait à lui-même.

Même l’homme blanc, dont le dieu se promène et parle avec lui comme
deux
amis ensemble, ne peut être dispensé de la destinée commune. Après
tout,
nous sommes peut-être frères. Nous verrons bien. Il y a une chose que
nous
savons, et que l’homme blanc découvrira peut-être un jour, c’est que
notre
dieu est le même dieu. Il se peut que vous pensiez maintenant le
posséder
comme vous voulez posséder notre terre, mais vous ne pouvez pas. Il est
le
dieu de l’homme, et sa pitié est égale pour l’homme rouge et le blanc.

Cette terre lui est précieuse, et nuire à la terre, c’est accabler de
mépris son créateur. Les Blancs aussi disparaîtront ; peut-être plus
tôt
que toutes les autres tribus. Contaminez votre lit, et vous suffoquerez
une
nuit dans vos propres détritus.

Mais en mourant vous brillerez avec éclat, ardents de la force du dieu
qui
vous a amenés jusqu’à cette terre et qui pour quelque dessein
particulier
vous a fait dominer cette terre et l’homme rouge. Cette destinée est un
mystère pour nous, car nous ne comprenons pas lorsque les bisons sont
tous
massacrés, les chevaux sauvages domptés, les coins secrets de la forêt
chargés du fumet de beaucoup d’hommes, et la vue des collines en
pleines
fleurs ternie par des fils qui parlent.

Où est le hallier ? Disparu. Ou est l’aigle ? Disparu.

La fin de la vie, le début de la survivance.
Chef Seattle, 1854.