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Lettre ouverte d’un faucheur volontaire à Michel Barnier, Ministre de l’Agriculture.

Publie le vendredi 17 août 2007 par Open-Publishing
2 commentaires

C’est avec un vif intérêt que j’ai lu, Monsieur le Ministre, votre article dans la rubrique débat du Figaro paru le 14 août dernier. Intérêt mêlé de stupéfaction. Je savais la nouvelle équipe gouvernementale dont vous faites partie désireuse de travailler rapidement, à un rythme soutenu, mais pas au point de bousculer l’ordre naturel des événements. Or c’est bien ce qui est arrivé ce 14 août. Vous avez rendu, sous la forme d’un credo enthousiaste, les conclusions du Grenelle de l’Environnement en matière d’OGM avant même que celui-ci ait tenu ses assises. L’exercice paraît hardi car le grand débat environnemental qui doit donner ses conclusions en octobre pourrait rapidement sombrer dans ce court-circuit temporel.

Peut-on, comme vous le faites, chanter les mérites des cultures OGM avec une ferveur plus ostentatoire dans le contexte actuel ? Les plantes transgéniques s’inscriraient dans une longue histoire d’innovations agricoles commencée il y a plus de 9000 ans. De la pure tradition en quelque sorte. Elles seraient porteuses de promesses fortes tant au niveau agricole, industriel, médical qu’environnemental et nous permettraient de garder une agriculture indépendante et autosuffisante. Avec les 100 000 hectares de cultures OGM actuellement implantées en Europe, vous nous annoncez que nous n’en sommes encore qu’aux prémices dans ce domaine. Pas un seul bémol venant tempérer la louange. La messe est donc dite. Concluons que l’avenir est tout tracé pour les OGM en France et que le Grenelle de l’environnement ne pourra rien apporter d’autre que des mesurettes d’encadrement destinées à freiner les contaminations inéluctables des cultures conventionnelles et biologiques et à temporiser le sabordage de nos labels de qualité.

Nous pourrions penser que tout n’est pas encore joué puisqu’il nous qu’il nous reste un Super Ministre de l’environnement qui va nous arranger tout cela. Ce serait sans compter sur l’action de votre collègue, Christine Lagarde, ministre de l’économie, ex-avocate des milieux d’affaires américains (Baker & Mc Kenzie) et véritable loup dans la bergerie environnementale. Christine Lagarde soutient le Mouvement pour un Organisme Mondial de l’Agriculture qui concentre toute l’agro-industrie favorables aux OGM. Il n’est donc pas surprenant que pendant son court mandat ministériel à l’agriculture de mai à juin, elle ait voté en faveur de la scandaleuse modification du règlement européen sur l’agriculture biologique qui permet un seuil de contamination de 0.9% du bio par les OGM. Pas surprenant non plus qu’elle ait également réussi à repousser l’idée, avancée par Alain Juppé, d’un moratoire sur le Maïs transgénique Mon810 actuellement cultivé en France et interdit un peu auparavant en Allemagne.

Le lobby des OGM est donc bien ancré dans l’actuel gouvernement. Que reste-t-il donc, à nous citoyens, comme espace de débat sur les questions agricoles ? Aucun ! Ce débat peut-il être, dans ces conditions, démocratique et apaisé comme vous semblez le souhaiter ? Pour que ce débat ait pu être serein, il aurait fallu, comme l’a demandé une délégation de faucheurs volontaires reçue le 31 juillet dernier au ministère de l’Ecologie, que le gouvernement instaure un moratoire immédiat sur les cultures et sur les importations de produits transgéniques en France. Ce moratoire est même - vous ne l’ignorez pas - l’une des lignes rouges conditionnant la tenue du Grenelle en octobre. Pourquoi ?

Parce qu’en l’absence de ce signe fort, le message semble clair : les choix du gouvernement sont déjà établis sur les questions agricoles. Or il ne peut s’agir, en la matière que de choix très tranchés. En effet, les politiques ou les industriels qui veulent aujourd’hui nous vendre une coexistence entre les cultures OGM et non-OGM, en arguant faussement de la liberté de choix, sont des marchands de vent. Cette coexistence, nous la savons impossible non par idéologie mais par expérience. Car les pays qui cultivent les OGM sont des observatoires qui permettent de tenir à jour un registre[1] très explicite des contaminations dans le monde. Disons-le une fois pour toute : l’avènement des cultures transgéniques signe la fin de toute autre forme d’agriculture.

Une contamination génétique, tout comme un feu de forêt, se propage avec le vent, peut sauter des zones « incombustibles », non fertiles, et diffuser au loin. C’est pourquoi, les faucheurs volontaires, loin d’être les vandales que l’on veut bien stigmatiser, sont des lanceurs d’alerte et les « pompiers » de ce très redoutable feu transgénique. Ils sont là pour dire simplement : après avoir provoqué un dérèglement climatique, ne déclenchons pas un dérèglement génétique irréversible. Cessons cette fuite en avant, guidée par une aveugle idéologie du progrès !

Les alternatives aux cultures transgéniques existent et ont fait leurs preuves depuis plusieurs décennies. Elles peuvent garantir notre indépendance et notre souveraineté alimentaire tout en préservant l’environnement et la santé publique sans méprise. Elles reposent sur les différentes formes de l’agriculture biologique que l’ancien ministre de l’agriculture, Dominique Bussereau, n’avait pas hésité à placer au rang de l’excellence. Soyons innovants, modernes et raisonnables : faisons dès maintenant le choix de l’agriculture biologique. Lançons sans tarder un vaste programme de reconversion du système agricole français dans cette nouvelle direction. Demain, le monde entier pourrait nous envier cette audace. Monsieur le Ministre, le gouvernement auquel vous appartenez a voulu la rupture : pour notre agriculture, elle est là, à porté de main.

