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L’Europe a besoin de démocratie !

Publie le mardi 17 juin 2008 par Open-Publishing

Après le « non » irlandais, l’Union européenne est placée au pied du mur. Quelle direction doit-elle prendre ? « Rendre enfin visible ses institutions en y associant les citoyens », répond Pascale Joannin, directrice générale de la Fondation Robert Schuman.

Le « non » des Irlandais au Traité de Lisbonne sonne-t-il le glas de l’Europe politique ou son réveil ? L’Union se trouve désormais au pied du mur. Pour sortir de la crise, les ministres des affaires étrangères des 27 Etats membres ont commencé à en débattre, hier. Jeudi et vendredi prochains se tiendra le Sommet de Bruxelles au cours duquel les dirigeants irlandais seront priés d’amorcer des projets de solution.

Avant ce premier grand rendez-vous, une spécialiste de l’Europe, Pascale Joannin, nous décrit les enjeux que recèle cette crise. Elle est directrice générale de la Fondation Robert Schuman, centre de recherche sur l’Union européenne (UE). Elle nous donne ici son analyse.

Le « non » irlandais est-il vraiment catastrophique pour l’Europe ?
C’est, en tout cas, une mauvaise nouvelle. Il suffit qu’un seul Etat refuse le Traité de Lisbonne pour que celui-ci soit rejeté. Et l’on ne peut pas indéfiniment renégocier un traité. Cela dit, après le vote négatif des Français et des Néerlandais au projet de Constitution, on a trouvé une porte de sortie. A l’issue du « non » irlandais, il y aura donc une solution. Certes, elle ne sera pas miraculeuse. Mais je compte sur l’hyperactivité et le dynamisme du président Nicolas Sarkozy puisque la France dirigera l’Union dès le 1er juillet pour négocier une porte de sortie.

Ce vote négatif qui vient après celui des Français et des Néerlandais ne signifie-t-il pas que l’Europe doit s’arrêter sur le chemin de l’intégration ?
Non, pas forcément. En revanche, soumettre au peuple des traités institutionnels compliqués qui sont l’aboutissement d’années de négociations, ce n’est vraiment pas vendable ! Pas plus qu’en France et aux Pays-Bas naguère, ce texte n’a été lu en Irlande. Le résultat de ce référendum est une addition de plusieurs « non » de nature différente, voire opposée. Il y a eu le « non » religieux avec le thème de l’avortement, le « non » militaire avec la question de la neutralité, le « non » fiscal et j’en passe. On ne saurait donc en déduire qu’il s’agit d’un refus clairement énoncé de l’intégration européenne.

La situation présente va-t-elle privilégier l’un ou l’autre des deux grands modèles, soit l’Europe fédérale, soit l’Europe du libre-échange ?
C’est la prochaine étape que nous devrons franchir. La plupart des Européens sont conscients que l’Union possède la taille qui convient pour s’inscrire dans le monde globalisé. Ils savent qu’un pays seul pèse fort peu. Et si le grand marché économique les satisfait, ils demandent maintenant autre chose, à savoir que les institutions européennes deviennent visibles pour les citoyens. Et sur ce plan, la responsabilité des partis européens me paraît engagée. Ils pourraient saisir l’occasion offerte par les prochaines élections au parlement européen (ndlr : juin 2009) pour politiser les débats, élaborer des choix clairs. Il faut donner aux citoyens de l’Union la certitude qu’ils sont pleinement associés à ce processus politique. Bref, l’Europe a besoin d’une vraie démocratie, avec des responsables qui viennent rendre compte de leurs orientations devant le peuple.

Pourquoi ne pas poser la question de la poursuite de l’intégration européenne à tous les citoyens de l’Union,le même jour, quitte à s’inspirer du système suisse de la double majorité, peuple et Etats ?
Ce pourrait être une porte de sortie, en effet. Il faut,cependant, poser aux citoyens des questions clairement énoncées.

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