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Pour Guy Môquet, par Pierre- Louis Basse

Publie le jeudi 5 juillet 2007 par Open-Publishing
7 commentaires

Chapeau pour ce texte, Pierre louis...

IlROsso....

La mémoire courte. La mémoire sélective. Ce sont des tics difficiles à soigner lorsqu’un point de vue est donné, non pas en fonction des seuls faits, mais depuis le belvédère d’une vieille obsession : l’anticommunisme. Jean- Marc Berlière et Sylvain Boulouque nous suggèrent que "faire de Guy Môquet et de ses 26 camarades des résistants de la première heure relève de la téléologie, puisque la plupart d’entre eux ont été arrêtés en un temps où le PCF, pris dans la logique germano-soviétique, était tout sauf résistant..." (Le Monde du 25 juin).

Ah, le joli refrain ! Le fiel qui n’a pas d’âge ! Ces deux historiens, qui ont la manie de travailler sur les fiches de police, devraient se souvenir que, dès le 10 juillet 1940, le Parti communiste français fait circuler en tracts un Appel au peuple de France. Marcel Paul, déjà clandestin, diffuse un autre tract, dans l’ouest du pays : "Il ne faut pas désespérer, il ne faut en aucune façon aider l’ennemi, rien de définitif n’est joué, les hitlériens seront finalement vaincus."

La question n’est pas de savoir si nous sommes en train de confondre mythe et réalité. La question serait plutôt de savoir pour quelle raison sordide, près de soixante-dix ans plus tard, quelques croisés désirent, coûte que coûte, caviarder les rôles de chacun.

Pas résistant, Claude Lalet, jeune fiancé de 18 ans, fusillé à Châteaubriant le 22 octobre 1941, et qui fut, avec Pierre Daix, de la toute première manifestation contre l’occupant, le 11 novembre 1940 ? Pas résistant, le jeune Guy Môquet, faisant le coup de poing contre Blouin et Dubuisson, jeunes antisémites du lycée Carnot ? Pas résistant, le jeune Pierre Georges, 19 ans, à peine le ventre remis de la mitraille, en Aragon, où il a défendu la République espagnole, qu’il est arrêté, dès novembre 1939, torturé, déjà, par les brigades spéciales ? Les hommes dont je vous parle seront les fers de lance des bataillons de la jeunesse, dès lors que l’Allemagne envahit l’URSS, en août 1941... Pas résistants, les hommes et les femmes de L’Université libre, qui diffusent un premier numéro, dès novembre 1940, au moment où Paul Langevin a été arrêté ?

Le pacte germano-soviétique est inique et déstabilise à l’époque de nombreux militants. Mais l’histoire est un corps mouvant. Une pieuvre dont il faut avoir le courage d’affronter l’ensemble des ramifications. Ne rien oublier. Pas davantage Moscou que Munich 1938. Ou la déclaration de non-agression franco-allemande du mois de décembre de la même année. Lâcheté des classes dirigeantes...

Le 22 octobre 1941, les 27 de Châteaubriant sont fusillés dans la carrière. Ils refusent d’avoir les yeux bandés. C’est jour de marché. Les habitants ont entendu les chants monter des camions. Oui, ils ont chanté L’Internationale. Mais Guy, Timbaud, Ténine, Grandel et tous les autres ont aussi chanté La Marseillaise. Ils ont crié "Vive la France !" avant de mourir. Ils ont lancé, comme un cri de défi à un monde qu’ils espéraient plus juste : "Vive 1789 !"

Pierre- Louis Basse, journaliste et écrivain

Messages

  • Ca donne envie de pleurer quand on voit tous les imbéciles soi disant sérieux qui s’agitent.......

  • Merci pour ce texte M BASSE

    En quelques paragraphes vous avez redonné l’honneur à tous ces communistes qui sont entrés en résistance malgré et en dépit de tous les risques que eux et leurs familles encouraient.

    Mon grand père maternelle a été de ceux là qui se sont insurgés dès la première haure contre l’inacceptable, lui a eu la chance d’échapper à la mort par fusillade en s’évadant pendant son transfert de la prison de Monluc à Lyon vers le lieu de son exécution. Sur 150 ils ont été 3 à s’évader et à tenter leur chance.

    Mon grand père a toujours milité et a porté la tete haute les valeurs du communisme pour nous les transmettre.

    Merci de vous dresser contre ces historiens scribouillards qui ne connaissent malgré leur années d’étude rien au passé courageux de nos ainés.

    Anne

  • Réponse point par point mais rapide

    La mémoire courte. La mémoire sélective. Ce sont des tics difficiles à soigner lorsqu’un point de vue est donné, non pas en fonction des seuls faits, mais depuis le belvédère d’une vieille obsession : l’anticommunisme.
    chacun ses opinions. N’oubliez pas que les deux historiens dont vous parlez sont de gauche, et que leur anticommunisme (comme le mien, soyons clair), est lié au fait que le communisme est un système et une idéologie totalitaire qui heurte mes convictions démocrates et en faveur des droits de l’homme.
    En outre, il est facile de dénigrer une recherche historique de fond avec des arguments politiques -les deux auteurs comptant parmi les bons historiens que l’ont voit en archive régulièrement (Monsieur Wolikoff et cie ne peuvent pas en dire autant), ainsi que dans les colloques... A qui ferait-on le reproche d’être antifasciste tout en travaillant sur le nazisme ?
    Quant à sélectionner, il ne me semble pas que les historiens qui ajoutent des connaissances -certes déplaisantes pour les tenants de la légende dorée- soient de ceux-là...

