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Les projets alternatifs financés par une secte ?

Publie le mercredi 2 juin 2004 par Open-Publishing
14 commentaires

Salut à tous,

La liste des organisations ci-dessous (non exhaustive) référence la NEF
comme partenaire financier privilégié.

La Confédération Paysanne
Garrigue, Investir autrement
Crédit Coopératif
Banque-solidarités
Sel-idaire
Finansol
ATTAC (conférence publique NEF-ATTAC le 11/03/2003 à Grenoble : De l’argent
fou à l’argent citoyen . Bernard Monnot et Jacky Blanc)

La NEF a été créée par Jean-Pierre Bideau et Henri Nouyrit en 1979. Voilà ce
qu’ils déclarent :

"En 1979 nous étions une vingtaine d’amis désireux d’expérimenter entre nous
des relations d’entraide économique et financière. Nous nous sommes inspirés
de l’observation formulée en 1919 par le philosophe et savant autrichien
Rudolf Steiner (créateur du courant de pensée appelé anthroposophie) pour
qui l’économie est le domaine d’activité humaine où devrait s’exercer la
fraternité - c’est à dire la coopération et la solidarité - au lieu de la
rivalité qui s’y impose généralement. Et nous nous sommes livrés à un
exercice pratique en commençant par le financement d’un projet agricole.

Quant à Rudolf Steiner, voici une des multiples débilités qu’il a proclamés
pour pouvoir être déclaré philosophe.

L’âme est à la fois masculine et féminine. Il faut imaginer l’homme-femme,
des « temps très reculés », sous des apparences fort différentes de ce que
sont devenus l’homme et la femme : « des formes humaines souples et
malléables » dont les aspects masculin et féminin vont progressivement se
dessiner, provoquant à la longue une « séparation des sexes ». Conséquence
de cette séparation, le corps a perdu la faculté de s’auto-féconder. Mais
aussi, seconde conséquence : la force qui dans l’homme-femme servait à l’
auto-fécondation, n’ayant plus à s’exercer, crée le cerveau, la faculté de
penser . C’est ce qui fait dire à Steiner que « la pensée a été acquise au
prix de l’unisexualité ». Ainsi « le corps masculin et le corps féminin
représentent extérieurement chacun une forme imparfaite de l’âme, mais de ce
fait deviennent dans leur intériorité des êtres plus parfaits. » Troisième
conséquence, enfin, « l’âme acquiert la faculté de collaborer avec l’
sprit » : « Pour ce qui est de la vie extérieure, l’être humain connaîtra
désormais une fécondation venant du dehors ; pour sa vie intérieure, elle
vient du dedans grâce à l’esprit ».

Qu’en penser ?

Messages

  • Oui, on peut se méfier, mais bon, Proudhon était mysogyne, ce qui ne
    fait pas de tout-e-s celles-ceux qui s’y réfèrent un tant soit peu des
    machistes. Donc, il convient d’essayer de se rencarder un peu plus pour
    ne pas faire de bourde ni dans un sens ni dans l’autre, non ?

    Pascal

  • à Thyristor,
    triste sire,

    Qu’en penser, que rien n’est blanc ou noir ...
    N’est-ce pas sur les pratiques, que l’on doit juger, et non sur des intentions supposées ?
    Et les anti-sectes, ne risquent-ils pas de finir par fonder leur propre secte ?

    Oui, Steiner était plus que douteux, animé par une logique raciste fort répandue à l’époque, fut-il le seul ? Le plus dangereux ? Steiner était contre la loi de l’argent, symbolisée par Wall Street, il présentait que la loi du pognon allait ruiner la terre...
    Paradoxe : malgré ses écrits, il a quand même finit dans les camps, où il poursuivi ses expériences sur la bio-dynamie...

    MEEEEERDE !

    Faudrait-il stoper net tous les projets alternatifs, bio, écolo au prétexte que la Nef "serait" une secte ?
    Faut-il remettre notre pognon chez BNP Paribas ou au Crédit à Bricoles ?

