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Une vision très formatée du réel

Publie le vendredi 26 janvier 2007 par Open-Publishing

Parmi tous les messages que je reçois, celui de Jean Paul Duparc est édifiant, je partage pleinement son analyse. Confiance, la situation bouge très vite, voici sa contribution :

Fanny nous a diffusé il y a quelques jours le texte d’introduction de la réunion des 20 et 21 janvier, et Gérard nous avait fait suivre il y a quelques jours le texte de R.M.Jenar intitulé « ma part de vérité ».

Pour contribuer à un échange bien nécessaire à l’issue de la séquence politique de ce deuxième semestre 2006, voici juste quelques remarques. Le dénominateur commun a ces textes semble être une vision très formatée du réel. Il y aurait « le vieux », les partis, les « appareils », et le « neuf », les collectifs et les « logiques d’appareil » auraient brisé « l’unité ».(1)

Un ensemble de difficultés

Chaque opinion est respectable mais l’échec à aboutir en décembre résulte d’un ensemble de données que ces analyses ne permettent pas de rendre.

Dès l’origine, il y a eu des difficultés à rassembler l’ensemble de « l’arc des forces du Non de gauche » dès lors que la tendance majoritaire de la Lcr n’y participait pas. ( cela ne renvoyait pas à une « querelle d’appareil », mais à une vraie différence sur la nature du rassemblement à opérer). Le rôle particulier de José Bové en novembre quand, au vu des premières remontées des débats et des choix des collectifs, il décide de retirer avec fracas sa candidature. Déjà sur les « 3 B », il en manquait 2..Acte politique qui sera suivi quelques jours plus tard du lancement de la pétition invitant MG.Buffet à retirer sa candidature, pétition malheureusement signée par d’autres candidats à la candidature. Ajoutons les hésitations parfois des Verts du Non ou de PRS, en partie tiraillés entre leur formation d’origine et le rassemblement antilibéral.

Du côté du Pcf, si son engagement au niveau national a été entier il y a eu une implication inégale dans le rassemblement selon les départements ou régions.
Et, pour toutes les sensibilités du rassemblement, une difficulté à ce que la démarche sorte des cercles militants pour devenir totalement populaire.

Et une difficulté récurrente principale

Celle de l’objectif du rassemblement. C’est une question que l’on a pu croire réglée avec le texte Stratégie du 10 septembre. C’est pourtant de mai à décembre, une question qui va être en toile de fond de tous les débats. Etions nous, avec le rassemblement antilibéral, dans un processus d’ « union populaire », de rassemblement, visant à terme à influencer de façon déterminante toute la gauche ou presque et à la rassembler dans une nouvelle majorité pour battre la droite durablement ? Vision défendue par Marie George Buffet et portée par le texte du 10 septembre. Ou bien l’essentiel était-il dans la « recomposition » de la gauche, et principalement de « la gauche de la gauche » ? Vision portée par une autre approche du texte du 10 septembre. Avec d’ailleurs différentes optiques qui sont défendues pour cette « recomposition », « confédération », ou « fusion ». Celle de la Lcr, très ancrée une vision statique des « deux gauches » ; celle de PRS proposant une sorte de « Linskpartei » inspirée de l’expérience allemande autour d’un candidat socialiste du Non ; ceux qui considèrent que les partis sont dépassés voire disqualifiés et qu’il faudrait construire un « mouvement », José Bové pouvant en être la personnalité marquante, etc.

L’absence de « consensus » au niveau national entre les différentes sensibilités résulte bien d’une confrontation qui s’est aiguisée entre ces différentes approches et non pas de l’impossibilité à se mettre d’accord sur « un nom sur le bulletin de vote ».(2)

D’autant plus que ce débat, où des partenaires liaient de plus en plus « projet(s) de recomposition de la gauche de la gauche et choix de la candidature », sans être illégitime, éloignait de ce qui nous rassemble tous depuis le 10 mai, la volonté de battre la droite et de réussir à gauche par un rassemblement majoritaire ouvert.

A propos de l’appel à José Bové

C’est pour cela que l’approche en terme de « querelles d’appareil » m’apparaît particulièrement réductrice. C’est aussi pour cela aussi que l’actuel appel en faveur d’une relance de la candidature de José Bové m’apparaît principalement porteur de confusion.

Les initiateurs de l’appel font « comme si » l’impossibilité d’aboutir à une candidature unitaire en décembre avait résulté uniquement d’un désaccord sur le « nom à mettre sur le bulletin de vote ». Et José Bové repropose sa candidature, après l’avoir retirée une première fois en novembre, comme « solution » à cette difficulté ; il s’agirait de bousculer l’égoïsme des « appareils politiques ».

