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Première vidéo, témoignages accablants : le scandale d’Abou Ghraib s’amplifie

Publie le dimanche 23 mai 2004 par Open-Publishing
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Le scandale d’Abou Ghraib s’est amplifié vendredi avec la diffusion d’une première vidéo et de nouvelles photos, ainsi que des témoignages sur des tortures infligées par des militaires américains à des détenus irakiens pour leur soutirer des informations.

Des détenus libérés vendredi de la sinistre prison d’Abou Ghraib sont arrivés en bus à la base américaine d’Amariyah, dans la banlieue ouest de Bagdad, leurs affaires à la main et l’amertume au visage.

"Ils ont maltraité tout le monde. Parfois, ils mettaient les détenus sur le sol et posaient leurs chaussures sur leur tête", indique Abdelwadoud Ahmed, un professeur d’éducation physique de l’université de Tikrit, au nord de Bagdad.

Ces informations accablantes, qui tombent au compte-gouttes depuis le 28 avril, contribuent à l’embarras croissant de l’administration Bush, de plus en plus montrée du doigt pour les techniques d’interrogatoire appliquées en Irak.

La question des responsabilités est plus brûlante que jamais. Sept soldats de la police militaire sont inculpés. L’un d’eux a été condamné mercredi en cour martiale. Mais il n’a pas encore été établi s’ils agissaient sous les encouragements, les conseils ou les ordres de leur hiérarchie.

La vidéo, diffusée en exclusivité sur le site internet du Washington Post, s’ajoute à une série de nouvelles photos et de témoignages de treize détenus irakiens que publie vendredi le quotidien.

Ce sont les nouveaux témoignages qui fournissent "l’image la plus détaillée à ce stade de ce qui s’est passé dans le quartier des cellules" d’Abou Ghraib, écrit le Post.

Et les détails en question sont des plus scabreux. La vidéo, de 50 secondes, ouvre sur un militaire malmenant un prisonnier. Il le plaque sans ménagement contre un mur. Un des soldats, moustachu, coiffé d’un bonnet noir, les mains gantés, le gifle.

L’homme, déséquilibré par le choc, met un genou à terre. Il est ensuite contraint de se dévêtir entièrement. Le soldat moustachu prend ensuite les bras d’un autre détenu, étendu sur le sol, pour le traîner dans un coin. Il oblige ensuite un troisième détenu, nu et la tête recouverte d’un sac sombre, à s’accroupir. L’image s’arrête.

Le Post — qui a choisi de mettre en Une la photo d’un détenu en combinaison orange, accroupi, crâne rasé, les mains liées dans le dos et le regard terrifié par un chien noir en laisse, montrant ses crocs — estime que ces nouvelles images "montrent une variété de techniques violentes encore jamais vues" par le grand public.

Le quotidien précise que ces images sont "extraites d’une collection de films numériques vidéos" que le journal s’est procurés, mais sans indiquer dans quelles conditions.

Les témoignages des 13 détenus irakiens, figurant dans des documents établis par les enquêteurs de l’armée américaine, cités par le Post, sont encore plus choquants. Ils affirment avoir été victimes d’attouchements de la part de femmes soldats, forcés à manger des aliments récupérés dans les toilettes.

Ces 65 pages de témoignages relatent les plaintes des détenus affirmant avoir été chevauchés comme des animaux par des gardes.

Plus grave pour ces musulmans : ils affirment avoir été contraints d’insulter leur religion, manger du porc et boire de l’alcool, des pratiques formellement interdites dans l’islam.

"Parce qu’ils ont commencé à frapper ma jambe cassée, j’ai insulté ma religion. Ils m’ont ordonné de remercier Jésus d’être vivant", a raconté l’un des détenus.

"Ils nous obligeaient à marcher sur nos mains et nos genoux comme des chiens", s’est rappelé un autre, Hiadar Sabar Abed Miktoub al-Aboudi, matricule numéro 13077. "Et nous devions aboyer comme un chien, et si nous ne le faisions pas, ils se mettaient à nous battre avec force et sans pitié au visage et au torse", ajoute-t-il.

D’autres ont expliqué qu’ils étaient restés nus pendant plusieurs jours de suite, certains contraints de porter des sous-vêtements féminins. L’un d’eux a affirmé avoir vu un traducteur de l’armée américaine ayant des relations sexuelles avec un adolescent qui hurlait de douleur. Un détenu a raconté comment des soldats sodomisaient un de ses compagnons d’infortune avec un tube néon.(AP)

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