    Et la secte du pognon-Roi, qui passe son temps à essayer de ternir l’image du seul fond de placement alternatif dans ce pays, elle ne te dérange pas ? Toutes les autres banques financent l’armement, les industries chimiques, les OGM, le tout-béton, le nucléaire, soutiennent ardamment la politique ultra libérale de Bruxelles et les délocalisations chez les plus soumis... et le chômage qui va avec... Toutes ces banques oeuvrent à la signature de l’AGCS et à la réduction du rôle des Etats-Nations, au profit de l’internationale du Pognon-Roi. Mais c’est drôle, cela ne semble guerre t’indisposer...

    Alors, dans l’intervale, si on foutait la paix à la Nef ?
    En admettant que le noyeau fondateur ait décidé de verrouiller ses statuts et son bureau, cela n’empêche en rien la Nef de financer de beaux projets utiles à tous. Je t’invite à te procurer le dernier doc annuel de la Nef, tu pourras constater que le financement des activités est très divers, mais toujours dans le sens du mieux-être : écologie, biodiversité, solidarité, création d’emplois locaux.

    La Nef est pour l’instant seule ou presque sur le terrain de l’économie alternative et solidaire, c’est donc bien logiquement que toutes les associations et organisations pré-citées collaborent avec celle-ci.

    C’est vrai que plutôt que de se doter d’outils financiers alternatifs (une action vraiment Révolutionnaire, pourtant), les militants politiques "orthodoxes" préfèrent, en général, travailler à un grand soir ultérieur et éventuel, tout en continuant de financer au quotidien ce qu’ils prétendent combattre, la maffia financière mondiale...

    la Nef n’est ni plus, ni moins, dangereuse que certaine organisation politique trotskiste, dont nous ne connaissons pas ni les dirigeants, ni les statuts, ni même le nom, mais seulement sa porte-parole.

    Ce qui ne soulève pas d’histoires, que je sache...

    Salutations

    • Putain, je croyais pas énerver les gens de la sorte...

      Je n’ai jamais dit que le financement d’un projet par la NEF faisait du dit projet un mauvais projet.
      Pourquoi me soupçonnes-tu de ne pas être indisposé par le capitalisme ?

      C’est marrant, je n’aurais pas l’idée de défendre les thèses antisémites de Proudhon, alors que ce fut un précurseur du mutualisme.
      Cela n’a pas l’air d’être ton cas au sujet de la NEF. A moins que tu sois un adepte de Rudolf Steiner, mais c’est une autre histoire.

      Lorsque tu dis :"Faudrait-il stoper net tous les projets alternatifs, bio, écolo au prétexte que la Nef "serait" une secte ?"
      je te réponds : " De deux maux prenons le moins pire", sans pour autant affirmer que la NEF est une organisation nuisible pour le projet financé.

      Je concluais par : "Qu’en penser ?" et me fais traiter de triste sire !
      Je sais au moins à présent que penser de la capacité de dialogue de Christian Denis.

      Thyristor12

    • Ce qu’y a de bien sur cette liste c’est que dès qu’on n’est pas d’accord avec quelqu’un on le soupçonne d’être trostkiste !!!! Thyrystor qui a fait de bonnes tirades antitrotsk et qui se revendique plutot de l’anarchisme ou du mouvement libertaire ??? En fait les frais aujourd’hui.... Yek !! yek !!! on est toujours le trotskiste de quelqu’un...

      bernard

  • J’ai bien connu des anthroposophes dans les années 60,
    en Suisse. C’est vrai que leurs discours m’ont paru
    "un peu débiles", mais à l’époque, dans le milieu catho
    où j’ai été élevée, ça ne faisait pas une grosse différence
    en ce qui concerne les stupidités sur les femmes ;
    c’était du pareil au même.

    Par contre ils avaient un grand respect pour les handicapés,
    et les malades condamnés. J’ai apprécié le cadre de vie
    qu’ils offraient aux trisomiques et aux agonisants,
    dont il n’existait aucun équivalent en France.