Le problème, c’est que ce n’est pas sur cette difficulté qu’a buté l’accord en décembre. Les discussions de novembre comme de décembre ont mis en lumière des différences fortes sur le « sens » à donner à cette candidature. A quoi devait servir cette candidature pour le présent et l’avenir ?

De nombreux textes publiés en janvier, de différents auteurs, ont d’ailleursconfirmé ces approches tout à fait différentes du texte du 10 septembre. (Claude Debons, Yves Salesse, Patrice Cohen-Séat, RM.Jenar, d’autres encore.)

Comme a pu l’écrire Patrice Cohen Séat, ce sont des débats « légitimes et profonds », « sans doute vitaux pour l’avenir de la gauche » on ne voit pas comment « ces différences, ou différents, auraient pu se dépasser en quelques jours, voire quelques semaines ».(3)

Or cela, José Bové, comme les initiateurs de l’appel, ne peuvent l’ignorer.

Et faire croire, ou utiliser l’aspiration unitaire pour faire croire le contraire, en présentant un « nom » ou une « personne » comme une solution au problème, n’est pas vraiment aider à comprendre ou à solutionner les problèmes dans la durée.

C’est si vrai, que nombre d’intervenants de la réunion de Montreuil et José Bové lui-même ont laissé entendre au final que, en tout état de cause, il « avait envie » d’être candidat. Délaissant la présentation précautionneuse de « candidature trait d’union pour rassembler toutes les sensibilités », pour plus prosaïquement alors représenter et défendre une des options en présence d’une recomposition de la gauche de la gauche. Ce n’est pas illégitime, mais comme l’ont dit le MARS et la Gauche Républicaine à la fin du week-end, ce choix est alors « davantage source de division, de cloisonnement, de délimitation des différents courants de la gauche antilibérale, qu’une chance pour relancer à moyen terme le rassemblement de ce qui fut le non de gauche, et ce dans un objectif majoritaire ». Ces deux mouvements ont alors précisé qu’ils « ne souhaitait pas être acteurs de ce choix ».

En l’état la démarche de José Bové apporte donc plus de risques de confusions multiples voire de division aggravée qu’autre chose. Comme d’ailleurs aucune autre candidature, la candidature éventuelle de José Bové ne peut prétendre être celle « du » rassemblement antilibéral puisque aucune n’a pu réunir de « double consensus ». Et il peut encore moins prétendre être celles des collectifs locaux dont il aura finalement esquivé la consultation à l’automne, pour aujourd’hui la contourner.(4)

« Ce qui importe le plus maintenant »

C’est évidemment infiniment désagréable pour tous de constater que l’on n’a pas pu aboutir.(5) Rappelons que ce n’est qu’au vu de cette impasse, confirmée par les réunions entre sensibilités et du collectif national, que le Pcf et Marie George Buffet ont pris leurs responsabilités fin décembre. Qui n’est pas la responsabilité de « briser » le mouvement comme certains se complaisent à le ressasser, mais qui est plutôt la maturité et le réalisme de savoir tenir compte d’une double impasse confirmée au niveau national : L’existence de blocages indépassables entre les différentes sensibilités réunies sur le « sens » de la candidature et le refus de travailler à partir du souhait préférentiel émis par les collectifs locaux. Alors même que la campagne était engagée de la part de la droite, de l’extrême droite et du social libéralisme, et que la gauche antilibérale ne pouvait rester plus longtemps en « conclave » sans issue sur la « candidature »

En prenant acte avec regret qu’aucune candidature ne faisait consensus pour l’élection présidentielle et ne représente donc tout l’arc des forces impliquées dans l’appel du 10 mai. En prenant acte aussi que sa proposition de candidature avait été la plus partagée dans la consultation des collectifs avant comme après St Ouen.

En appelant à ne pas mettre entre parenthèse la présidentielle dans le combat pour un rassemblement antilibéral et ses idées. En posant les principes d’une candidature de Gauche Populaire et Antilibérale ouverte à toutes celles et ceux qui librement, membres des collectifs et au delà, voudront en faire une oeuvre collective respectueuse de la personnalité de chacun.

