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Conflit ouvert à la direction d’Attac sur les listes "100 % altermondialistes" pour les européennes

Publie le dimanche 30 mai 2004 par Open-Publishing

La fièvre n’est pas retombée à Attac. Lancée par certains de ses responsables, la constitution de listes "100 % altermondialistes" en vue des élections européennes du 13 juin alimente un débat de plus en plus nourri au sein de l’association. Désormais, même le très sérieux conseil scientifique s’écharpe sur la question. Et, au vu de l’ampleur de la polémique, le sujet a été mis à l’ordre du jour de deux grands rendez-vous de l’association : le conseil d’administration, finalement repoussé au 15 mai, et la conférence nationale des comités locaux (CNCL) des 22 et 23 mai.

Du coup, pour sortir des interpellations et prises à partie qui se multiplient, plusieurs documents viennent d’être diffusés aux adhérents pour exposer les positions en présence. Pour la première fois, les trois vice-présidents d’Attac – Gus Massiah, du Centre de ressources et d’information sur le développement (CRID), François Dufour, de la Confédération paysanne, et Susan George – sont entrés dans une opposition frontale au président d’honneur de l’association, Bernard Cassen, et à son président en titre, Jacques Nikonoff. Tous trois ont cosigné, aux côtés de plusieurs autres membres du bureau (Daniel Rallet de la FSU, Pierre Khalfa du Groupe des dix, Christian Pilichowski de l’UGICT-CGT, et Christian Pierre de la fédération CGT des finances) un texte dans lequel ils contestent l’initiative "100 % altermondialiste" tant sur la forme que sur le fond.

"ILLUSOIRE ET HYPOCRITE"

"Le secret qui a entouré l’opération était voulu", écrivent-ils. "En s’engageant dans une opération d’envergure de ce type, le président d’honneur d’Attac, considéré dans de larges secteurs de l’opinion et des médias comme son porte-parole de fait, et le président d’Attac, qui a donné son accord, ont fait prendre à l’association des risques majeurs", énoncent-ils. " Dire qu’on est désormais obligé de se présenter aux élections pour faire vivre les idées d’Attac, c’est remettre en question le fondement même de notre identité", ajoutent-ils, en jugeant "illusoire" et "hypocrite" l’affirmation selon laquelle Attac "ne sera pas engagée" par les listes "100 % alter". Et de conclure : "Nous n’admettons pas qu’Attac soit ainsi instrumentalisée par quiconque, ni que son image et sa notoriété soient mises au service de la création d’une nouvelle force politique quelle qu’elle soit."

De son côté, dans une contribution intitulée "Dépasser l’anecdotique, aborder le fond", M. Cassen rejette la notion d’"opération d’envergure". "Il s’agit d’une initiative qui s’est seulement cristallisée début avril, après le deuxième tour des régionales", affirme-t-il. Les animateurs des listes, indique-t-il, " ont réaffirmé que, même s’ils faisaient leurs les analyses de l’association sur l’Europe, ils ne revendiquaient aucun soutien de sa part, ne parlaient pas en son nom et s’engageaient à titre strictement individuel".

Pour M. Cassen, les enjeux du scrutin européen sont autres : "Le principal parti de gouvernement de l’ex-gauche plurielle entend bien faire du 13 juin le troisième tour des régionales afin d’escamoter le débat sur le contenu du traité constitutionnel qui sera pourtant adopté le week-end suivant." Pour lui, les membres des listes "100 % alter" font le pari que "l’offre politique n’est pas figée une fois pour toutes". Et cite, à l’appui de sa démonstration, une analyse... de la tendance minoritaire de la LCR. "Si un nouvel objet politique né de l’intérieur de l’association devait voir le jour dans les années à venir, il devrait se bâtir en toute indépendance d’Attac", avance-t-il. Avant d’appeler à une réflexion sur "le rapport à l’engagement politique" dans l’association.

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3224,36-363677,0.html