Accueil > MP4. Voltaire, guerre contre "l’insondable" bêtise. Monde de la (...)

MP4. Voltaire, guerre contre "l’insondable" bêtise. Monde de la philo (zaz)

Publie le vendredi 15 février 2008 par Open-Publishing
2 commentaires

1. Premiers faits établis à 100% : la lutte contre l’intolérance, la lutte contre "l’infâme"

Le 4e bouquin du Monde consacré à la philosophie et à son efficace possible aujourd’hui à l’heure apparemment agitée qu’il est, c’est Voltaire "le philosophe". On notera au passage que Voltaire n’a pas professionnellement, sur sa plaque de cuivre, le droit légal à l’appellation philosophique brevetée d’Etat (ni au bac, ni à l’Université), Rousseau son ennemi oui ! Voltaire, lui, est essentiellement laissé à la littérature, ainsi l’Université en a-t-elle décidé sans doute à juste titre, techniquement parlant. Il est néanmoins au panthéon, Rousseau aussi, sauf que Voltaire y est rentré le premier.

Un gros-gros meuble, Voltaire ! Mort à 84 berges, il a eu le temps de marquer son siècle : plus de 100 bouquins, ironiques, satiriques, mordant à tout instant, d’humour juste et efficacement méchant (Le géant suivant, en quantité mais dans une différente qualité, ce sera Hugo au XIXe, on verra plus loin pourquoi on cite Hugo).

Revenons à nos moutons, l’ouverture est faite cette fois-ci par Bernard-Henri Lévy, qui dit : "écrivain immense", "énormité de ce nom propre", "obscurité de cette gloire trop vaste". Bien sûr ! Et il annonce, Voltaire, tout à fait ce que sera l’intellectuel (engagé) plus tard. A la question de ce que serait l’actualité de Voltaire, BHL répond que ce serait maintenant l’antiislamisme radical, la défense personnelle de Salman Ruhdie, de la bengladeshie Taslima Nasreen, de la hollando-somalienne Ayaan Hirsi Ali.

Pour sûr ! Voltaire a défendu de grandes causes qui étaient en même temps des personnes, on pense à Calas, roué vif, pour rien, à Toulouse, on pense à l’horreur sans nom faite au Chevalier de la Barre, 19 ans, folie invraisemblable pour un motif encore moindre dans le rien, langue et poing tranché, décapité, brûlé avec le dictionnaire philosophique de Voltaire. Grande affaire du siècle des Lumières et des encyclopédistes : des lumières, il en manquait donc tant et à ce point au XIXe ?! Mais oui !

Lutter contre "l’infâme", c’est le mot de Voltaire ! Mais il ne lutte pas seulement contre le fanatisme, contre l’intolérance directement, Voltaire lutte en vérité contre la bêtise, l’incommensuarble bêtise, cette fragilté terrible au sein de l’homme, il lutte par la conscience nette et claire de la raison, la simple raison, le bon sens, la loi naturelle morale et de justice. Simple ça, donné à chacun, pas compliqué !

Jusqu’à Sartre, et toujours désormais, les intellos français, en passant par Zola et son j’accuse, les intellos français -on ne peut le nier- seront dans tous les coups de morale, de justice, de bon sens évident. Avec malgré tout, un gros trou pour la Commune, un gros trou. Un énorme trou !

C’est que, il faut le dire, les gueux, le peuple d’en-bas, les ouvriers, c’est quand même dur à passer quand on n’est pas habitué.

Voltaire, le problème, en 2008, c’est que si engagé qu’il soit, qu’il fut, il lui manque le peuple (même s’il fait abolir le servage des serfs de L’abbaye de St-Claude dans le Jura, ce qui n’est quand même pas rien, symboliquement et concrètement.)

2. "C’est la faute à Voltaire" !

Notre Voltaire à nous compte deux choses, pour sa gloire et/ou sa mythologie présentes : les classiques Vaubourdolle d’une part qui ont permis à diverses générations de le lire en long et en large au lycée quand la collection existait encore et le "C’est la faute à Voltaire c’est la faute à Rousseau" de Gavroche, autrement dit Hugo, dans Les Misérables.

Il faut le répéter le combat de Voltaire n’inclut pas le peuple, non ! (Rousseau non plus, son peuple c’est seulement le concept juridique, pas le peuple qui vit petitement).

On a beaucoup reproché à Voltaire sa fréquentation des grands, sa grosse fortune, sa médiatisation de l’époque. On notera pour sa défense que l’argent ne le retire pas de la bataille : passé quarante ans, passé soixante, il entre encore plus fort dans la bataille, dans la croisade qui est la sienne, celle pour la victoire de l’esprit.

Mais bon c’est un grand bourge ! Avec cette originalité par rapport à la noblesse, que lui donne à titre posthume un nom à un village et ne le reçoit pas de lui. Monsieur de Voltaire à Ferney-Voltaire.

Voltaire ne s’adresse pas au peuple, au petit peuple, qui ne sait pas lire, est limité, borné, écrasé, crédule. Il s’adresse à la bourgeoisie qui peut comprendre, et à l’aristocratie éclairée.

Dix ans après sa mort la révolution éclate, certains ont pu y voir une sorte d’ironie du sort par rapport à ce qu’il était en fait exactement. Observons que c’est la même chose par rapport à tous les encyclopédistes et leurs lumières. "La sociale", c’est pour bien plus tard, les pauvres aussi (Les misérables) et ça c’est pour Hugo.