Les actes posés comme ses interventions faites depuis confirme ce choix d’une campagne qui n’est pas conçue ni « autour » d’un parti, ni d’une « personne » qui serait un recours. Avec au cour une vraie ambition de rassemblement pour le changement (6)

Comme l’indiquait dernièrement Elisabeth Gauthier et Patrice Cohen-Séat : « Certains décident de s’engager dans cette campagne avec cette candidature ; d’autres font d’autres choix. Ce qui importe le plus maintenant, c’est de tout faire pour clarifier les enjeux et permettre à notre peuple, à la présidentielle et aux législatives d’exprimer aussi fortement que possible sa volonté d’une alternative antilibérale de gauche. Et poursuivons le débat, agissons ensemble, sans que cela vaille quitus ou ralliement de qui que ce soit, à travailler pour l’avenir à l’objectif crucial pour notre peuple d’une nouvelle majorité à gauche, permettant de battre la droite et de réussir enfin à changer la vie ».

C’est bien l’essentiel.
Cordialement, Jean Paul Duparc

(1) L’opposition « partis »/ « collectifs » est bien souvent infondée ; bien souvent des militants de partis ont contribué à initier des collectifs ; et le dénigrement de la notion de « parti politique », lesquels seraient « dépassés » est tout sauf une « idée neuve » et non sans risque pour la démocratie. Dire cela n’enlève rien au travail approfondi à accomplir pour refonder les formes et les structures de la vie politique. Il n’est d’ailleurs pas juste de renvoyer dos à dos Lcr et Pcf, qui a signé l’appel du 10 mai, s’est impliqué dans l’émergence de collectifs locaux, à co-élaborer les textes Stratégies et le programme, et à soumis sa proposition de candidature au processus de consultation des collectifs.

(2) et (3) voir la lettre de Patrice Cohen Séat, l’un des représentants du Pcf au Collectif National, sur les discussions qui ont eu lieu les 18 et 19 décembre entre les sensibilités politiques et au Collectif National ; Elle montre par exemple que la délégation du Pcf a bien interrogé sur la possibilité de construire un consensus entre « sensibilités » autour du nom de F.Wurtz, premier consensus qui aurait pu alors être soumis aux collectifs locaux ; Que ce consensus n’existait pas, pas plus sur ce nom que sur aucun autre. ( les éléments d’informations que cette lettre comporte ont été mis en ligne dès décembre sur le site AlternativeUnitaire et n’ont pas été démenties par les autres sensibilités)

Ceci explique aussi probablement pourquoi nos partenaires n’ont jamais voulu aborder la possibilité de construire un consensus, ni à partir de la proposition de Marie George Buffet, pourtant la plus choisie par les collectifs locaux, ni non plus à partir de celle évoquée de Francis Wurtz, qui n’est pourtant pas « secrétaire national ». Ils n’étaient pas porteurs du type de « recomposition » que ces partenaires liaient au choix de la candidature

(4) il n’y a nul besoin « d’interprétation fallacieuse » (comme j’ai pu le lireici ou là) de la consultation des collectifs pour justifier la candidature de Marie George Buffet. Même le Collectif National dans la deuxième consultation des collectifs locaux a pris à son propos la formule « arrivée en tête de la consultation des collectifs ». Rappelons que sa candidature a été choisiepréférentiellement par 55% des collectifs locaux, selon le PV de dépouillement présenté lors de la réunion de St Ouen. Chiffre qui atteint 60% lorsque l’on prend en compte les PV des collectifs qui n’avaient pas pu être intégrés à cette synthèse initiale. Par ailleurs lors de la seconde consultation des collectifs qui a suivi St Ouen, la plus grande proportion des collectifs ont confirmé leur premier choix

(5) je garde le regret que certains de nos partenaires n’aient finalement jamais voulu considérer toutes les candidatures à la candidature à égalité, c’est à dire toutes susceptibles d’être retenues au final, nous n’en serions pas là. Plutôt que de dire que le PCF n’a jamais voulu envisager une autre candidature que celle de Marie George Buffet, le problème n’est-il pas que, pour certains de nos partenaires, si ils ont toléré que Marie George Buffet puisse être « candidate à la candidature », c’était visiblement avec l’idée, arrêtée dès le départ, qu’en aucun cas, , elle ne pouvait être retenue commecandidate.

Et notamment quelque soit l’avis exprimé par les collectifs locaux. Je l’ai exprimé à ma façon lors d’une réunion au Splendid : « on m’a souvent demandé en septembre-octobre ce que je ferais si MGB n’était pas retenue par les collectifs locaux, et j’ai toujours répondu que je ferais campagne quelque soit la candidature retenue par les collectifs et je considère que la réciproque doit être à la base d’un travailler ensemble ». Or cette réciproque a manqué.

(6) chacune et chacun peut consulter ses interventions, à la fois de présentation de candidature le 5 janvier ou depuis sur le site http://www.mgbuffet.org
Retrouvez un site perso de campagne http://perso.orange.fr/m.barrio/