    Idem pour l’éducation des petits enfants, c’est là-bas
    que j’ai vu les premier efforts de pédagogie active pour
    tous, où on mettait en oeuvre dans des classes populaires
    des techniques plutôt réservées aux gosses avec précepteurs.

    voilà voilà.
    c’est un serpent de mer sur cette liste de dire du mal
    de la NEF sous pretexte de Rudolf Steiner. C’est short,
    et à mon avis il si critiques il y a sur la NEF,
    elles devraient s’appuyer sur des faits bancaires contemporains.

    amitiés,
    Hélène

  • Un extrait d’un site anti-secte http://www.prevensectes.com/ a concernant un bouquin de Paul Aries "Anthroposophie Enquête sur un pouvoir occulte "

    Ce courant occultiste est peu connu malgré ses réalisations qui font de chacun un allié potentiel de Rudolf Steiner, fondateur de l’anthroposophie : agriculture bio-dynamique, écoles Waldorf, eurythmie, banque ou placement éthique, médecine alternative, architecture nouvelle etc.

    Qui sont ces anges que l’homme retrouverait durant son sommeil ? Que penser des archanges qui domineraient la vie des divers peuples ? Quel rapport entre la race germano-nordique et la NEF, future banque "verte" ? Existe-t-il des races inférieures ? Les noirs sont-ils mieux que les jaunes ? Pourquoi la société future serait-elle constituée en différentes castes ? Pourquoi ne faudrait-il pas intellectualiser les enfants prématurément ? Que contiennent les produits issus de l’agriculture bio-dynamique ? Comment fonctionnent vraiment les médicaments anthroposophiques ? Comment vivent depuis bientôt un siècle les anthroposophes ? En quoi croient-ils ? Sont-ils à l’origine du New-Age, de l’écologie profonde ?

    Qui se cache derrière le centre mondial suisse dénommé le Gautheanum ? Quels sont les soutiens dont elle bénéficie au sommet des Etats ? Pourquoi une certaine "gauche" choisit-elle Steiner contre Marx et Freud ?

    Un livre iconoclaste et dérangeant : un ouvrage qui questionne.

    Paul Ariès a publié une dizaine d’ouvrages sur des sujets de société : les sectes, la pédophilie, la MacDonalisation, le terrorisme Pour tout contact : courrier électronique : paularies@voila.fr

    Ce qui ne prouve pas que les animateurs de la Nef fassent encore partie de la "secte", Jospin est bien sorti de la secte du PCI , :)

    Jean-Marc

  • J’ai un compte à la NEF (eh oui on est toujours trop naïf !). Malgré 2 courriers électroniques, 4 coups de fil à lyon au siège et une visite sur leur stand au LARZAC (où je me suis fait jeter dans un premier temps et où ensuite on m’avait promis une réponse) je n’ai toujours pas de réponse à propos de ma remarque concernant le soutien de la NEF à des projets de la fondation Raoul Follereau fondation prosélyte qui soutien l’opus dei.
    Je n’ai fait que demander à la NEF ce qu’elle pensait du rapport de l’ IGAS (Inspection Générale des Affaires Sociales) à propos de la fondation Raoul Follereau et pourquoi au vu de ce rapport elle continuait à avoir un lien vers cette organisation sur son site. Par ailleurs dans les documents reçus en préparation de l’ assemblée générale de la NEF la fondation Raoul Follereau y figure toujours en bonne place. Emmaüs y figure également. Demandez à ceux qui habitent dans des logements gérés par cette association ce qu’ils pensent d’ Emmaüs et vous aurez un début d’idée sur le traitement "social" de cette association.
    On se doit quand on s’appelle la NEF d’avoir une certaine éthique...que penser de ce silence envers ses propres adhérents ?
    Pour information je vous indique des liens interessants : http://fatoulon.lautre.net/article.php3?id_article=43
    http://www.lanef.com/pret/mainpret.htm
    A bon lecteur salut !

  • nous , au BLOC-CATALA , ce n’est pas " MOSCOU " (ni BARCELONE d’ailleurs ! ) qui nous finance !
    cristià reig
    www.bloc-catala.com

  • Pour ceux qui ne l’aurait pas lu, ci-après l’article de Renaud Marhic, où pratiquement tout est dit sur la nef , l’anthroposophie, sinon il faut regarder au Goethenum à Dornach en Suisse...

    Le Vrai Papier Journal, n°1, juillet 2000

    Mise en ligne sur ce site : septembre 2000

    AU SECOURS ! LES ANTHROPOSOPHES SONT LÀ

    Écolos, alternos et anti-OMC se financent à la NEF, une société coopérative de prêts liée au théoricien raciste Rudolf Steiner.