    Jean- Marc Berlière et Sylvain Boulouque nous suggèrent que "faire de Guy Môquet et de ses 26 camarades des résistants de la première heure relève de la téléologie, puisque la plupart d’entre eux ont été arrêtés en un temps où le PCF, pris dans la logique germano-soviétique, était tout sauf résistant..." (Le Monde du 25 juin).
    c’est vrai. Les communistes sont arrêtés par la police de Vichy en vertu des lois républicaines de septembre 1939 destinées à réprimer un mouvement allié officiellement à l’Allemagne hitlérienne depuis août... Ils ne sont -pour leur très grande amjorité- pas arrêtés pour fait de résistance, mais parce que communistes : nuance... D’où d’ailleurs la facilité des arrestations en général, car ils n’étaient pas clandestins et ne s’y attendaient pas...

    Ah, le joli refrain ! Le fiel qui n’a pas d’âge ! Ces deux historiens, qui ont la manie de travailler sur les fiches de police,
    où l’on reproche aux historiens de bosser sur les archives... Signalons au passage que ces historiens et d’autres ont travaillé sur les archives de Moscou, avec toutes les infos gênantes de la "maison mère", tandis que Monsieur Basse se contente de relire l’histoire officielle du PCF...qui est tout sauf de l’histoire !

    devraient se souvenir que, dès le 10 juillet 1940, le Parti communiste français fait circuler en tracts un Appel au peuple de France.
    on sait très bien que cet appel est tout sauf le 18 juin en terme d’appel à la résistance, et que de plus il a été forgé et distribué après (Cf. Yves Santamaria, mais Monsieur Basse l’a sans doute lu -et oublié)POurquoi ne pas en dévoiler le contenu aux lecteurs ?

    Marcel Paul, déjà clandestin,
    oui, mais en vertu des lois républicaines liées au pacte germano-soviétiques soulignées plus haut... beau raccourci qui vise comme pour Môquet à faire passer un homme traqué pour l’alliance germano-soviétique, comme un résistant dès avant l’invasion allemande...

    diffuse un autre tract, dans l’ouest du pays : "Il ne faut pas désespérer, il ne faut en aucune façon aider l’ennemi, rien de définitif n’est joué, les hitlériens seront finalement vaincus."
    généralisation abusive : il n’appelle pas à la résistance, et ce texte n’engage pas le PCF lui-même à ce moment là...

    La question n’est pas de savoir si nous sommes en train de confondre mythe et réalité.
    si, c’est la bonne question, que tout historien se pose -mais pas les journalistes compagnons de route....

    La question serait plutôt de savoir pour quelle raison sordide, près de soixante-dix ans plus tard, quelques croisés désirent, coûte que coûte, caviarder les rôles de chacun.
    au contraire, les historiens de caviardent pas, ils ajoutent des détails gênants pour les propagandistes... d’où le problème pour ceux qui mettent du blanc sur les passages ennuyeux justement...

    Pas résistant, Claude Lalet, jeune fiancé de 18 ans, fusillé à Châteaubriant le 22 octobre 1941, et qui fut, avec Pierre Daix, de la toute première manifestation contre l’occupant, le 11 novembre 1940 ?
    le 11 novembre 1940 n’est pas organisée par le PCF, et c’est une manifestation de de résistance nationaliste antiallemande. Que deux militants en fassent partie, par patriotisme, en quoi cela engage-t-il un parti qui n’a donné aucune directive pour résister, au contraire ? Là encore généralisation abusive à partir du comportement -cpurageux- de deux individus... Et que fait l’auteur de tout les autres manifestants non communistes de la manif du 11 novembre ?

    Pas résistant, le jeune Guy Môquet, faisant le coup de poing contre Blouin et Dubuisson, jeunes antisémites du lycée Carnot ?
    Oui, mais entre les deux, il accepte le pacte germano-soviétique, à un moment où les démocraties luttent activement, les armes à la main, contre le nazisme... Et quel fut son activité sous l’occupation : c’est cela le point soulevé par les auteurs -l’art de toujours taper à côté. Avec des raisonnements pareil, François MItterand qui a été résistant devrait être considéré comme collabo car ultra nationliste dans sa jeunesse...

    Pas résistant, le jeune Pierre Georges, 19 ans, à peine le ventre remis de la mitraille, en Aragon, où il a défendu la République espagnole, qu’il est arrêté, dès novembre 1939, torturé, déjà, par les brigades spéciales ?
    Idem : l’action en Espagne ne présume pas de l’inaction, sinon de la complicité de certains, après le 23 août 1940 : Monsieur Basse a-t-il des choses à dire à ce sujet ? Combattre en espagne en 1939 est vertes courageux, mais en quoi cela est-il de la résistance contre l’occupation allemande en France ? Nous aimerions savoir ce qu’a fait ce courageux jeune homme en 1939-1941.

