Accueil > Le Monde Diplomatique de Juillet

Le Monde Diplomatique de Juillet

Publie le vendredi 4 juillet 2008 par Open-Publishing

Relevé dans la livraison de juillet du Monde Diplomatique :

Dans son éditorial sur le référendum irlandais, Serge Halimi ironise : « Parce qu’ils ont rejeté un traité “ simplifié ” assez amphigourique pour que le premier ministre Brian Cowen a dû admettre n’avoir pas réussi à le lire en entier, les Irlandais auraient, selon un député européen, ressuscité le souvenir d’une « démocratie populaire ».
L’Europe parle de paix, mais s’engage dans les guerres de l’armée américaine. Elle parle de progrès, mais organise la déréglementation du travail. Elle parle de culture, mais rédige une directive, Télévision sans frontières, qui multipliera la fréquence des spots de publicité. Elle parle d’écologie, de sécurité alimentaire, tout en levant un embargo de onze ans sur l’importation de poulets américains préalablement immergés dans un bain de chlore.
Observant qu’en Irlande, les femmes, les jeunes de 18 à 19 ans, les ouvriers, les employés ont massivement rejeté le texte qu’on leur proposait, l’hebdomadaire The Economist ironise : « Un collège électoral proche de ceux du XIXe siècle, c’est-à-dire réduit aux propriétaires âgés de sexe masculin aurait produit un “ oui ” massif au traité de Lisbonne. »

Alain Gresh enquête sur le « virage de la diplomatie française ». Il observe que se dégage « une conception diplomatique occidentalo-atlantiste fondée sur l’alliance avec les États-Unis et sur la perception que les transformations du monde sont menaçantes pour l’Occident. Eric Besson, rallié et nommé ministre pour prix de sa petite trahison, qualifiait en janvier 2007 Sarkozy de « néoconservateur américain avec un passeport français ».

Très bonne analyse bilan de Pierre Rimbert sur « TF1 ou la parabole de Frankenstein ».
Entre le don à M. Arnault de l’empire Boussac préalablement perfusé de fonds étatique (1984), les cascades de subventions englouties par des entreprises acquises au franc symbolique par M. François Pinault (1986), les gratifications fiscales de plusieurs milliards d’euros attribuées à Vivendi (1999), la division par huit du prix des licences téléphoniques concédée par Laurent Fabius pour complaire aux opérateurs (2001), que de baronnies médiatiques furent bâties ou consolidées par le contribuable au cours du grand mouvement d’autospoliation de l’État qui débuta en 1983 !

Très édifiant et amusant compte rendu d’un livre de Nick Davies, Flat Earth News, « L’émotion n’existe pas, alors inventez-la ! ».
L’article évoque la mort de la reine mère anglaise. Les médias partent du principe que les Anglais de base vont être émus aux larmes. Problème : les Anglais s’en foutent. Alors, « le samedi soir, une équipe dépêchée dans le West End de Londres pour rapporter l’histoire – écrite à l’avance – des clubs et des cinémas désertés par les millions de personnes en pleurs, trop tristes pour sortir et s’amuser, découvre un West End aussi animé qu’à l’accoutumée. Un journaliste audacieux remédia au problème en déclarant à la caméra que le West End manifestait à nouveau le “ courageux esprit du Blitz ”. Il expliqua que les foules étaient bien en deuil mais que la vie devait continuer.

Article très documenté de B. Tinel et F. Van De Velde sur « L’épouvantail de la dette publique » en France.
En mai, le déficit des caisses de retraite a servi à légitimer l’allongement du temps de travail. En juin, celui de l’assurance maladie a justifié le projet gouvernemental de réduire les remboursements de médicaments.
Plus l’économie stagne, plus la dette publique rapportée à la production nationale s’accroît. Plus l’économie est dynamique, plus cette part se réduit. La plupart des analystes ayant pignon sur rue considèrent le désendettement des administrations comme un préalable à la croissance économique. Il n’en est rien puisque l’endettement, lorsqu’il résulte d’une forte augmentation des dépenses, stimule la croissance. C’est l’endettement des administrations publiques qui tend à favoriser la croissance, et c’est la croissance trop faible qui génère de l’endettement.
Depuis 1994, le taux de croissance des dépenses publiques est toujours inférieur au taux de croissance de l’économie (sauf en 2202 et 2003). Sur une période de quarante ans, on s’aperçoit que les dépenses publiques ont plutôt tendance à ralentir quan d l’économie est prospère et à accélérer quand l’économie va moins bien. Elles compensent l’insuffisance de croissance. La nouveauté réside dans le grippage de ce mécanisme : malgré la faiblesse de la croissance depuis 2002, les dépenses publiques peinent à prendre le relais. Cela explique pour partie que l’économie française entame sa septième année de croissance économique molle. Les Français en payent le prix fort en termes de chômage, de précarité et de pouvoir d’achat.

Géraldine Colotti évoque le « vent mauvais qui souffle en Italie » sur les Roms.
Des policiers en tenue de guerre évacuent les camps de nomades. Un « commissaire extraordinaire pour l’urgence rom », nommé par Berlusconi, impose une carte d’identité à quiconque pénétre dans son propre camp. À Naples, un campement est pris d’assaut à coups de cocktails Molotov.

Écrit par Maurice Lemoine avant la libération d’Ingrid Betancourt, « La Colombie, Interpol et le cyberguerillero » évoque le jeu plus que trouble d’Uribe. Selon Lemoine, Ingrid aurait pu être libéré trois mois plus tôt.

« Quand les volailles donnent la chair de poule », par Tristan Coloma, enquête sur le Père Dodu, l’industriel Doux « qui conjugue subventions publiques, délocalisations et restructurations qui font des consommateurs, mais aussi des fermiers producteurs de poulets des victimes de choix.

Spécialiste de l’Europe, Bernard Cassen nous parle des “ Européens ” hors sol et hors classe.
Moins on connaît le contenu des traités européens et plus on vote en leur faveur, en particulier lorsqu’on est parlementaire. Plus on les a lus et analysés, moins on les approuve.
Cassen se penche en particulier sur la toute puissance néfaste de la Cour de justice des Communautés européennes, sur son rôle scandaleux, qu’elle s’est arrogée avec la complicité des gouvernements, en matière sociale.
En 2007, elle a donné raison à la société finlandaise de ferries Viking Line qui voulait se délocaliser en Estonie pour payer des salaires estoniens. En 2008, elle a invalidé une loi du Land allemand de Basse-Saxe obligeant les entreprises de travaux publics à appliquer la convention collective de ce sectreur dans la passation des marchés publics.
Bref, la fracture démocratique n’est pas près de se résorber.
A lire également une étude très intéressante sur le polar italien par S. Quadruppani.