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Montréal-Nord : « ici, la police agit comme une forme de gang »

Publie le mardi 12 août 2008 par Open-Publishing
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Ce quartier au nord de Montréal s’embrase à la suite d’une patrouille policière mal tournée. Un jeune Hondurien est tué mais les médias tendent d’associer l’affaire aux gangs de rue. Erreur selon des riverains de race blanche.

Au lendemain des émeutes de Montréal-Nord (deux blessés dont un par balle, huit voitures incendiées, Service des pompiers saccagé), les jeunes Noirs, Latinos et autres membres des communautés culturelles sèchent le site des événements : le boul.Roland.

Commerçants constatant les dégâts, attroupements, journalistes en quête de sensations, d’émotions, de commentaires sont légion. L’ambiance est lourde et même pourrie au milieu de ces visages graves, de ces tessons de bouteilles, de ces carcasses de voitures cramées par des émeutiers.

Très remontés contre le « poste 39 » de la police de Montréal, les « Blancs » du quartier ne se terrent pas ni ne se taisent. Daniel Gauthier concierge d’un grand immeuble à logement et magasin au rée-de-chassée parle des policiers qui patrouillent le secteur comme étant « la maternelle » du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). « On nous envoie des débutants dans le secteur », cartonne-t-il.

Le concierge dénonce également un profilage et une discrimination contre les communautés culturelles dans le travail des policiers. « La façon qu’ils sont interpellés est très agressante. Nous, on ne se fait pas aborder comme cela, au contraire ils (policiers) nous saluent de la main ou d’un signe de tête », s’insurge M.Gauthier.

Maxime, 23 ans, parle des rapports entre la police et les communautés comme une guerre de gang. « Ici, la police agit comme une forme de gang. La différence c’est qu’il s’agit d’un gang avec autorité », dit-il. Abus de pouvoir, profilage, discrimination, approche policière inadéquate, Maxime ne connaît pas tout cela, mais il en est victime souvent par association. « Cela m’arrive sauf lorsque je suis accompagné de mes amis Noirs, Latinos, Pakistanais, Indiens. J’ai beaucoup d’amis dans ces communautés », confie-t-il.

En conférence de presse conjointe convoquée à la va-vite au lendemain des émeutes avec le haut état major de la police de Montréal, Pierson Vaval de l’Équipe-RDP (Rivière-des-Prairies) casse le même sel sur le dos de la police.

« Le chef de la police m’a dit que j’étais libre de dire tout ce que j’ai à dire », précise M.Vaval. Selon lui, les interventions policières sont inadéquates, les politiciens sont à mille années lumières des communautés et leur discours n’atterrissent pas.

« Ce qui s’est passé n’est pas seulement une rébellion contre le SPVM mais aussi contre le système, lâche Pierson Vaval dont les propos sont rapportés en direct sur les ondes de Radio-Canada, il va falloir que les politiciens se rapprochent des communautés ».

Depuis le déclenchement des hostilités, samedi 9 août, les médias à grands tirages et la télévision présentaient les jeunes et les manifestants comme étant membres des gangs de rue.

« Ce n’est pas un événement en lien avec les gangs de rue, met en garde l’intervenant social à Rivière-des-Prairies, ce qu’on voit c’est une communauté qui se révolte parce qu’elle n’aime pas la façon qu’elle est traitée », lance Pierson Vaval flanqué des chefs de la police et des pompiers.

Acculé de questions de journalistes sur les méthodes et approches de la police Yvan Delorme, le chef du SPVM, lance un appel au clame et au dialogue avec les communautés. « Je suis à l’écoute et je veux engager des discussions franches », déclare l’officier de police.

Samedi 9 août trois jeunes prennent une marche à l’intérieur du parc Henri-Bourassa avec d’autres amis. En croisant deux policiers, le groupe de jeunes se serait alors éloigné de quelques mètres, afin de laisser les policiers passer.

« Un des policiers pointe alors l’un d’eux et le somme de s’approcher, ce que (celui-ci) refuse de faire. Il rétorque : « Je n’ai rien fait de mal, tu ne peux pas m’arrêter ». Cette réaction ne plaît au policier, qui l’agrippe. Le jeune réagit assez mal », raconte Erica Cruz qui se présente comme un témoin de l’incident. Elle affirme que le policier frappait l’un des jeunes, alors que les deux autres, un Noir et un Latino, interviennent et c’est à ce moment là que le policier fait feu blessant les trois jeunes. L’un d’entre eux, Freddy Villanueva, 18 ans, d’origine hondurienne, est décédé des suites de ses blessures.

Interrogé sur le caractère inadéquat de cette intervention des agents, le chef de la police de Montréal Yvan Delorme reste évasif. « La ligne est très mince entre le maintien de la sécurité et le fait de ne pas commettre des erreurs ou poser des actions qui pourraient être perçues comme telle ».

Une enquête menée par la Sûreté du Québec (SQ) est actuellement en cours et le maire de Montréal Gérald Tremblay réclame le bénéfice de l’urgence dans ce cas-ci. Une autre enquête autour du brasier ayant suivi la manifestation de dimanche est assurée par le SPVM.

JNG/HPN

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