    Les hommes dont je vous parle seront les fers de lance des bataillons de la jeunesse, dès lors que l’Allemagne envahit l’URSS, en août 1941...
    soit plus d’un an après le début de l’occupation... L’invasion est d’ailleurs en juin, mais le lapsus est plaisant : la résistance du PCF ne se met pas en marche avant la fin de l’été : l’inertie sans doute. Quant à ces bataillons de jeunesse, Berlière et Liaigre (une autre lecture en perspective pour Monsieur Basse) ont montré qu’ils sont courageux, mais peu nombreux, sans directive claires du parti et peu -voire pas- soutenus par lui -d’où le fiasco.

    Pas résistants, les hommes et les femmes de L’Université libre, qui diffusent un premier numéro, dès novembre 1940, au moment où Paul Langevin a été arrêté ?
    certes, mais quel est le rapport avec les autres noms ?

    Le pacte germano-soviétique est inique et déstabilise à l’époque de nombreux militants. Mais l’histoire est un corps mouvant. Une pieuvre dont il faut avoir le courage d’affronter l’ensemble des ramifications. Ne rien oublier. Pas davantage Moscou que Munich 1938. Ou la déclaration de non-agression franco-allemande du mois de décembre de la même année. Lâcheté des classes dirigeantes...
    bla bla qui vise à noyer le poisson : tout le monde est pourri, on remet les compteurs à zéro !Avec des raisonnements pareils, on justifie aussi la collaboration en vertu de l’ondoyace de l’histoire -gponflé le bonhomme... Monsieur Basse condamne le pacte, mais pas le parti et les militants qui l’acceptent... De plus, Munich, c’est un lâcheté, pas une alliance en bonne et due forme avec Hitler, avec partage de la Pologne, des pays baltes et échanges de prisonniers politiques dans la foulée... Analogie fallacieuse pour dédouaner l’impardonable -et l’incompréhensible pour celui qui refuse de voir la vraie nature du communisme international...

    Le 22 octobre 1941, les 27 de Châteaubriant sont fusillés dans la carrière. Ils refusent d’avoir les yeux bandés. C’est jour de marché. Les habitants ont entendu les chants monter des camions. Oui, ils ont chanté L’Internationale. Mais Guy, Timbaud, Ténine, Grandel et tous les autres ont aussi chanté La Marseillaise. Ils ont crié "Vive la France !" avant de mourir. Ils ont lancé, comme un cri de défi à un monde qu’ils espéraient plus juste : "Vive 1789 !"
    Encore une fois : ces hommes sont arrêtés comme communistes, en vertu des lois républicaines prises à la suite du pacte germano-soviétique et utilisées par Vichy par anticommunisme (et non comme lutte contre la résistance). Les personnages qui sont fusillés sont pour une petite partie des résistants mais surtout des militants arrêtés pour être communistes et non pour fait de résistance, ce qui n’enlève rien à la tristesse et l’horreur de leur calvaire. Qu’ils crient vive la France montre bien qu’ils ont un réflexe patirotique et républicain, et non "communiste" -le parti les ayant laissé dans le vague, sinon tombé, tout simplement.

    Pierre- Louis Basse, journaliste et écrivain
    mais en rien historien. Ne pas être communiste est le certificat de virginité que s’autodécerne tout bon compagnon de route...

    • Bonjour,
      Il y a loin de la coupe aux lèvres.

      Citoyens, ils étaient prisonniers au nom de la raison d’état car ils avaient choisi un combat dont les dirigeants avaient trahi l’idéologie dans un pays où les dirigeants avaient trahis les valeurs et le peuple.

      Certe tous ces dirigeants avaient de bonnes raisons et c’est d’ailleurs au nom d’autres bonnes raisons qu’ils furent choisis pour être fusillés.

      Je ne sais pas si Pierre Louis Basse est aujourd’hui communiste ou non ; je sais seulement qu’il est le passeur de la mémoire de ces hommes qui périrent d’être simplement des hommes du peuple qui croyaient en un autre monde, meilleur, plus juste et qui jusque dans la mort, mirent leurs vies au service de cette cause.

      Que leur croyance fut pertinente, je ne sais ?

      PLB a le mérite de nous rappeler des valeurs qui aujourd’hui ont disparues et que ses parents lui ont transmis pour la simple raison que son grand père était à Chateaubrint lorsque se déroula ces tristes événements.

      La vrai question enfin n’est pas : la faute à qui ? et pourquoi ?

      Mais que ferions nous en de pareilles circonstances ?
      Serions nous parmi les moutons ou deviendrions nous ceux là même que l’on appelle des terroristes ?

      Il n’est pas si facile de choisir son camps ! Et c’est certainement la force des convictions qui aide le mieux à savoir lutter.

      Merci de votre lecture.