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Un journaliste place Cuba sur le podium des droits humains

Publie le lundi 19 mai 2008 par Open-Publishing
4 commentaires

En faisant une lecture comparative du Rapport 2006 d’Amnesty International, le journaliste français Salim Lamrani juge infondées les sanctions dictées en 2003 par l’Union européenne contre le gouvernement cubain.

Comparaison est-elle raison ?

Une interview de Salim Lamrani à Benito Pérez.

Le 5 juin 2003, l’Union européenne (UE) dictait des sanctions diplomatiques contre le gouvernement cubain. Il s’agissait, pour Bruxelles, de condamner l’incarcération, deux mois auparavant, de 75 dissidents, considérés par la justice cubaine comme des agents de Washington. Plus largement, l’UE critiquait la « violation des droits humains » à Cuba, et réaffirmait sa position commune adoptée en décembre 1996, exigeant de La Havane une « transition pacifique vers le pluralisme démocratique » et « des politiques économiques » plus efficientes.

Bien que suspendues en 2005, ces mesures, et plus globalement l’ingérence européenne à l’égard de Cuba, sont restées en travers de la gorge du journaliste français Salim Lamrani. Ce spécialiste des relations USA-Cuba (1) y perçoit l’incapacité de l’UE à adopter une politique étrangère « rationnelle, constructive et indépendante ».

Pour le prouver, Salim Lamrani s’est lancé dans une périlleuse aventure. A l’aide des rapports d’Amnesty International (2), son dernier ouvrage Double Morale (3) met en balance les violations des droits humains à Cuba avec celles commises dans les autres pays d’Amérique. Une approche relativiste qui montre rapidement ses limites mais a le mérite d’alimenter le débat sur l’instrumentalisation des droits humains par les puissances occidentales.

  B.P : Utiliser les rapports d’une ONG des droits humains pour défendre Cuba n’est pas commun.
 Salim Lamrani : J’ai voulu démontrer l’hypocrisie de la position européenne, qui ne s’appuie pas sur une réalité factuelle précise. Pour ce faire, je me suis basé sur le travail reconnu d’une ONG prestigieuse, Amnesty International, très contestée par le gouvernement cubain, qui refuse de l’inviter depuis 1988. J’ai même décidé de m’arrêter aux seuls droits civils et politiques, bien qu’il y aurait beaucoup à dire sur les droits sociaux et culturels...

 B.P : Les droits civils et politiques seraient-ils respectés à Cuba ?
 S.L : Ne comptez pas sur moi pour tenir ce discours. Amnesty répertorie un certain nombre de violations. Je publie d’ailleurs in extenso le rapport 2006 de Cuba dans mon livre. Mais le résultat de la comparaison avec les autres pays est édifiant : s’il y a une spécificité cubaine en matière des droits humains, c’est qu’ils y sont mieux respectés qu’ailleurs !

 B.P : C’est-à-dire ?
 S.L : Les violations à Cuba sont non seulement moins nombreuses mais aussi moins graves : on ne relève aucun cas d’assassinat politique à Cuba, ni d’exécution extrajudiciaire, aucun déplacement forcé, aucun cas de torture, aucun syndicaliste assassiné, aucun cas de disparition forcée, aucun massacre de paysans, aucun viol commis par la police, pas d’esclavage, pas d’assassinat d’enfants, etc., etc. Autant de crimes qui figurent dans les rapports des autres pays du continent. Pensez à la Colombie, au Brésil, au Mexique, à la Bolivie !

 B.P : La position européenne n’est-elle pas surtout motivée par l’absence de démocratie politique à Cuba ?
 S.L : Le vrai problème pour Bruxelles tient dans le fait que le gouvernement cubain soit revenu sur certaines initiatives qu’il avait laissées au secteur privé durant la décennie précédente. Ce qui dérange l’Europe, c’est le système économique et social cubain.

 B.P : Mais ses dernières sanctions datent de l’incarcération de 75 dissidents.
 S.L : Cela a servi de prétexte. Ces personnes n’ont pas été arrêtées pour leurs opinions, mais parce qu’elles recevaient un financement de la part d’un Etat étranger. Comment expliquer, sinon, qu’un dissident aussi critique qu’Oswaldo Paya n’ait jamais été inquiété ? Simplement parce qu’on n’a jamais prouvé qu’il était stipendié par une puissance étrangère. N’oublions pas que les Etats-Unis tentent depuis 1959 de fabriquer et d’orienter une opposition interne à Cuba. La législation des Etats-Unis est claire : tant la loi Torricelli de 1992 que la loi Helms-Burton de 1996 prévoient un budget à cet effet. Un rapport US de 2006 l’évalue à 80 millions de dollars.

 B.P : Admettons que les critiques des Etats cachent des intérêts politiques. Mais Amnesty relève tout de même 58 prisonniers politiques...
 S.L : C’est le seul désaccord que j’ai avec le rapport d’Amnesty : du moment que ces personnes sont stipendiées par un Etat étranger, ce sont des agents, non des dissidents. D’ailleurs, Amnesty a reconnu en 2007 que ces prisonniers avaient été financés par les Etats-Unis (4).

