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Contribution au cahier des charges pour une émission sur le thème des migrations produite et diffusée par France Télévisions

Publie le lundi 30 juin 2008 par Open-Publishing
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Pétition : Appel pour une émission sur les migrations à France Télévisions

de le GISTI, le MRAP, la LDH, la CIMADE, le CIEMI, le collectif Bellaciao et l’association Les Oranges

Ce texte établit des propositions d’objectifs qui pourraient être ceux d’une émission régulière sur la thématique des migrations, émission diffusée sur une chaîne du groupe France Télévisions, dans un créneau de la grille des programmes qui favorise la rencontre avec le public le plus large.

Il envisage également les champs éditoriaux qui pourraient être traités et évoque quelques pistes de modes de traitement.

Les associations et institutions auteurs de ces propositions demandent que celles-ci soient prises en compte lors de l’élaboration du projet éditorial de l’émission par les professionnels de l’audiovisuel qui auront à produire, réaliser et diffuser ce programme.

Une émission régulière consacrée aux migrations devrait recevoir le concours d’organismes publics tel que l’ANAEM , l’ACSE , la CNHI …

1. Objectifs

La question de l’immigration est, en France, à l’origine de débats, de combats, voire d’affrontements. Elle divise profondément la société française. Elle constitue un enjeu majeur sur les plans politique, social, culturel... Le débat sur l’immigration s’impose à tout citoyen.

Mais ce débat n’est pas, loin s’en faut, nourri par une information diversifiée, pluraliste, documentée, qui permettrait aux citoyens de se forger une opinion en toute connaissance de cause. Pire, il est trop souvent alimenté, pour des raisons politiques et idéologiques, par des fantasmes et des arguments fallacieux, quelquefois contradictoires.

France Télévisions, en tant que responsable de l’information de l’audiovisuel public, se doit d’assumer son rôle d’information des citoyens. Cette émission régulière sera l’un des outils créés par le groupe de télévisions publiques pour contribuer à atteindre cet objectif.

2. Les champs éditoriaux

UNE EMISSION SUR LES MIGRATIONS DANS LE MONDE

En ce début de 21ème siècle, sur une planète où l’économie, l’information et la culture sont largement mondialisées, la question de l’immigration ne peut être appréhendée du seul point de vue du flux d’arrivées d’étrangers en France.

L’émission aura pour objectif premier de traiter des migrations à l’échelle de la planète, permettant ainsi de replacer la question des migrations mondiales, et de l’immigration en France, dans son contexte, et d’en relativiser l’ampleur et la nature.

Elle s’intéressera également aux différentes formes de migrations pour en faire connaître la diversité : migrations saisonnières, pendulaires, circulaires, frontalières, d’établissement, etc.

Elle présentera toutes les causes des migrations : politiques, économiques, liées à des conflits, mais aussi les nouvelles causes, comme par exemple les changements climatiques.

Elle suscitera et alimentera le débat sur le rapport de toute société à la migration. Elle informera sur toutes les migrations, et pas seulement sur celles qui vont des pays du Sud vers les pays du Nord (par exemple, migrations entre pays du sud, migrations du Nord vers le Sud).

Elle fera partager les expériences des émigrés français vivant à l’étranger.

Elle enquêtera sur les conditions d’accueil dans les pays d’immigration, sur le plan tant de la législation que des conditions matérielles et sociales.

Elle mettra en lumière les difficultés d’insertion des étrangers, mais aussi tous les apports économiques, sociaux et culturels de l’immigration, bénéficiant aux sociétés d’accueil.

Elle s’efforcera, par la diversité de ses reportages, de ses interlocuteurs et de ses modes de traitement, de proposer aux téléspectateurs une connaissance la plus précise et la plus intime possible des réalités communes à toutes les migrations : l’exil, le rapport au pays d’origine, l’immersion dans la société d’accueil, le rapport aux autochtones et aux autres migrants, les confrontations culturelles...

Elle s’intéressera aux analyses, aux propositions, aux politiques et pratiques qui visent à peser, dans un sens ou dans l’autre, sur le volume et les destinations des flux migratoires.

3. Mode de traitement

La richesse du champ éditorial est telle qu’elle peut nourrir une émission hebdomadaire. Un format de 90 minutes pourrait être adapté. Ce rythme présente les avantages de permettre un travail de type « magazine » (temps d’enquête, recul par rapport à l’actualité tout en assurant son traitement sans trop de décalage...), mais aussi de permettre la fidélisation d’un public.

Afin d’être au plus près des réalités des migrants, de leur vie et de leurs expériences, mais aussi pour être la plus attractive possible, l’émission sera essentiellement composée de reportages de terrain.

Ces reportages favoriseront l’expression des premiers concernés par les sujets traités, c’est-à-dire les migrants. Les équipes qui réaliseront les reportages devront disposer du temps et des moyens pour « s’immerger » dans les réalités à traiter. Les formes des reportages seront diversifiées (portraits d’individus ou de familles, dossiers, feuilletons documentaires, enquêtes d’investigation, montages d’archives...).