    Pierre l’a mauvaise, les tripes retournées par une solide trouille : il est l’un des 17000 membres d’ATTAC, (1) association qui suscite beaucoup d’espoirs depuis sa création, en 1998. Et voici qu’elle risque d’être infiltrée, phagocytée…

    Pierre raconte : « juin 1999, notre collectif local a organisé une rencontre sur le thème de l’économie solidaire. Nous avions invité un organisme de prêts alternatif, la NEF… » Cette Nouvelle Économie Fraternelle représente une chance pour le monde alternatif, celle de voir enfin un jour une « banque verte », dont le fonctionnement financier serait en rupture avec les modes bancaires classiques.

    Fondée en 1968, la NEF était à l’origine une simple association. Vingt ans plus tard, ayant obtenu le visa de la Commission des opérations de Bourse, elle lançait un appel public à l’épargne. Objectif : la création d’une Société financière coopérative nécessitant un capital minimum de 7,5 millions de francs. 8,2 millions furent engrangés grâce à sept cents souscripteurs.

    Depuis, forte de son nouveau statut, la NEF propose des prêts à ceux qui se les voient habituellement refuser : pension de famille pratiquant la restauration macrobiotique dans les Landes, retraités menacés de saisie immobilière, chômeurs désireux de créer leur entreprise… Les taux n’excèdent pas ceux en vigueur dans le circuit traditionnel. En revanche, les épargnants ont leur mot à dire sur l’utilisation de leur épargne.

    Hébergée pour l’instant par le Crédit Coopératif, la NEF espère bientôt voler de ses propres ailes. Un événement : il s’agirait là de la première création de banque en France depuis 1948. Autant dire que celle-là, de par sa spécificité, deviendrait incontournable pour les milieux alternatifs. Pierre : « Nous avons vite constaté que la NEF se référait à la doctrine ésotérique d’un certain Steiner. ATTAC étant une association laïque, nous avons voulu en savoir plus… »

    Et là, en fouillant un peu, on découvre que Rudolf Steiner (1861-1925) a créé en 1913 à Berlin un mouvement de pensée baptisé Société anthroposophique.

    Premiers aperçus de sa doctrine : « Je me suis rendu récemment à Bâle, il y avait un roman nègre qui s’inscrit dans la ligne d’une infiltration progressive de la civilisation africaine dans la civilisation européenne contemporaine. (...) S’il sort encore un certain nombre de romans nègres et que nous en donnons à lire aux femmes enceintes, [cela] donnera naissance à un bon nombre d’enfants tout gris, mulâtres. » Ou encore : « Les antécédents d’un singe ressemblent aussi peu à ceux d’un poisson que les antécédents de l’esprit de Goethe à ceux d’un sauvage (2). » Le style est abominable, une bouillie informe. Mais Steiner a de hautes vues, il appelle carrément de ses vœux un nouveau système social en Europe.

    « Quand nous avons découvert qui était Steiner, reprend Pierre, nous avons réagi par une mise en garde sur la liste de diffusion électronique d’ATTAC. À notre grande surprise, de nombreux membres ont pris fait et cause pour ce type qu’ils qualifiaient d’“extraordinaire” . Ces prosélytes avaient pour la plupart été en contact avec la NEF. Nous avons alors craint que cette société soit un cheval de Troie et, qu’en fait, ce soit l’anthroposophie qui fasse son nid dans les milieux alternatifs. »

    Marie, présidente départementale de l’association, confirme qu’elle a immédiatement alerté la direction d’ATTAC, mais que celle-ci « a botté en touche ». Il s’agirait d’un problème purement local et sans grande importance. ATTAC serait trop diversifiée pour être infiltrée par qui que ce soit…

    Des races supérieures et des races inférieures

    Or, le problème n’est pas isolé. Philippe est un bénévole du réseau Biocoop, premier distributeur français de produits biologiques avec deux cents magasins, un millier de salariés et un milliard de francs de chiffre d’affaires, soit 12 % du marché. Localement, il assure la présidence du conseil de surveillance d’une coopérative. Lui aussi est inquiet. « Suite à un partenariat signé en 1998, Biocoop assure la promotion du compte épargne nature de la NEF. C’est un placement proposé aux particuliers et destiné à financer des “projets écologiques”. En 1999, par échange de bons procédés, la NEF a accordé un total de 3,485 millions de francs à Biocoop. Quand j’ai tiqué à cause des fumeuses théories de Steiner, un représentant de la NEF m’a affirmé que les critiques qui circulent sont le fruit d’un complot communisto-maçonnique. »