 B.P : Pourquoi Human Right Watch (HRW) met-elle aussi en exergue les violations cubaines ?
 S.L : HRW a un rapport assez critique à l’égard de Cuba, mais là aussi, je vous invite à comparer avec les autres pays !

 B.P : HRW écrit pourtant : « Cuba demeure le seul pays d’Amérique latine qui réprime presque toute forme de dissidence politique ».
 S.L : Très bien ! Mais la réalité démontre le contraire : il n’y a pas une semaine sans qu’on lise une interview de la célébrissime dissidence cubaine dans la presse internationale. Tous les dimanches, les célébrissimes « Dames en blanc » défilent sur Quinta Avenida (à La Havane, ndlr), sans qu’il y ait le moindre problème. A Cuba, il n’y a pas de brigades antiémeute, ce sont de simples policiers qui encadrent les rassemblements. Ce qui n’empêche pas les images de la moindre de leurs interventions de faire le tour du monde.

 B.P : Il y a des cas de manifestations interdites.
 S.L : En France, tous les jours on interdit des manifs.

 B.P : Mais qu’est-ce qui pousse HRW à affirmer que : « Les citoyens cubains se voient systématiquement empêchés d’exercer leurs droits fondamentaux : liberté d’expression, d’association, de presse », etc.? -S.L : Il faudrait le leur demander... Si par liberté d’expression, on entend : accorder le « 20 heures » aux dissidents, il n’y a pas non plus de liberté en France : jusqu’à présent on me l’a toujours refusé. HRW se trompe lourdement. La liberté de la presse, c’est quoi ? Laisser les médias aux seuls groupes économiques privés ?

PROPOS RECUEILLIS PAR BENITO PEREZ

1 Il est notamment l’auteur de Washington contre Cuba (2005), éd. Le Temps des Cerises.

2 Disponibles à l’adresse : www.amnesty.org/fr/library/info/IOR...

3 Double Morale, Cuba, l’Union européenne et les droits de l’homme, éd. Estrella, Paris, 2008.

4 Nous n’avons pas trouvé trace de cette affirmation. En revanche, Amnesty affirme que « le seul crime commis par ces 58 personnes est d’avoir exercé de manière pacifique leurs libertés fondamentales » et « les considère comme des prisonniers d’opinion », condamnés après des « procès inéquitables ».

[Note de Salim Lamrani : Amnesty a bien reconnu que les 58 personnes avaient été condamnées « pour avoir reçu des fonds ou du matériel du gouvernement américain pour des activités perçues par les autorités comme subversives ou faisant du tort à Cuba ».

Source : Amnesty International, « Cuba. Cinq années de trop, le nouveau gouvernement doit libérer les dissidents emprisonnés », 18 mars 2008. http://www.amnesty.org/fr/for-media...(site consulté le 23 avril 2008).]

Source : Le Courrier (Genève)

Double morale. Cuba, l’Union européenne et les droits de l’homme. Paris : Editions Estrella, 2008. 123 pages. 10 euros. Disponible auprès de lamranisalim@yahoo.fr

Messages

  • Salim Lamrani a tout à fait raison quand il affirme dans son livre que ces 58 dissidents emprisonnés étaient financés par une puissance étrangère, et je crois que dans n’importe quel pays du monde des personnes faisant la même chose seraient emprisonnées, on en a des exemples ici même en Europe" sans qu’ils ne soient relevés par la presse".Ces personnes étaient en contact permanent avec l’attaché des intérêts des Etats - Unis à Cuba, j’ai des photos ou on en voit quelques uns, dans la maison"ils avaient un laisser passer officiel", de ce Monsieur Cason qui faisait fonction un d’embassadeur ou de consul et qui se permettait beaucoup de choses qui n’auraient pas étées acceptées ici, j’ai même des relevés de sommes qui étaient allouées à ces dissidents, ces documents ont étés dévoilés, par des agents Cubains qui les avaient infiltrés,il faut aussi lire le livre " les dissidents "écrit par la journaliste Miriam Elizade,qui explique tous ces évennements,ou celui de Maxim Vivas qui aussi dit la vérité, quand il dit que RSF aussi était impliquée, en aidant ces dissidents en distribuant des postes radios, des ordinateurs portables, du papier pour ces machines à ecrire,pour essayer d’avoir des documents compromettants contre Cuba, ce sont ces mêmes agents infiltrés qui ont dévoilés ces immixtions dans les affaires interieures de Cuba.Il est vrai qu’on ne parle de Cuba que pour le critiquer ou essayer de le salir le plus possible c’est vrai que c’était le seul pays jusqu’à peu de temps encore à tenir tête au libéralisme, et aupays le plus fort du monde malgré un blocus criminel de plus de 46 ans,et sans que les soits disant démocraties occidentales interviennent pour lever ce blocus (les droits des hommes sélectifs)il ne fautt donc pas trop en dire du bien, si ce n’est pas"encore" un paradis loin s’en faut il a au moins le mérite de chercher une voie meilleure pour son peuple, et peut être serait il plus avancé si on ne lui mettait pas des bâtons dans les roues, aussi bien par les Etats - Unis,que par les Européens qui n’osent pas affronter leurs alliés et préfèrent se soumettres à leurs désiratas.AL de TOULOUSE