Le prolétariat, attendez 1844, ne le demandez donc pas encore à Voltaire, ni à Hugo dont le Gavroche meurt en 1832 devant une barricade en ramassant des cartouchières.

"Gavroche n’était tombé que pour se redresser ; il resta assis sur son séant, un long filet de sang rayait son visage, il éleva ses deux bras en l’air, regarda du côté d’où était venu le coup, et se mit à chanter :
Je suis tombé par terre,
C’est la faute à Voltaire,
Le nez dans le ruisseau,
C’est la faute à...
Il n’acheva point. Une seconde balle du même tireur l’arrêta court. Cette fois il s’abattit la face contre le pavé, et ne remua plus. Cette petite grande âme venait de s’envoler"

Ne brulons pas les étapes, l’histoire se fait, mais elle est laborieuse. Puisqu’il s’agit de Voltaire que demanderions, nous, à Voltaire ? En supposant qu’il sache un peu où il est ?

3. Mais qu’est-ce qu’il pourrait aujourd’hui profitablement dire, Voltaire, lui l’anti-cuistre à la langue bien pendue si efficace ?

Non, nous n’allons pas l’impliquer, nous, dans la querelle sarkozienne du moment sur la laïcité et sur la religion. Basta ! Sur un autre plan, comme on disait, il a été embauché déjà par BHL, trouvons donc un éventuel autre sujet d’application à lui proposer. Où est-ce que sont les choses et les êtres cuistres à dénoncer actuellement en France pour un homme venant initialement des lumières ? : l’ordre du savoir et des pensées, "L’Université"

Le premier et sûr regard de Voltaire serait pour le savoir. Il s’émerveillerait d’abord que les lumières se soient aussi merveilleusement répandues, que les tableaux touffus des instruments dans l’encyclopédie aient finalement servis (peut-être) à quelque chose et pas seulement à la décoration des lofts branchés. Après cela, il verrait bientôt deux choses : Primo : que le monde des enluminés nouveaux se divise en deux, les alphas (honorés) avec des écoles supérieures à eux et les bêtas (pas futés) de l’autre côté avec des écoles inférieures à eux.
Deuxio, : la deuxième chose qu’il constaterait pour de bon c’est que les professeurs pangloss seraient toujours légions, et aussi -bien qu’en moindre nombre- les petits et les grands babus qualifiés. Tous ceux-là seraient optimistes comme il se doit, mais avec des crises de pessimisme fort qui les ferait un peu cyclothymiques : tantôt La France monte et approche le sommet, tantôt la France descend et va toucher le fond.)
Pangloss et babus communieraient comme d’hab dans une religion commune imposée aux autres avec rites et liturgie, leurs ave, leurs pater, leurs gloria, leurs hosannas seraient excellence ! excellence, ! excellence ! Les Candides alpha et les Candides bêtas seraient conquis, qui n’est pour l’excellence, qui, de son aveu, est pour la déchéance ?

Dans les alphas, il y aurait des superalphas sortant bien sûr de l’ENA, au talent brillant, jusque là ca peut encore aller, mais dotés d’un privilège tout à fait exceptionnel, droit de cuissage sur l’administration et sur ses filles, que dis-je, droit de cuissage sur la France. Là, je crois, Voltaire aurait tiqué, n’avait-il trois siècles auparavant commis des mots très durs sur le droit de cuissage.

Mais enfin, hein, si c’est pour l’excellence ! Voltaire aurait noté que les alphas ne parlent plus le latin qui ne servait à rien, ils parlent la mathématique qui ne sert pas à mieux. Surtout les médecins ! En tout cas le nombre des médecins a été soigneusement calculé, en conséquence, dira-t-on, ils manquent. (Ceux qui sont très bien, très haut formés, ce sont les médecins-vétos pour chiens, ils ne manquent pas. Soyez canins.

On va stopper pour l’Université, en si peu de temps Voltaire faut qu’il digère, l’Université à quoi ça sert ? A diffuser du savoir, des valeurs, des prébendes ? A diffuser de l’utilitaire, un métier ? Allez lui expliquer que l’Université, sa qualité, c’est d’abord l’autonomie, l’unité et la force de son Conseil d’administration ! Allez lui faire gober à lui que c’est la LRU !

Remarquez ! aller lui expliquer avec certains que surtout ça ne doit servir à rien, là aussi Voltaire pour lui c’est difficile.

Bien sûr, l’Université n’est sans doute pas seulement l’avenir de la France et le bonheur de gens, elle est la clé de répartition du gateau. On s’attend que les alphas s’en tirent bien, c’est la règle du progrès. Derrière les mots les intérêts.

La réflexion sur l’université se fait d’ailleurs exactement sans vous, où avez-vous une réflexion prise à la racine des choses ? Les babus sont déjà d’accord entre eux : babus journalistes, babus députés, babus des entreprises (incubateurs), Vous ne savez pas en quoi, mais eux ils savent. Ils vont certainement vous trouver es-qualités la solution complètement dépassée depuis trente ans.

 On le sait.
 Alors à quoi nous servirait Voltaire si on le sait ? Pourquoi le convoquer ?
 Voltaire nous manque pour nous faire rire tous sur le sujet.

C’est la faute à Voltaire ! l’ironie, l’humour, le rire bien pensé est en définitive à terme immanquablement révolutionnaire !

Alain Serge Clary et les "Inoxydables philosophes" de l’Ocséna vous saluent bien !

.......................................................................................................

Les Pensées zaz de l’Ocséna

Ocsena, Organisation contre le système-ENA... (et pour la démocratie avancée)
 http://ocsena.ouvaton.org

Messages