La réalisation s’attachera à mettre en valeur les informations et les analyses tout en proposant une écriture télévisuelle originale, attractive, percutante, susceptible d’intéresser un public divers, les jeunes notamment.

Cette réalisation puisera dans les multiples expressions et manifestations culturelles, artistiques, intellectuelles ayant trait aux migrations, que ce soit la création artistique des étrangers, ou les démarches de métissage culturel.

Une structuration de l’émission pourra donner des repères au téléspectateur.

Exemples de « rubriques » :

 L’actualité des migrations en Europe.
 Portraits de migrants dans le monde.
 Récit historique d’une migration.
 Une famille française émigrée.
 Enquête sur les statuts des étrangers dans le monde.
 Décryptage d’un événement de l’actualité internationale pouvant avoir des incidences sur les migrations.

4. Le site Internet

Un site Internet sera associé à l’émission. Il n’en sera pas un appendice mais sera considéré comme un élément constitutif du projet éditorial, complémentaire de l’émission.

En faisant appel, entre autres, à des liens vers des sites spécialisés, il proposera :

 des informations écrites complémentaires à celles incluses dans les reportages de l’émission (statistiques, lois, bibliographies, etc.)
 des textes de spécialistes : historiens, géographes, sociologues, économistes…
 des tribunes, des études, ayant trait aux thématiques de l’émission
 des éléments de reportage qui n’auront pas été utilisés pour la diffusion initiale (interview, séquences...).
 des reportages exclusivement diffusés sur le site (en raison de leur longueur, de leur traitement particulier, etc.)
 des agendas (événements culturels, associatifs, actualité politique au niveau national et international, etc.)
 la possibilité de dialoguer entre téléspectateurs, mais aussi avec certains intervenants des reportages diffusés et les journalistes de l’émission.
 pour ceux qui le souhaiteront, la possibilité d’établir une relation directe par courriel entre téléspectateurs, associations, intervenants dans les reportages

5. Un "conseil scientifique"

L’émission pourrait se doter d’un « conseil scientifique », à vocation consultative, constitué de « personnalités compétentes » en matière de questions migratoires, ce qui permettrait de développer les synergies entre les chercheurs, les praticiens de terrain et les professionnels de l’audiovisuel.

6. Quelques thématiques de reportages

La thématique des migrations permet de « couvrir » un grand nombre de sujets. Voici quelques exemples de thèmes qui pourraient être abordés dans les reportages :

 Chaque année, 75000 diplômés quittent l’Afrique. Aujourd’hui, il y a plus de médecins béninois à Paris qu’au Bénin… Enquête à l’heure de la mise en place de « l’immigration choisie ».
 En raison de la raréfaction du poisson au large des côtes sénégalaises, à cause de la pêche industrielle, notamment européenne, les pêcheurs sont poussés à partir ou à devenir des passeurs…
 L’exode rural des Bretons, notamment après la guerre, et leur arrivée massive à Paris. Autre exemple de « migration interne » avec les Auvergnats venus à Paris pour les « bois et charbons ».
 Les réfugiés climatiques au Bangladesh. Des Bangladais sont obligés de quitter leur village du fait de la montée des eaux. Enquête sur cette migration vers d’autres régions du Bangladesh, qui devrait s’amplifier dans les prochaines années.
 L’installation de nombreux réfugiés basques qui ont fui le franquisme et qui se sont réfugiés en Amérique du Sud. De nos jours, les liens restent encore très forts.
 Qu’est-ce que l’ouverture des frontières en Europe a changé dans les habitudes des Roms ?
 La baisse des cours du coton a des conséquences désastreuses sur beaucoup de populations du Sud, notamment au Mali. Là encore, des populations sont obligées de quitter leurs campagnes pour survivre.
 Au travers de systèmes de solidarité très bien organisés, des immigrés installés et travaillant en France et dans d’autres pays du Nord, de façon légale ou non, participent très largement au développement de leur village, en finançant par exemple des écoles ou encore des hôpitaux.
 Les « émeutes de la faim » qui éclatent un peu partout dans le monde entraînent aussi des phénomènes migratoires. Des populations nombreuses sont obligées de partir si elles veulent manger.
 Qui sont les Français qui immigrent au Royaume-Uni ou aux États-Unis ? Que cherchent-ils et comment vivent-ils ? Comment s’intègrent-ils dans les pays d’accueil ?
 Qui sont les Français qui s’installent dans les pays du Sud ? Qui sont-ils et que viennent-ils y chercher ? Là encore, comment s’intègrent-ils dans les sociétés d’accueil ?
 La situation souvent dramatique de migrants de pays pauvres vers d’autres pays pauvres : l’exemple des Érythréens exilés en Lybie, ou celui des travailleurs migrants haïtiens expulsés de la République Dominicaine.
 La migration – importante en nombre - vers l’Amérique latine, à la fin du XIXe siè–cle et au début du XXe, de Syro-libanais, alors sujets de l’Empire Ottoman et de ce fait appelés là-bas « les Turcs ».

1) Agence Nationale d’Accueil des Etrangers et des Migrations
2) L’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances
3) Cité nationale de l’histoire de l’immigration

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