    On chercherait à diaboliser l’anthroposophie ? Pas sûr. En fait de complot, ce sont des questions très simples que posent ces militants. Dans sa volonté de créer en France la « banque du développement durable et des solidarités », la NEF peut aujourd’hui compter sur la collaboration d’une large part du mouvement alternatif. Des associations comme Bâtir Humain, Éthique et Investissement ou le réseau de commerce équitable Artisans du Soleil lui ont déjà apporté leur soutien. Quelques poids lourds écolos également. Sur une brochure de la NEF figurent les logos de France Nature Environnement (FNE) et du World Wild life Fund (WWF).

    Comme celle de Ron Hubbard pour les scientologues, la pensée de Steiner irrigue tout le mouvement anthroposophique actuel.

    Mais qui était-il ? Un enfant pas comme les autres, né dans l’Empire austro-hongrois, affirmant jouir du don de clairvoyance. Un étudiant viennois fasciné par Goethe. Un prédicateur berlinois tourmenté par ses visions.

    De fait, l’omniscience de Steiner rappelle celle des « fous littéraires ». La transcription de ses 6000 conférences et quarante ouvrages couvrirait près d’un million de pages. Rien n’est épargné : religion, éducation, médecine, agriculture, politique, économie… Et quand Steiner estime dans le livre L’âme des peuples que « ce n’est pas pour le plaisir des Européens que la population indienne a péri, mais parce que la population indienne devait acquérir les forces nécessaires pour l’amener à périr », la chose est pour lui parfaitement logique. C’est la théorie de l’« involution-évolution » des races. Selon elle, l’humanité évolue selon des cycles au cours desquels se succèdent sept races dont les quatre premières, inférieures, doivent disparaître pour assurer la rédemption des trois suivantes. À cette cosmogénèse, Steiner ajoute les forces du mal, qui auraient volontairement fait dérailler le système en faisant cohabiter les races…

    En 1936, à Nuremberg, on retrouve l’Association des médecins anthroposophiques au sein du Groupe d’étude du Reich pour une nouvelle médecine allemande. Avant de tomber en disgrâce, certains principes anthroposophiques avaient donc séduit les nazis. Plus récemment, en 1995, le gouvernement hollandais a dû inciter les écoles Waldorf à la prudence. Appliquant une méthode pédagogique créée par Steiner, certains enseignants apprenaient aux enfants que la race noire est au stade de l’enfance, la jaune à celui de l’adolescence, seule la race blanche pouvant être considérée comme adulte.

    Aux États-Unis, le groupe PLANS (Pour des écoles légales et non sectaires) a dénoncé les mêmes dérapages. En Allemagne, c’est l’AKDH, le mouvement des enfants de l’Holocauste, qui s’inquiète. En France, un rapport parlementaire – plutôt décrié – de 1999 sur Les sectes et l’argent épinglait l’anthroposophie.

    Écolos et alternatifs sont sous le charme

    Comment les promoteurs d’une économie fraternelle et solidaire peuvent-ils se réclamer d’une doctrine aussi nauséabonde ? Jacky Blanc, directeur général de la NEF, nous déclare d’emblée que sa société ne tient pas pour parole d’évangile l’enseignement de Steiner, qu’elle n’est en rien liée à l’anthroposophie. Ignore-t-il que la charte même de la NEF se réfère à Steiner ? Faut-il rappeler que la Société d’anthroposophie, sociétaire de la NEF à hauteur de 180 400 francs, évoque clairement celle-ci au rang de ses « réalisations sociales » ? Jacky Blanc concède que la NEF s’est bâtie grâce à des personnes en lien direct ou indirect avec Steiner. D’ailleurs, les hypothèses du philosophe lui semblent de « bonnes hypothèses ». « Pour moi, Steiner n’a jamais eu d’attitude raciste. II a essayé de comprendre l’évolution du monde et comment celle-ci a fait qu’il y a eu une différenciation en races. On ne peut pas dire qu’on est tous identiques. On peut dire qu’on est tous égaux. Avoir osé dire qu’on n’est pas tous identiques, c’est peut-être ça qu’aujourd’hui on reproche à Steiner. »

