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Interview Eva Joly : « C’est un geste d’autocrate »

Publie le samedi 10 janvier 2009 par Open-Publishing
3 commentaires

InterviewEva Joly, juge de l’affaire Elf, dénonce le bâillonnement d’un contre-pouvoir :

Recueilli par KARL LASKE

Aujourd’hui conseillère du gouvernement norvégien, Eva Joly, l’ex-juge d’instruction de l’affaire Elf, sera candidate sur la liste des Verts aux européennes.

Quel est le sens de l’annonce, par Nicolas Sarkozy, d’une suppression du juge d’instruction ?

 J’ai pensé jusqu’au dernier moment qu’il ne s’agissait que d’une fausse rumeur. Ce projet du président de la République est une atteinte majeure à notre Etat de droit et à l’équilibre de nos institutions. Le juge d’instruction est une garantie pour le citoyen d’une instruction à charge et à décharge. Comment croire qu’un parquet aux ordres - qui viendrait le remplacer - conduirait mieux l’enquête ? En réalité, on s’apprête à désarmer la justice, au moment où de grands acteurs économiques portent, par leurs fautes de gestion, une immense responsabilité dans la crise financière. Il est aussi profondément choquant que le président de la République vienne dire que cette réforme pourra entrer en application en 2009. C’est un geste d’autocrate. Envisage-t-il aussi de revenir aux ordonnances ? La procédure pénale ne peut être réformée qu’après un débat parlementaire, et c’est mépriser nos institutions que de l’ignorer à ce point. Il ne fait pas de doute que le Président veut installer une dépénalisation des délits financiers.

Nicolas Sarkozy évoque le respect des droits des personnes mises en examen…

 Le véritable projet est de bâillonner et de supprimer les contre-pouvoirs en France. Seules 5 % des affaires viennent devant le juge d’instruction. Mais ce sont les dossiers compliqués, qui ne concernent pas la délinquance ordinaire. Pourquoi penser que la défense des libertés individuelles seraient, dans une affaire, mieux assurées par le parquet et la police qu’avec un juge d’instruction indépendant, contre lequel il existe des recours ? Le juge est une personne identifiée, nommée par décret, après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, qui mène l’enquête, contrairement au policiers ou aux parquetiers qui peuvent être mutés, sont interchangeables, et n’offrent pas une garantie de continuité. Si le souci était de mieux garantir les libertés individuelles, il faudrait plutôt mettre fin à la possibilité pour les policiers ou le parquet de placer en garde à vue nos concitoyens pour outrages. Ou encore se pencher sur les comparutions immédiates. On y juge encore le vol de deux bouteilles de shampoing restituées… La commission sur l’affaire d’Outreau n’a pas non plus préconisé la suppression du juge d’instruction. A l’époque d’Outreau, c’est un système entier qui avait dysfonctionné.

Quelles peuvent être les conséquences de cette mesure ?

 Repensez à l’affaire Elf. Lorsque je m’apprêtais à mettre en examen l’ancien PDG de la compagnie, le président Jacques Chirac l’avait fait nommer à la tête de la SNCF ! Que croyez-vous qu’il serait arrivé si le parquet avait été chargé de l’enquête ? Que croyez-vous qu’il arrivera demain si des proches du Président sont visés par des enquêtes ?


Commentaire :

Petit à petit, Nabotdéconnozor marque ses lignes et inscrit dans notre système judiciaire tout le nécessaire pour couvrir les antropophages cazpitalistes qui l’ont installés sur un fauteil de président en mutation d’une :

AUTOCRATIE NABOSARKOZIENNE

Il faudra que les militants citoyens manifeste pour faire barrage à cette réforme post-républicaine.

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