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Temoignage d’un medecin belge en Irak

Publie le samedi 5 avril 2003 par Open-Publishing

Operation barbarie sans limites" en IRAK :
du Dr belge Geert VAN MOORTER,
en direct sous les bombes des tueurs anglo-ricaines, a BAGDAD

Journal de Bagdad, 3 avril, 20 h
Le Dr Geert Van Moorter, par telephone satellite

A propos des atrocites de la guerre, a 100 km de Bagdad
Bert De Belder

"J’ai deux histoires atroces a raconter", attaque d’emblee Geert quand
je
parviens a l’avoir en ligne. "Aujourd’hui, nous nous sommes rendus a
Hilal,
la petite ville pres de Babylone qui a subi de lourds bombardements
hier.

Dans les quartiers pauvres, entre 20 et 25 bombes sont tombees. En une
demi-heure, l’hopital de Hilal a du accueillir quelque 150 patients
gravement
blesses.

Le Dr Mahmoud Al-Mukhtar nous a dit que les blessures avaient ete
provoquees
par des bombes a fragmentation.

Ce sont des bombes qui explosent en de tres nombreux petits projectiles
qui,
ensuite, explosent a leur tour et provoquent des ravages horribles.

Les bombes a fragmentation sont interdites par la legislation
internationale
en matiere de guerre, mais Bush s’en moque comme de sa premiere
chemise !

A l’hopital, j’ai vu des tas de situations vraiment poignantes. Une
famille
de onze personnes, dont six ont ete tuees.

Un pere qui reste tout seul, desempare, avec un seul gosse, alors que
sa
femme et ses deux autres gosses ont ete tues. Des petits enfants qu’on
a du
amputer."

"Ma seconde histoire est encore plus horrible", previent Geert.
"C’est a propos d’un bus de civils qui a ete pris pour cible.

Pas celui de Najaf, dont toutes les infos ont parle partout, mais une
histoire qui, a ma connaissance, n’a encore ete mentionnee nulle part
par les
medias occidentaux.

Il y a trois jours, a al-Sqifal, pres de Hilal, un car de voyageurs a
ete
pris pour cible a un poste de controle americain, et les consequences
sont
atroces.

Selon des temoins, le car s’etait arrete a temps et, sur ordre des
militaires
americains, il avait directement fait demi-tour. Ce qui s’est passe
precisement, ensuite, n’est pas clair, mais un projectile d’une enorme
capac
ite destructrice a frappe le car de plein fouet.

Le Dr Saad El-Fadoui, un chirurgien de 52 ans qui, il n’y a pas si
longtemps,
etudiait encore en Ecosse, a quitte l’hopital de Hilal pour se rendre
sur
place le plus vite possible.

Lorsqu’il m’a raconte ce qu’il avait vu, trois jours apres les faits,
pourtant, il en etait encore tout retourne.

"Les corps etaient tout noirs, carbonises, atrocement mutiles,
carrement
demembres, dechiquetes", soupirait-il. "Dans le car et tout autour, des
tetes
arrachees, des fragments de cervelle, des paquets d’entrailles."

On devine le genre d’arme criminelle de destruction massive qui est
capable
de provoquer une telle horreur.

Personne n’a entendu de deflagration, sur les corps, on n’a retrouve
aucune
trace de shrapnel ou d’eclat.

Un journaliste m’a parle d’une arme a degagement de chaleur, avec du
cuivre
liquide ou quelque chose du genre.

Les Americains peuvent-ils etre aussi sadiques ? Le Dr Saad El-Fadoui
nous a
demande avec insistance de mettre tout en ouvre afin de faire cesser
cette
guerre d’agression atroce."

Geert m’entend mal quand je parle, la ligne n’est pas toujours tres
bonne.

"Pour l’instant, ici, nous sommes sans electricite", m’explique-t-il.

"De vastes quartiers de Bagdad sont sans courant, la nuit derniere, il
y a
encore eu des bombardements tres lourds.

La nuit derniere, de sa chambre a l’hotel, Colette (la collegue de
Geert, le
Dr Colette Moulaert) a vu, juste derriere la mosquee voisine, ici, deux
enormes boules de feu descendre du ciel.

Je pense qu’il s’agit de ces enormes bombes-conteneurs, de 7 ou 8
tonnes, qui
provoquent d’enormes trepidations.

"Je tremble a cause du froid", a dit Colette, mais en fait, il
s’agissait des
trepidations provoquees par l’impact de la bombe.

"Il ne faut pas croire tout ce que montrent CNN et la BBC", nous
previent
Geert. "Le fait qu’aujourd’hui nous ayons pu nous rendre, toute une
equipe de
’boucliers humains’, a Hilal, a 100 km au sud-ouest de Bagdad, prouve
de
facon on ne peut plus convaincante que la capitale irakienne n’est pas
du
tout encerclee ni meme assiegee.

Chemin faisant, nous avons vu tres peu de mouvements des troupes
irakiennes.

Lors de notre trajet d’une centaine de kilometres, nous n’avons vu
aucun
poste de controle irakien, et nous avons a peine vu des signes de
guerre.

Ca et la, des petits groupes de maisons, des arbres, et meme des gosses
qui
jouaient avec un cerf-volant en papier.

Une fois, on nous a pries de prendre une route laterale, parce qu’une
colonne
de 20 ou 30 chars irakiens devait passer.

Ce qui dement encore une fois les nouvelles qui pretendent que l’armee
irakienne se servirait de boucliers civils pour ses operations
militaires :

notre vehicule civil a d’abord ete gare en securite sur une toute
laterale,
avant que l’armee irakienne n’arrive.

Sur le chemin du retour, par contre, les Americains et les Anglais
etaient en
train de bombarder les alentours. Pour notre securite, il nous a de
nouveau
ete ordonne de prendre une route, mais la aussi, une bombe est tombee
pas
tellement loin, suivie par un epais nuage de fumee.

C’etait assez angoissant, meme, parce que nous n’etions pas en lieu
sur, dans
notre hotel, mais en plein air."