    Le 12 décembre 1999, Alain Lipietz, député européen (Verts), a signé dans Le Monde un communiqué de soutien à la NEF : « Je travaille avec des gens de la NEF, je n’ai jamais rien trouvé de raciste ni de sectaire chez aucun d’eux. Ce rattachement de la NEF à la pensée de Steiner me semble donc douteux et en tout cas indémontré. L’ont-ils seulement lu ? »

    Guy Hascoët, le nouveau secrétaire d’État à l’Économie solidaire, se trouble quand on expose devant lui le contenu raciste de la pensée de Steiner. « J’avoue ne pas avoir étudié le dossier comme vous… ça pose problème… S’il y a un prosélytisme raciste, il existe une loi pour le condamner. Si votre reportage met en lumière les choses, on verra bien quelles seront les réactions. »

    Seule Marie-Christine Blandin, ex-présidente du conseil régional Nord-Pas-de-Calais, est d’emblée réservée : « Défendons l’économie solidaire comme un secteur éthique à part entière. Chez nous, cinq ans d’effort ont abouti à la création de la Caisse Solidaire, spécialisée dans les prêts aux chômeurs et aux Très petites entreprises. » Quelle différence avec la NEF ? Pour Christian Tytgat, directeur de la caisse en question, le problème touche à la laïcité : « Une banque confessionnelle me semble inconcevable ».

    Bien que la NEF soit une coopérative, les anthroposophes occupent 100 % des postes de direction, alors qu’ils ne représentent qu’un quart des sociétaires… « Aujourd’hui en Angleterre, une banque anthroposophe finance la création du premier collège technique vert ». Cette collusion n’est pas unique en Europe. Le 12 septembre 1987, à Liestal, l’assemblée des délégués du Parti écologiste suisse a adopté un texte concernant la politique culturelle et l’éducation inspiré des théories de Steiner.

    C’est justement en Suisse que l’anthroposophie trouve ses bases. Nous y avons découvert comment la NEF s’inscrit concrètement dans cette curieuse philosophie qui ne laisse rien au hasard.

    Dornach, petit village de Suisse alémanique, à une dizaine de kilomètres au sud de Bâle. Là, se dresse le Goetheanum. Entre bunker et cathédrale, le gigantesque édifice en béton armé abrite le siège de la Société anthroposophique universelle (SAU). Autour, douze bâtiments annexes aux formes baroques. La commune est ravie. Le Goetheanum, qui a placé quatre de ses représentants au conseil municipal, attire des milliers de « pèlerins ». Deux cents francs la visite, suivez le guide dans un labyrinthe mégalomaniaque. « Steiner, cet homme extraordinaire » par-ci, « Steiner, ce génie » par-là…

    Le Goetheanum est une « pompe à phynances »

    Plus difficile d’en savoir plus sur la nébuleuse planétaire qui s’articule autour du Goetheanum et se décline en quarante-cinq représentations nationales. Celles-ci assurent la promotion d’une série de sous structures en apparence hétéroclites : les écoles Waldorf (650 dans le monde, dont une dizaine en France accueillant 2500 élèves environ), la Communauté des Chrétiens, diverses maisons d’édition, une kyrielle d’associations à caractère médical, pharmaceutique ou agricole. Toutes, à leur façon, appliquent les enseignements de Steiner.

    À en croire le guide, ce complexe organigramme est totalement indépendant du Goetheanum. En réalité, des sommes considérables « remontent » vers la maison mère de Dornach. Chaque représentation nationale lui reverse un tiers de ses cotisations. Pour la France, cela peut représenter jusqu’à 500 000 francs par an. Peu de chose en comparaison des droits d’auteur sur les 354 ouvrages de Steiner diffusés à travers le monde et gérés par la Rudolf Steiner Verlag du Goetheanum.

