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Lettre ouverte au dalaï-lama

Publie le vendredi 11 avril 2008 par Open-Publishing
4 commentaires

Lettre ouverte au dalaï-lama, à la suite de la parution, dans "Le Monde", de son discours du 6 avril, "La voie du milieu" pour le Tibet

de HIMALOVE

Monsieur Tenzin GYATSO

Le nous de majesté, dans votre bouche, au nom du peuple tibétain, est malvenu.

Vous rassemblez davantage de bourgeois blancs, à Paris, Londres, Washington, par vos propos, que de chômeurs tibétains à Lhassa, Delhi, Katmandou ou Oulan-bator.

En refusant de retourner au Tibet comme vous l’a proposé, à maintes reprises le gouvernement chinois, vous vous êtes disqualifié du jeu politique.

Et ce ne sont pas les émeutes communautaires, frôlant presque le pogrom, organisées le 10 mars 2008, à Lhassa, qui pourraient redorer le blason de votre majesté…

Vous dites : « Ces explosions de colère sont le résultat de l’angoisse mentale et physique des tibétains depuis trop longtemps refoulée et du profond ressentiment qu’ils éprouvent face à la négation du peuple tibétain ».

Soit. Mais pourquoi cette insurrection aurait-elle besoin de se soumettre à votre agenda politique, le 10 mars, date anniversaire de la révolte des grands lamas, en 1959 ; et à des directives douteuses, peut-être, écrites à New Delhi ou ailleurs ?

Les émeutiers de la faim d’Haïti ont-ils eu besoin d’une quelconque église, d’une puissance étrangère, d’un drapeau ou d’un almanach, avec le nom des martyrs, pour se révolter spontanément contre leurs oppresseurs ?

C’est la réalité même de l’insurrection tibétaine, sa spontanéité, que je remets en cause lorsque vous l’évoquez ; et sa nature.

Il n’y a pas de famine ni émeutes raciales, dans la région autonome du Tibet.

En revanche, à Dharamsala, dans ce royaume imaginaire où l’on refait le Monde, la chose est différente…

J’ai pu assister personnellement, dans la deuxième semaine de mars, à un simulacre d’insurrection, avec ses quelques centaines d’acteurs payés ou non, son public complaisant de journalistes et des milliers de badauds indiens, riant de cette dramaturgie.

On aurait dit un grand carnaval, au sens médiéval du terme. Avec ses Bons et ses Méchants.

La chose eût été distrayante s’il n’y avait pas parmi les slogans et vos mantras un message dangereux…

L’anticommunisme d’hier se mêlait à un nationalisme étroit, chauvin et religieux.

Les militants du Youth Tibetan Congres ne s’en prenaient plus aux chefs communistes mais au peuple chinois, considéré dans son ensemble, comme colonisateur.

Une partie des 100 000 réfugiés tibétains du sous-continent essaye dorénavant de fabriquer une nation avec comme élément premier, la haine du voisin.

Un chinois que pour la plupart d’entre eux, ils n’ont jamais côtoyé.

Est-ce le résultat de l’enseignement, délivré, pendant cinquante ans, par vos écoles ?

Est-ce l’influence des revivalistes hindous comme le Vishnu Hindu Parishad ou les Rashtriya Swayamsevak Sangh, actuellement au pouvoir en Himachal Pradesh ?

Ou plus simplement les conditions d’existence des tibétains, obligés de subir le cast system qui façonne ici leurs pensées ?

Si le tibétain n’est pas heureux en république populaire de Chine, il l’est encore moins en Inde ; et vous le savez très bien.

Chez le « Bhotia », né ici, plein de colère, il y a une espèce de transfert de l’objet du ressentiment.

Ne pouvant critiquer le pays hôte et leurs conditions d’accueil, il s’en prend au pays d’origine et à un ennemi mythique, la Chine.

Vous êtes responsable, avec vos curés, de ce malaise...

Pourquoi ne vous êtes vous jamais battu pour améliorer, en droit, le sort de votre communauté sur la terre indienne ?

Pourquoi des tibétains, nés en Inde ou au Népal, depuis 1959, n’ont-ils aucune citoyenneté ?

Tout juste appartiennent-ils à une caste et doivent-ils vous baiser les pieds.

Vous parlez de démocratie. Mais combien de députés dans votre gouvernement sont issus des bidonvilles de New Delhi, Katmandou ou Manali ?

Comment pouvez-vous parler des angoisses et des attentes du peuple tibétain, vivant en Chine, alors que vous êtes incapable de défendre, sur le sol indien, le droit à la dignité des tibétains pauvres ?

Il y a une imposture dans votre magistère.

La « voie du milieu » qui est un autre nom pour désigner la justice sociale vous est complètement étrangère.

Je ne vous salue pas.

HIMALOVE

Messages

  • Je ne vous salue pas.

    Et moi non plus.

    Plein les c....s de ces mises en scènes tibétaines.

    Heureusement la Chine c’est pas l’Ukraine.

    En plus ils arrivent presque à me faire trouver les dirigeants chinois sympas.

    D’ailleurs s’il voulaient me faire plaisir ils décideraient tranquillement d’annuler les Jeux purement et simplement. Pour qu’on ne les fasse plus ch..r.

    Avec les dollars qu’ils ont ça serait si simple pour eux de le faire payer aux Américains. Et ils se feraient doublement plaisir. LOL.

    Là, je leur fait une... statue.

    On peut rêver, non ?

    G.L.

  • ya basta les rentiers de la CIA...

    himalove est un ravissement, une voie de la réflexion juste et documentée par l’expérience

  • J’ai déjà lu quelques articles de ce site nuançant la position majoritaire des médias sur le problème tibétain. Je trouve cependant que la tendance est anti-tibétaine et, si vous n’y prenez garde, elle deviendrait vite pro-chinoise, oubliant du même coup les violations, avérées, des droits de l’homme, dans tout le territoire chinois (nous ne parlons ici que de la Chine, pas du reste du monde).

    • Pour un communiste, la question de la nationalité est d’abord la question de la citoyenneté partagée.

      Dans le milieu des tibétains en exil, cette question est éludée au profit d’une identité qui mêle étroitement le religieux et le politique.

      Cette attitude est typique des communautés à caractère féodal où c’est l’allégeance au chef qui prime, en l’occurrence le dalaï-lama, plutôt que l’égalité des droits sur une terre partagée.

      En Chine, le tibétain comme le han ou le ouïgour, en dehors de leur appartenance à une classe sociale, possèdent le même passeport chinois.

      En Inde, le droit des personnes est plus problématique ; beaucoup de gens, nés et vivant sur le territoire, n’ont aucun état civil.

      Pour en faire la demande, ils doivent montrer outre leur extrait de naissance "un certificat de caste" !!!! S’ils ne sont pas répertoriés comme caste, selon le droit indien, leur citoyenneté n’existe pas...

      Exemple pratique, il faut, pour le tibétain en exil, la permission des autorités puis celle de leur seigneur pour y manifester.

      Cette simple vérité est absolument tue par nos médias.

      HIMALOVE