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Conte médiatique : l’émission de Daniel Mermet " Là-bas si j’y suis "

Publie le vendredi 30 juin 2006 par Open-Publishing
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de Serge Halimi

Imaginons une radio de service public ordinaire qui perd des auditeurs. Elle peut imputer sa défaillance à son manque d’originalité (elle est devenue trop semblable à ses concurrents), ou à sa distinction trop prononcée (elle est trop différente des autres stations). Elle peut aussi ne pas s’en soucier, partant de l’idée qu’une radio de service public n’est pas dans une logique de concurrence avec des antennes dont la principale mission est de vendre des oreilles disponibles aux annonceurs.

Imaginons à présent, sur cette même radio, une émission qui, non seulement conserve, mais gagne des auditeurs en faisant, vraiment, écouter sa différence : reportages dans des pays oubliés, enquêtes sur la réalité sociale, refus de tendre machinalement son micro aux "bons clients" des médias. Imaginons en plus que chaque responsable de la radio en question rende hommage à une telle émission et se déclare fier de l’héberger sur son antenne...

Eh bien, nous y sommes. Et que se passe-t-il ? Le directeur de la radio publique qui perd des auditeurs - en particulier depuis la campagne du référendum de mai 2005, période où, comme ses « concurrentes », elle avait milité pour le « oui » au traité de Constitution européenne - envisage de déplacer à une heure de moindre écoute l’émission qui, elle, a gagné en audience depuis un an, peut-être parce que ce fut l’un des rares endroits où, lors de la campagne référendaire, le point de vue (majoritaire) des dissidents eut droit à la parole.

Ceux qui ne perçoivent pas la logique lumineuse d’un tel projet ne comprennent décidément rien à France Inter. Apparemment, ces malheureux sont encore nombreux : depuis le 16 juin, une moyenne de dix mille personnes par jour protestent contre l’hypothèse d’une délocalisation horaire (de 17 heures à 15 heures) qui pèse sur l’émission de Daniel Mermet « Là-bas si j’y suis » (1). Laquelle émission semble être menacée chaque année, l’été venu, par une nouvelle épée de Damoclès. L’an dernier, il était déjà question de ne plus la diffuser que quatre jours par semaine (2). Et l’an prochain ?

(1) Le texte de leur pétition se trouve sur : http://petition.la-bas.org

(2) Lire « Quand Radio France “décrypte” », Le Monde diplomatique, août 2005.

http://www.monde-diplomatique.fr/2006/07/HALIMI/13641

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