    Cette dernière est par ailleurs l’actionnaire majoritaire du groupe Weleda, qui commercialise les fameux « remèdes anthroposophiques » (dont Iscador, un extrait de gui censé combattre le cancer). En 1997, Weleda, avec 1100 salariés dans dix-huit pays, affichait un chiffre d’affaires de 700 millions de francs. Weleda finance notamment les « travaux scientifiques » de la Section médicale du Goetheanum. Dans le même registre, les produits de « l’agriculture anthroposophique bio-dynamique » (des engrais chargés en « force astrale ») sont gérés par l’association internationale Demeter, administrée par des anthroposophes.

    Le jeu des cotisations, des copyrights ou de l’actionnariat contribue donc à alimenter les caisses de la maison mère. Sans oublier les dons.

    La NEF, dans ce circuit, apparaît comme une pompe à finances, à l’instar des autres établissements ouverts en Belgique, aux Pays-Bas, ou en Angleterre. Pour engranger l’épargne de tous, il faut prêter à tous. Ainsi seulement, « l’argent qui relie les hommes » peut, à terme, profiter au Goetheanum.

    Récemment, la revue L’Esprit du temps normalement réservée aux seuls adeptes, exprimait ses craintes que la NEF ne finisse par perdre son âme steinerienne. Une inquiétude aussitôt démentie par un « droit de réponse » signé Jean-Pierre Bideau et Henri Nouyrit, responsables du conseil de surveillance de la NEF : « La charte de la NEF qui fait explicitement référence à l’œuvre de Rudolf Steiner (...) témoigne que l’élargissement et la diversification de son sociétariat n’ont pas eu pour conséquence une trahison de ses fondements (…). Dans les milieux de l’économie sociale, de l’économie alternative et solidaire, de l’agriculture durable, du logement social qui n’avaient quasiment aucun contact avec la pensée et l’œuvre de Steiner la NEF a apporté au cours des années un témoignage qui a ouvert un horizon nouveau à bien des personnes. Mais en même temps, chaque fois qu’une institution steinerienne s’est adressée à la NEF pour avoir un appui, elle a trouvé une équipe dévouée à sa cause. » Voilà qui est explicite.

    La NEF est plus proche de Davos que de Seattle

    Tout aussi transparente est la doctrine économique de Steiner. Le parlementarisme n’y a pas sa place. Ni le syndicalisme, jugé improductif : « Qui donc travaillerait si [les] hommes devaient passer leur temps en débats sur le travail ? » Son programme rappelle beaucoup plus les conciliabules de Davos que les discours du Larzac : « Il faut soustraire toute activité économique à la tutelle de l’État (…). Dans une organisation économique à l’échelle mondiale le libre-échange offrira la meilleure garantie pour l’établissement des prix justes dans les diverses régions de la Terre. »

    La NEF ne se cache pas de participer à cette vision : « C’est évidemment à cette partie de l’œuvre de Steiner que se réfère la NEF » déclare-t-elle dans un communiqué. Avec un capital approchant les 40 millions de francs, elle postule donc pour le statut de banque. La question, confirme Matignon, est actuellement en cours d’examen à la Direction du Trésor.

    La « troisième gauche » continuera-t-elle à se rapprocher d’une philosophie aux antipodes de ses aspirations. Militants alternatifs et écolos ont-ils compris les enjeux ?

    1. Association pour une taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens.
    2. Conférence de 1922 sur le thème Santé et maladie.

    Renaud Marhic

    • Bravo Renaud bien jetté.
      Les "posophes" restent néanmoins de gentils illuminés fachisants, alors pourquoi pas les autres, la plupart des milieux post soixante-huit-tards, ecolo, bio, alternatif pseudo médicaux... sont complétement à l’ouest : exemple le tête de liste de Mme la verte présidentiable pour la députerie dans le Jura, à Dôle à l’époque, ben mon cochon, il a dû demissionner aprés que la presse locale se fit écho de ses accointances on ne peu plus disgracieuses avec une secte pseudo-hindouiste pédof, considérée dangereuse et aujourd’hui installée prés de Jussieu. Pour la Dame tout va bien, elle vit à Montreuil actuellement, ne serait-elle pas d’ailleurs la concubine d’un pédof autoproclamé, oh non !, les éphélans ça trompe énormement. Soyez écolos, soyez bio, alternatifs, altermondialistes... mais gardez votre sens critique et n’oubliez jamais que les gourous ne sont pas toujours ceux qui le paraissent. Vive le libre arbitre et la liberté d’expréssion.