Paris, le 16 août 2007

Sébastien Arribas

[1] GM Contamination Register consultable sur
 http://www.gmcontaminationregister.org/

Messages

  • Je suis agriculteur, et je reste humble, je ne suis pas en mesure aujourd’hui de dire si les OGM sont un bien ou un mal pour l’humanité j’estime que, c’est le role de politique de le faire aprés avis d’un comité scientifique indépendant. Comme cela a été le cas dans le cadre de loi bio-éthique.
    Par contre, chose que je ne supporte plus c’est la suspition organisé que fait peser un groupe d’extremiste sur notre métier. J’ai 5 ha de mais au beau milieu de mon exploitation, cela n’empèche en rien ces gens là de traverser l’ensemble de mon exploitation pour faire des analyse sur mes mais, et cela à deux reprises. Je ne me suis jamais permis de rentrer dans un pavillon et faire le tour de la propriété pour voir si il y avait de l’amiante ou pour vérifier si l’assenissement est au norme !!
    Et cette inquisition organisée a et continura à engendrer des drames. Qui accepterait que que la"police" soit faite chez soi par des citoyens lambda ?? Encore une fois, le combat des faucheurs volontaires est réspectable ce qui ne l’est pas ces leur mode d’action !!
    Si les Ogm sont interdit pas de souci, le monde agricole respectera, si c’est autorisé qu’on laisse à ceux qui le souhaite le faire sans avoir des voyous dans leurs parcelles.
    Si les Ogm sont interdit il faut aussi l’interdire sur nos étales de suprmarché (gateau appéritif....)

    Christophe

  • Je ne suis pas agriculteur. Je ne connais que peu de choses de ce qu’endurent tous ceux qui en vivent ; des aléas du métier, des difficultés rencontrées. J’achète ma farine et les déchets de blé de mes poules chez un agriculteur bio, qui cultive aussi des lentilles et des pois chiches. Il est évident, quand on le voit, que c’est un bosseur, et que je ne serais sans doute pas capable de ça. Il est tout aussi évident, quand on a la chance de le croiser à un de ses rares moments de répit, au pied de sa maison entourées de ses champs, qu’il est, en ces moments-là, un roi en son domaine. Si je peux comprendre, comme me l’ont dit certains de mes amis, qu’il "y a peut-être", parmi ceux "qui acceptent de faire de l’OGM", certains agriculteurs qui sont pris à la gorge ; il y en a sans doute d’autres qui n’ont pas fini de creuser leur piscine ou de payer son 4x4 à leur femme...
    "Aux politiques de décider" entend on presque toujours... Mais bordel de dieu, non !!! 80% des français sont contre ; non ??? Où sont-ils quand 200 personnes fauchent un champ ? Quand 300 pollinisateurs font un petit coup médiatique ? Qu’ils se sortent un peu les doigts du c..., marre de voir toujours les mêmes gens aux manifs ou aux rassemblements, sortez de vos trous ou continuez à vous en foutre ; mais arrêtez de dire "je suis contre" pour tourner casaque dès que vous voyez un képi... Et que les partisans du "régler le problème de la faim dans le monde" ferment un peu leur gueule. Quelle façon dégueulasse de sauver quelqu’un en lui disant "paye ou crève", non ??? Ils me font penser à tous les gugusses qui croient encore dur comme fer au bio-éthanol... encore une belle fumisterie, non ?? D’ou vient l’engrais ? D’où viennent les pesticides, les herbicides, les fongicides ??? on va faire du bioéthanol bio, alors ???? Je vous raconte pas le prix... Heureusement qu’on va supprimer les jachères, hein les gars ???

    Je sais ce qu’est un O.G.M.... puisque j’en suis un moi-même ! je suis un O.G.M...
    Je suis atteint d’une "maladie" génétique rare, d’origine encore assez trouble, d’autant qu’il ne semble pas y avoir d’antécédent familiaux. Aujourd’hui, si je décide d’avoir des enfants, j’ai une chance sur deux (pile, ou face ?) de leur transmettre. La forme dont je suis moi-même atteint, même si elle est évolutive, semble assez bégnine ; et même s’il existe un diagnostic prénatal pour savoir si l’enfant est porteur ou non, il est impossible de connaître la gravité de l’atteinte avant la naissance, voire la pré-adolescence. Personne, à l’heure actuelle, ne peut me dire d’où ça vient. La seule chose dont je suis sûr, c’est que l’anomalie se situe sur la pairede chromosomes n°17, et que je jouerais à "pile ou face ?" à la prochaine galipette sans pillule... Je pense donc savoir assez précisément ce que signifie "irréversible". Et si demain mon fils ou ma fille naissent porteurs, que la forme est évolutive et grave ; je ne pourrais pas dire "je ne savais pas". Je sais ce qu’elle fait sur moi, je connais les symptômes. Je connais la lourdeur financière et psychologique de certains suivis médicaux. Je connais les conséquences. Je sais. Je sais que je l’ai en moique je peux la transmettre à ma descendance.

    "Si c’est interdit, on suivra ; si c’est autorisé, qu’on laisse ce qui veulent, en cultiver..." Non. ou à condition qu’ils assument pleinement les pollutions occasionnées.
    Je pense que le problème fondamental des O.G.M., est effectivement là. En dehors de l’appropriation des cultures saines par les semenciers ogm par pollutions interposées (Un peu comme si je faisais pisser mon chien sur la porte de mon voisin pendant un an et un jour, pour lui dire au bout de ce délai "ta maison m’appartient"), en dehors des maïs résistants au Round-up qui permettraient d’arroser tout autour... au final, le plus grave est bien là : il n’y a pas de contrôle possible de la dissémination. Nous le savons tous.

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