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Sonja Suder et Christian Gauger ont été arrêtés et placés sous écrou extraditionnel...

Publie le vendredi 9 novembre 2007 par Open-Publishing

Sonja Suder (75 ans) et Christian Gauger (63 ans), ressortissants allemands, ont été arrêtés et placés sous écrou extraditionnel. La demande d’extradition concerne les mêmes faits pour lesquels en 2002 avait été donné un avis défavorable à l’extradition. Sonja : écrou 934104 MAF de Fresnes. Christian : écrou 288957 Maison d’Arrêt de la Santé

Il y avait à Lille une vieille dame qui s’appelait Sonia (Sonja Suder, elle était allemande), enfin pas tout à fait vieille, 75 ans, mais plus très jeune non plus. Elle vivait de brocante, comme pas mal de petits vieux, avec son copain, un allemand lui aussi, Christian Gauger. Lui, il était plus jeune qu’elle, 66, mais on aurait dit le contraire. C’était un couple à la Dubout, Sonja costaude, toujours d’attaque, et Christian tout faible, malade du coeur, avec des pillules de toutes les couleurs à prendre chaque jour.

Leur vie en Allemagne avait tourné court il y a une bonne trentaine d’années, à cause de la politique. Là-bas, ils avaient été libertaires, dans les années 70. Elle, elle était prof de fac à l’époque, une intellectuelle d’extrème-gauche, et c’était aussi une pointure en ostéopathie. Ils avaient fricoté avec les RZ, les Cellules Révolutionnaires, un truc un peu informel, décentralisé, qui s’autogérait à la base. Quelques unes de ces cellules, particulièrement excitées, avaient posé quelques bombes dans des batiments vides (mais l’une avait fait un mort, tout de même) et avait « jambisé » (tiré dans les jambes, à la mode italienne) deux ou trois personnalités locales.

Les ennuis de Sonja et Christian dataient de là : en 78 un juge les avait inculpés d’appartenance à une organisation interdite. Or, cette année-là, l’ambiance n’était toujours pas à la rigolade (76 et 77, « suicides » de tous ceux de la RAF qui étaient en prison). Sonja et christian étaient partis, s’étaient cachés et, pour finir, s’étaient réfugiés en France, en 1985 car à l’époque Mittérand y avait entièrement rétabli la tradition d’asile politique, qui datait de la Première République, et que Giscard d’Estaing venait tout juste d’écorner, par conviction européenne). Chez nous, ils avaient vêcu difficilement, sans métier, toujours inquiets, avec de faux papiers, car on ne sait jamais, des fois que la France revienne encore sur le droit d’asile... Et en effet, il y a 7 ou 8 ans, le ciel leur tombe sur la tête. Un grand procès des anciens RZ s’ouvre en Allemagne, mais il n’y a pas assez d’inculpés, à peine 4 ou 5. On manque de coupables. L’Allemagne demande à la France l’extradition de Sonja et Christian.

Seulement voilà : Article 5 L’extradition n’est pas accordée : 1° (...) 2° Lorsque le crime ou délit a un caractère politique ou lorsqu’il résulte des circonstances que l’extradition est demandée dans un but politique.(...)

On avait donc chargé la barque, en leur mettant sur le dos, cette fois, les attentats à la bombe et les jambisations, qui sont des crimes avec un fort relent de droit commun. Oui, mais voilà, pour tous ces crimes il y avait, en droit français (ce n’est pareil en droit allemand), prescription, or : Article 5 L’extradition n’est pas accordée : (...) 5° Lorsque, d’après les lois de l’État requérant ou celles de l’État requis, la prescription de l’action s’est trouvée acquise antérieurement à la demande d’extradition, (...).

L’Allemagne, qui s’y attendait, avait à tout hasard ajouté sur la tronche de d’autres attentats, non prescris, commis par les RZ dans les années 86 à 91 (alors que Sonja et Christian étaient en France, avec en permanence le Sdec et les RG au cul). Cela a fait doucement rigolé la Chambre d’accusation (chargée d’émettre l’avis sur l’extradition) qui, reprenant son sérieux, a rappelé qu’ici on ne punissait pas sans preuve, et d’ailleurs : Article 4 (...)

En aucun cas l’extradition n’est accordée par le Gouvernement français si le fait n’est pas puni par la loi française d’une peine criminelle ou correctionnelle. C’est ainsi que la Chambre émit un avis défavorable à l’extradition des deux vieux tourtereaux, qui s’en revinrent tranquillement à Lille car, après un délai de huit jours : Article 17 Si l’avis motivé de la Chambre d’accusation repousse la demande d’extradition, cet avis est définitif et l’extradition ne peut être accordée. Ouf ! Ouf ? Pas tout à fait. Car cette loi ne s’applique que : Article 1 En l’absence de traité, (...)

Or, nous avons signé en 2004 un traité européen qui stipule : Article 3 Conditions de la remise 1.En vertu de l’article 2, toute personne ayant fait l’objet d’une demande d’arrestation provisoire selon l’article 16 de la convention européenne d’extradition est remise conformément aux articles 4 à 11 et à l’article 12, paragraphe 1, de la présente convention. 2. La remise visée au paragraphe 1 n’est pas subordonnée à la présentation d’une demande d’extradition et des documents requis par l’article 12 de la convention européenne d’extradition. et qui laisse, en dernier ressort, l’exécutif décider ou non de l’extradition des ressortissants de l’UE : ils leur foutent la paix, ou ils les livrent.

Vous l’avez sans doute remarqué, l’actuel président de la République s’appelle Nicolas Sarkozy (mais si, vous savez bien, le mec qui a remplacé Jacques Martin, d’abord dans le coeur de Cécilia et puis dans les émissions, à la télé). Cet homme, pétri de qualités, a aussi sa petite lubie : être aimé de tous et partout. Et le voici en délicatesse, pour de sordides histoires de déficit budgétaire, avec le reste de l’UE. Il a trouvé le cadeau qui ne coûte pas cher et entretient l’amitié : quelques livres de chair humaine. Même rance, même pas trop fraiche, même quand c’est de la viande de vieux ou de malade, ça fait toujours plaisir. C’est pas pour manger, c’est pour montrer à la télé. En Italie, on commence à l’aimer, notre Nicolas national.

Après avoir déniché pour eux Battisti en plein Brésil, il a mis Marina Petrella au frais à Fresnes, il la réserve pour les fêtes de fin d’année. Et comme les Allemands commençaient à raler, il a serré Sonja et Christian. Comme ça y a pas de jaloux. Sonja est à Fresnes. Elle a vu Marina, elles se sont dit bonjour. (Il y a une semaine encore, Sonja était à Paris, à la manif en train de crier Li-bé-rez Ma-ri-na ! Elle s’attendait pas à ce que ce soit son tour si vite) Christian, le cardiaque, est à la Santé. Ça va de soi.

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