  • Sujet : Cuba dénonce les contacts des diplomates US en poste à La Havane avec des terroristes résidant aux États-Unis

    ACN 4
    Service en langue française

    Cuba dénonce les contacts des diplomates US en poste à La Havane avec
    des terroristes résidant aux États-Unis

    La Havane, 19.05.08 (acn) Cuba a présenté ce lundi une quinzaine de
    preuves documentaires démontrant l’existence de liens directs entre des
    diplomates états-uniens en poste à La Havane et des terroristes notoires
    ayant commis des actes de violence contre la population cubaine.

    Au cours d’une conférence de presse à La Havane, Mme Josefina Vidal,
    responsable de l’Amérique du Nord au ministère cubain des Affaires
    étrangères, et Manuel Hevia (Sur l’image), directeur du Centre des
    Recherches historiques de la Sécurité de l’Etat, ont présenté 14 preuves
    documentaires démontrant l’existence de contacts entre le chef de la
    Section des Intérêts des États-Unis à La Havane (SINA, sigles en
    espagnol), M. Michael Parmly ; d’autres fonctionnaires diplomatiques US
    en poste à La Havane et le terroriste d’origine cubaine Santiago Alvarez
    Magriña, qui réside aux États-Unis.

    Selon les séquences vidéo et des échanges de courriels présentés comme
    preuves documentaires, des diplomates états-uniens en poste à Cuba ont
    servi comme « mules » pour faire parvenir à Mme Martha Beatriz Roque,
    chef de file contre-révolutionnaire à La Havane, des sommes d’argent
    envoyées depuis les États-Unis par la Fundacion Rescate Juridico,
    dirigée par le terroriste Santiago Alvarez Magriña, actuellement en
    prison aux États-Unis pour possession d’armes de guerre, entre autres
    chefs d’accusation.

    Une des courriels présentés prouve que le chef des diplomates US à La
    Havane, Michael Parmly, avait participé personnellement à l’envoi
    d’argent destiné aux groupes d’opposants à Cuba.

    « Ces faits prouvent le rôle des diplomates des États-Unis à La Havane
    en tant qu’agents de liaison pour faciliter des contacts et l’arrivée
    d’argent envoyé par Santiago Alvarez aux contre-révolutionnaires à
    Cuba », a dénoncé Mme Josefina Vidal.

    La fonctionnaire du ministère cubain des Affaires étrangères a signalé
    que ce comportement des diplomates US viole les normes internationales
    qui régissent les droits et prérogatives des personnels des missions
    diplomatiques. Elle a ensuite exhorté les autorités des États-Unis à
    enquêter sur le comportement de leurs représentants à La Havane et à
    mettre un terme à leurs pratiques.

    Mme Josefina Vidal a fait remarquer aussi le lien, démontré par les
    preuves documentaires présentées, qui existe entre les « éléments contre-
    révolutionnaires à Cuba et un terroriste dont ils reçoivent de
    l’argent ».

    « Ce sont les mêmes qui jouissent d’un traitement spécial de la part du
    gouvernement des États-Unis, y compris du président lui-même, qui leur
    envoie des lettres personnelles et discute avec eux au cours de vidéo-
    conférences », a indiqué la fonctionnaire du ministère cubain des
    Affaires étrangères.

    hv


    Service en langue française

  • Monsieur Lamrani, un seul mot : Merci !!
    Merci de retablir un peu la verité pour ce pays et ces habitants qui luttent depuis si longtemps pour avoir le droit a l’alternative et dont le seul crime est de ne pas etre assez naifs pour se laisser berner par les plus pernicieuses des propagandes, a laquelle maleureusement nous en France sommes si permissifs.
    Il suffit de voir les sommes astronomiques que reçoit reporter sans frontieres de Miami ou de la CIA pour s’apercevoir que quelque chose n’est pas clair dans leur "denonciation" du regime en place a Cuba.
    Je vous conseille d’aillerus l’article suivant : http://vdedaj.club.fr/cuba/dossier_menard.html, " pourquoi reporter sans frontiere s’acharne sur Cuba."

    Pour finir je reprendrai la maxime de Jose Marti a laquelle j’adhere parfaitement, "ser culto es ser libre", "etre cultivé c’est etre libre". et je pense qu’en ces termes le peuple cubain est bien plus libre que bien d’autres.

  • Cuba n’aurait-elle pas réussi sa révolution ? Ainsi, le système capitaliste n’aurait il pas tout intérêt à cacher la réalité ?