Accueil > RMA

RMA

Publie le vendredi 25 avril 2003 par Open-Publishing

LE MONDE - EDITION DU 26.04.03

Un projet de loi pour inciter les RMistes à reprendre le travail

Le revenu minimum d’activité (RMA) complétera leurs ressources.

Quinze années après sa création, le revenu minimum d’insertion (RMI)
va être réaménagé en profondeur. Comme le ministre des affaires
sociales, François Fillon, l’a indiqué, jeudi 24 avril, lors de
l’émission "100 minutes pour convaincre", un projet de loi sera très
prochainement débattu au Parlement. Ce texte, "portant
décentralisation du RMI et créant un revenu minimum d’activité -RMA-", vient d’être finalisé et adressé au Conseil d’Etat. Il
devrait être présenté en conseil des ministres au mois de mai.

Le projet du gouvernement, dont Le Monde s’est procuré une copie,
découle d’un constat maintes fois énoncé : le RMI n’aboutit pas assez
à l’insertion des publics qui en bénéficient. A la fin décembre 2002,
le nombre d’allocataires, qui s’établissait à 1 090 348, avait
augmenté de 1,57 % en un an. Selon une étude de la Caisse nationale
d’allocations familiales (CNAF) publiée en octobre 2002, la moitié
des bénéficiaires perçoivent depuis plus de trois ans ce minima
social (dont le montant s’élève à 411,70 euros pour une personne
seule). Alors que le dispositif devait favoriser le retour à
l’emploi, un RMiste sur deux, seulement, est aujourd’hui titulaire
d’un contrat d’insertion. Face à ce bilan très mitigé, plusieurs
économistes ont avancé une thèse - controversée - dite de la "trappe
à inactivité" : le bénéficiaire préférerait toucher son allocation
plutôt que de rechercher un emploi, car il n’y gagnerait quasiment
rien de plus ; dans certains cas, la reprise d’activité serait même
désavantageuse, car elle entraînerait la perte ou l’amputation de
certains droits (aides au logement, exonérations d’impôts...).

Pour encourager le retour à l’emploi, M. Fillon crée un nouvel outil,
le RMA, qui doit s’ajouter au RMI et non le remplacer, contrairement
à ce que pouvaient laisser entendre de premières déclarations du
ministre à l’Assemblée nationale (Le Monde du 18 octobre 2002). Le
RMA vise des publics qui "ne peuvent accéder à l’emploi dans les
conditions ordinaires du marché du travail et pour lesquels un temps
d’adaptation est nécessaire", peut-on lire dans l’exposé des motifs
du projet de loi.

Accessible aux personnes qui touchent le RMI depuis au moins deux
ans, il se présentera sous la forme d’un contrat de travail à temps
partiel (20 heures par semaine, payées sur la base du smic horaire).
Sa durée ne pourra pas excéder 18 mois. Les bénéficiaires pourront
être recrutés dans le secteur marchand (hormis les particuliers
employeurs) et non marchand (à l’exception des services de l’Etat et
du conseil général). Enfin, M. Fillon a indiqué, jeudi soir, qu’il
voulait "inciter" - et non obliger - les RMistes à entrer dans ce
nouveau dispositif.

Le RMA se décomposera en deux parts : la première, appelée
"allocation forfaitaire", équivaudra au montant du RMI pour une
personne seule ; la seconde sera un "complément" à la charge de
l’employeur. Ce dernier versera au bénéficiaire l’intégralité de la
somme, qui devra être "au moins égale au smic". Des exonérations de
charges seront accordées à certains employeurs du secteur non
marchand (municipalités, associations...). Grâce au RMA, le
gouvernement espère supprimer le phénomène de "trappe à
l’inactivité" : "Toute reprise d’activité s’accompagnera d’une hausse
de revenus."

Enfin, les conseils généraux qui, jusque-là, copilotaient le RMI avec
l’Etat, auront désormais la gestion entière du dispositif. "Le
département sera le seul responsable pour décider l’admission,
veiller aux conditions de versement de l’allocation et assurer
l’insertion", mentionne le projet de loi.

Bertrand Bissuel


Un dispositif jugé nécessaire par les Français

En 2002, huit personnes sur dix souhaitaient que le versement du RMI
soit conditionné à des contreparties, contre 75 % en 2000, selon une
enquête d’opinion de la Direction de la recherche, des études, de
l’évaluation et des statistiques (Drees) publiée au mois de mars.
"Cette opinion (...) est à mettre en relation avec le fait que la
pauvreté est (...) davantage imputée à des causes individuelles",
souligne l’étude. Neuf personnes interrogées sur dix trouvent normal
de demander aux RMistes qui peuvent travailler de "rechercher un
emploi", de "faire des efforts pour s’insérer socialement" ou
d’"accepter d’effectuer un stage de formation".

Par ailleurs, la proportion des sondés favorables à une augmentation
du RMI a diminué de 4 points entre 2000 et 2002. Cependant, 80 % des
personnes questionnées pensent que l’allocation doit être versée aux
publics en difficulté jusqu’à ce qu’ils retrouvent "des revenus
suffisants". L’existence du RMI est jugée nécessaire par une
"proportion massive" des personnes interrogées - entre 80 % et 90 %,
indique la Drees.